Moi, que voulez-vous, Tapie , je l’aime ! Non, ne me faites pas plus naïf que je ne suis, je sais bien qu’il ne gagnera jamais le concours de Rosière de la Mairie de Paris, mais quel type ! En le regardant, lundi, sur France 2, je me suis dit qu’il « en avait », le bonhomme, et pas seulement dans le caleçon. Quelle leçon pour les bien nés, pour ceux qui « ont le droit de… », comme il l’a martelé à Pujadas [1], tandis que d’autres, les « mal » nés, la populace, nous, en somme, nous devrions nous contenter du peu qu’ils nous laissent, et encore, en disant merci, et en saluant bien bas.
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Tapie, en tous les cas, les conventions, la bienséance, la bienpensance, ça ne lui file pas un complexe d’infériorité. Lui, il s’est fait tout seul, il aime gagner de l’argent, le dépenser, avec tout le « mauvais » goût dont peut être capable un parvenu. Lui ne voit pas pourquoi il devrait s’incliner devant des gens dont le seul mérite est de s’honorer d’un ancêtre qui aurait intrigué pour être le porte mèche de Louis XIV… Tapie aurait pu avoir un grand destin de bouffon du roi. Mais sa grande erreur a été de croire, à une époque, que sa réussite lui ouvrait la porte de la « upper class », qu’elle en ferait l’égal des Bolloré, des Arnaud, des Pinault, des Rotschild et autres capitaines d’industrie ou de finance, ou, mieux, des Fabius, des Deferre, des Delors, voire, il en rêvait, de Tonton Mitterrand lui-même…
Il était allé trop loin, Nanar. On l’a vite fait tomber de son nuage. Vous me direz qu’il avait fait des choses très vilaines, et qu’il méritait ce qui lui est arrivé. C’est sans doute vrai, encore qu’on ne prête qu’aux riches… sauf que si tous ceux qui se sont alliés pour le démolir devaient rendre à leur tour des comptes à la justice, il faudrait se dépêcher de construire des milliers de places de prison pour VIP.
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Allez, venons-en au fond, la procédure d’arbitrage dans cette affaire de cornecul du Crédit Lyonnais. Si vous avez bien en tête que tous les soupçons médiatiques sur la pertinence de l’arbitrage n’ont aucune valeur juridique, et que la seule possibilité d’annuler la procédure, est de démontrer que l’arbitrage a été frauduleux, vous avez tout compris. Avec, pour pimenter la sauce, une prescription imminente, qui oblige les juges, dont on ne doute à aucun moment de l’indépendance (mdr), à établir des actes de justice un peu tirés par les cheveux (les mises en examen de Tapie, d’un de ses avocats, de l’ancien directeur de cabinet de Christine Lagarde - là, franchement, on se demande quelle mouche les a piqués), pour retarder l’échéance. Et comme, derrière Tapie, ce que l’on cherche, c’est à éliminer Sarkozy, que c’est mal parti dans l’affaire Bettencourt, que les sondages sont ce qu’ils sont, ça s’affole dans le landerneau, et on en arrive à des extravagances telles que la garde à vue de 96 heures (4 jours !) de Tapie, procédure réservée en principe aux terroristes, rien que ça ! De là à nous conforter dans l’idée qu’avec les socialistes, et après la répression du « mariage pour tous », nous avons libéré une justice de république bananière, il n’y a qu’un pas, que je franchirai allègrement…
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Sauf que… Faire rembourser Tapie, on verra, mais ça m’étonnerait que l’Etat Français revoie un jour la couleur de l’argent qui lui a été octroyé, d’autant plus que, si on y regarde de plus près, ce n’est pas forcément Tapie qui n’a pas les cuisses propres. Quant à vouloir impliquer Sarko, c’est proprement grotesque, et je vais vous expliquer pourquoi.
D’abord une question, à laquelle aucun média, aucun accusateur de Sarkozy ne s’est aventuré à apporter une réponse, et pour cause, et qui pourtant est essentielle : pourquoi Sarkozy aurait-il pris le risque de favoriser Tapie, fût-il son ami, contre les intérêts de l’Etat et contre son propre intérêt à lui ? La seule réponse possible est : pour une partie du gâteau, dont il avait besoin pour sa campagne présidentielle ! Et cette partie, compte tenu du risque pris, vous serez bien d’accord qu’elle ne pouvait pas être inférieure à, au minimum, 10%, soit quarante millions d’euros. OK ? En même temps, Sarkozy aurait, toujours d’après ces mêmes gens qui jurent, la main sur le coeur, que leur seul souci est de faire éclater la « vérité », obtenu cinquante millions d’euros de Kadhafi. Pour Liliane Bettencourt, on n’avance pas de chiffre, mais, comme elle était paraît-il gâteuse, il a bien dû lui soutirer plusieurs millions, mettons dix. Ce qui nous fait un chiffre rond de cent millions d’euros. Ajoutez les dons, subventions et autres ressources parfaitement légales… Savez-vous combien ont été autorisés à dépenser pour leur campagne les deux finalistes de la dernière présidentielle ? Un peu plus de vingt millions d’euros.
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Si l’on suit ses contempteurs, Nicolas Sarkozy aurait donc dépensé plus de cent millions d’euros pour sa campagne, soit au moins cinq fois l’enveloppe autorisée, et cinq fois plus que son concurrent « normal », et il aurait quand même perdu, et en plus ça ne se serait pas vu ? La commission de contrôle des frais de campagne, et le Conseil Constitutionnel (dont le Président, Jean-Louis Debré,est un ennemi intime de Sarkozy), qui lui ont refusé ses comptes pour moins de 400.000 euros de dépassement, auraient sanctionné la paille, et laissé passer la poutre ? Je vais vous dire : ça ne tient pas debout !
Alors tout cela devrait se terminer en eau de boudin. Mais, et c’est sans doute là le calcul de notre « cynique joyeux [2] » président, il en restera toujours quelque chose. « Calomniez, calomniez… ». Ah, que la présidence exemplaire est belle… !