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La taxe lapin, nos députés en pleine action !

, par  NEMO , popularité : 6%
NJ-Ile de France

Chaque semaine, les lapins (rendez-vous non honorés, non annulés) font perdre “près de deux heures pour le médecin quelle qu’en soit la discipline”, relève le communiqué de l’Ordre et de l’Académie de médecine. Pour limiter ces incivilités, 19 députés Renaissance proposent de “sensibiliser et de responsabiliser notre société”. Pour ce faire, ils ont concocté une proposition de loi dont voici l’article unique :
Art. L. 114-17-3. – Sur déclaration volontaire du professionnel de santé, peut faire l’objet d’un avertissement ou d’une pénalité prononcés par le directeur de l’organisme local d’assurance maladie, l’absence répétée d’un patient à des rendez-vous médicaux sans en avoir préalablement informé le professionnel de santé concerné au moins vingt-quatre heures précédant le rendez-vous médical. Le montant de la pénalité varie selon la récurrence des absences constatées. Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret.

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Vu comme ça et sans réfléchir, vous vous dites que c’est une bonne idée, qu’il y en a marre des « incivilités », des malpolis et des gougnafiers, des crottes de chien, des piétons qui ne respectent pas les feux, des trottinettes folles sur les trottoirs, qu’il faudrait enfin sévir, que cette proposition va dans la bonne direction… Sauf que, nous sommes en France, et que notre cher et vieux pays est le royaume républicain des droits de l’homme et de la paperasse fonctionnarisée. Alors, je vais vous dire comment ça va se passer.

Sachez d’abord que le ministre de la Santé, Catherine Vautrin, enthousiasmée par l’initiative, a décidé de porter cette proposition de loi, qui sera prochainement soumise au Parlement – ça urge !-, lequel s’enflammera entre partisans de l’ordre, et farouches adversaires au nom de la dignité humaine et de « ce sera toujours les plus démunis qui seront pénalisés ». Vous aurez cependant remarqué que cette future loi, que les rédacteurs ont pris bien soin de rendre la plus vague et la moins compromettante pour eux, laisse le soin au gouvernement de fixer par décret les modalités d’application.

Madame le ministre a déjà donné des indications, accrochez-vous, ça va tanguer : il y aurait une amende-dédommagement du médecin de 5 euros  ! (non, ce n’est pas une coquille, c’est bien 5 et pas 50). Il faudrait aussi que le médecin soit à l’initiative de la protestation, et donc, qu’il fasse un signalement auprès de la Caisse de Sécurité Sociale – on peut faire confiance aux rédacteurs du ministère pour nous pondre un formulaire très complet, que les médecins auront tout le loisir de remplir pendant le temps libre que leur offre (pour 5 euros !) l’insouciant malappris (CQFD)-. Le directeur de la Caisse de Sécurité Sociale destinataire de la demande dûment motivée devra ensuite estimer la pertinence et l’opportunité d’une éventuelle poursuite, après avoir, cela va de soi, réuni un comité ad-hoc constitué de juristes, de représentants des usagers, et bien sûr de délégués du personnel. Lorsque la décision de sévir sera prise, Il faudra ensuite trouver un moyen de faire payer cette amende-dédommagement mirobolante sans commettre d’impair tel que pénaliser par erreur des malheureux qui ayant oublié de prendre leur médicament auraient consécutivement zappé leur rendez-vous – c’est que 5 euros peuvent représenter l’équivalent d’un repas en moins-. Et puis n’oubliez jamais que nous sommes en France, je le répète, pays des droits de l’homme, de la femme et des non binaires : il faudra prévoir une voie de recours pour la victime de la dénonciation du médecin (retour des heures les plus sombres de notre Histoire ?). Appel, Conseil d’État, Cour de Justice européenne, Cour Européenne des Droits de l’Homme, on n’a pas fini… Et pour gérer tout cela, devinez ce qu’il nous faudra ? Des fonctionnaires spécialisés ! De l’emploi en plus, du chômage en moins.

A plus de 3000 milliards d’euros de dettes, on n’est plus à cela près, n’est-il pas ?