Moi j’ai dit bizarre, bizarre ? Comme c’est bizarre.
C’est le ministre de la justice, Belkacem Zeghmati, qui a révélé le projet du gouvernement algérien : « la déchéance de la nationalité algérienne acquise ou d’origine sera applicable à tout Algérien qui commet, en dehors du territoire national, des actes portant volontairement de graves préjudices aux intérêts de l’État ou qui portent atteinte à l’unité nationale ». Vaste programme, aurait commenté le Général. Vaste programme, en effet, puisque ce texte, interprété selon le bon vouloir des dirigeants algériens -qui eux, commandent aux juges, et pas l’inverse-, pourrait permettre de déchoir de la nationalité algérienne à peu près tous les algériens de la diaspora, pour peu qu’ils aient traversé la rue en dehors des clous.
Alors, me direz-vous, qu’est-ce qu’il leur prend, aux Algériens, eux qui sont si attachés à la « nationalité » algérienne, eux dont le code de la nationalité précise qu’il suffit qu’un grand parent soit algérien pour l’être soi-même ? Hé bien je vais vous l’expliquer.
D’abord un petit rappel sur les principes internationaux qui régissent la nationalité : tout être humain bénéficie d’un droit imprescriptible à une nationalité. Ne peut donc être déchue de sa nationalité une personne, quelle qu’elle soit et quelque crime ou délit qu’elle ait commis, si la sentence de déchéance en fait un « apatride », c’est-à-dire un être humain sans racines. Ne peuvent donc être frappées de déchéance de nationalité que les personnes qui jouissent d’au moins deux nationalités, concrètement les bi-nationaux et plus.
Bon, ces principes posés, imaginez maintenant que l’an prochain la France se débarrasse de la Macronerie, et, on peut toujours rêver, que ce soit un « populiste » aux idées zémouriennes qui soit appelé à diriger notre pays. Mettons que ce nouveau président se décide à déchoir de la nationalité française et à expulser vers leur « autre » patrie bien-aimée, elle, les bi-nationaux qui se montrent un peu trop désinvoltes envers les lois de la France. La France resterait raccord avec le droit international, l’ONU, la CEDH, et les assos droits de l’hommistes l’auraient dans le baba. Quant à l’Algérie, elle serait bien obligée de recueillir ses « nationaux »... Or, il y aurait, d’après les autorités algériennes, au bas mot six millions d’algériens en France, dont une bonne partie sont franco-algériens... et que l’Algérie n’a pas forcément envie de voir revenir au bercail.
Vous voyez où je veux en venir ?
Toute cette histoire, c’est une course de vitesse : c’est à qui déchoira le premier. Si l’Algérie applique avant la France la déchéance de nationalité aux franco-algériens de la diaspora qui se conduisent « mal » (course gagnée d’avance, la justice algérienne pouvant se montrer très expéditive en cas de besoin), ces franco-algériens déchus ne seront plus que... français. Et donc, non expulsables par la France qui devra se les garder bien au chaud.
Nous vivons une époque formidable, n’est-il pas ?