Lors de l’émission « C dans l’air » de ce lundi 7 septembre, à la question posée par Yves Calvi : « La France peut-elle accueillir 24.000 réfugiés ? », le politologue Roland Cayrol, un esprit apparemment fort brillant, n’a pas hésité une seule seconde pour lui répondre ; « La France a bien accueilli, en 1962, plus d’un million de Pieds-Noirs ! ».
Comment peut-on annoncer de telles contre-vérités sans se sentir ridicule ? Et pas un seul participant n’a eu le courage de le lui faire remarquer.
*Tout d’abord il ne s’agissait pas d’un million d’étrangers qui réclamaient le droit d’asile, mais d’un million de Français qui revenaient chez eux, dans leur pays, dans leur patrie.
*Un million de Français que la France avait obligé à quitter leurs départements français.
*Des Français qui s’étaient battus les armes à la main pour conserver ces départements à la France et qui, nombreux, se sont fait assassiner par l’ennemi FLN et, ce qui est bien plus grave, par l’armée française.
*Un million de Français qui, il m’est pénible de le rappeler à Roland Cayrol, n’ont pas été accueilli par la France, bien au contraire :
**interview que Gaston Defferre avait accordé au quotidien "Paris-Presse-L’Intransigeant" le 26 juillet 1962) : -"I l y a 15.000 habitants de trop actuellement à Marseille, c’est le nombre des rapatriés d’Algérie. -Pas question d’inscrire leurs enfants à l’école car il n’y a pas assez de place pour les petits marseillais. -Qu’ils quittent Marseille en vitesse, qu’ils essaient de se réadapter ailleurs. -Qu’ils aillent se faire pendre ailleurs. -Ils fuient. Tant pis ! En tout cas je ne les recevrai pas ici. D’ailleurs nous n’avons pas de place. Rien n’est prêt. Qu’ils aillent se faire pendre où ils voudront ! En aucun cas et aucun prix je ne veux des Pieds-Noirs à Marseille ».
– Voyez-vous une solution aux problèmes des rapatriés à Marseille ?
– Oui, qu’ils quittent Marseille en vitesse ; qu’ils essaient de se réadapter ailleurs et tout ira pour le mieux. Il faut les pendre, les fusiller, les rejeter à la mer… Jamais je ne les recevrai dans ma cité.
Dans le centre de Marseille, une inscritpion sur un grand panneau : « Les Pieds-Noirs à la mer ».
Un sondage IFOP, début juillet 1962, indiquait que 62% des métropolitains refusaient toute idée de sacrifice à l’égard des Français d’Algérie.
Voici d’ailleurs un rapport découvert lors de l’ouverture des archives : « Les Français d’Algérie qui débarquent en métropole font l’objet d’une froide indifférence, ou même d’appréhensions. On ne les connaît pas. On ne sait d’où ils viennent ni si ils sont « vraiment » français. Jugés premiers responsables du conflit qui vient de se terminer et qui a couté la vie de trop nombreux soldats métropolitains, ils ne semblent pas « mériter » que l’on porte sur eux le regard compatissant que beaucoup espèrent ».
*Conseil des ministres du 18 juillet 62, Louis Joxe s’exclame : « Les Pieds Noirs vont inoculer le fascisme en France. Il n’est pas souhaitable qu’ils s’installent en France. Il vaudrait mieux qu’ils aillent en Argentine, au Brésil ou en Australie »
*Pompidou, premier ministre, appuie cette idée : « Pourquoi ne pas demander aux Affaires étrangères de proposer des immigrants aux pays d’Amérique du Sud ou à l’Australie ? Ils représenteraient la France et la culture française »
*De Gaulle : « Mais non ! Plutôt en Nouvelle Calédonie ! Ou bien en Guyane qui est sous peuplée et où on demande des défricheurs et des pionniers ! »
Pas l’once d’une compassion parmi les responsables politiques français.
A Alain Peyrefitte qui lui expose « le spectacle de ces rapatriés hagards, de ces enfants dont les yeux reflètent encore l’épouvante des violences auxquelles ils ont assisté, de ces vieilles personnes qui ont perdu leurs repères, de ces harkis agglomérés sous des tentes, qui restent hébétés… »
*Le Général répond sèchement : « N’essayez pas de m’apitoyer ! »
Il s’agissait pourtant d’un million de Français, et non pas d’étrangers, qui partageaient les mêmes valeurs, la même culture, la même religion.
Un million de Français qui ne pourraient jamais retourner « chez eux » puisque ce « chez eux » n’éxistait plus !
Alors un peu de retenue, Roland Cayrol, comment pouvez-vous supposer que ces « réfugiés » étrangers retourneront un jour chez eux ! Le pensez-vous vraiment ? Est-ce que les maghrébins retournent chez eux une fois installés en France, chez nous ?
Il est quelquefois indispensable de rafraichir les mémoires défaillantes de certains : La France n’a pas accueilli un million de Pieds Noirs, elle était obligée de les accepter de gré ou de force !