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Les camionneurs canadiens à la rescousse de la société libérale

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Cet article provient d'une source externe à NJ sans autorisation mais à titre d'information.

Par Jérôme Blanchet-Gravel, depuis le Canada.

Les images ont fait le tour du monde : les camionneurs canadiens et leurs supporters ont paralysé toute la fin de semaine dernière la capitale fédérale d’Ottawa pour manifester contre la vaccination obligatoire que veulent leur imposer Ottawa et Washington pour pouvoir continuer à exercer leur métier. Plus largement, le mouvement proteste contre les mesures sanitaires abusives et liberticides, de même que contre l’idéal du risque zéro qui les justifie, devenu une quasi-religion d’État au Canada.

Les camionneurs sont soutenus par des entrepreneurs à succès comme Elon Musk et des intellectuels de renommée mondiale comme Jordan Peterson . Le mouvement semble tellement avoir le vent en poupe qu’il pourrait finir par s’étendre à d’autres pays, à l’invitation de chefs de partis comme Florian Philippot, en France.

Un réveil canadien ?

Après avoir témoigné pendant presque deux ans d’une obéissance exemplaire, voire d’une inquiétante docilité, un nombre grandissant de Canadiens en ont maintenant assez de vivre dans cet État maternel et réglementariste transformé en immense safe space. Le Canada est devenu un pays ultra-aseptisé et médico-centré dont les gouvernants n’acceptent plus aucune forme de fatalité et où ils veulent encadrer les moindres aspects de la vie sociale.

Au Québec, dans la province francophone, cette obéissance a souvent pris la forme d’une confiance aveugle envers le gouvernement Legault, mais la fatigue due en grande partie à la hausse de la détresse psychologique se fait toujours plus ressentir.

Les dernières semaines ont vu l’effritement du récit médiatique consacré à alimenter la peur pour laisser les gouvernements offrir de la sécurité en contrepartie, une rupture symptomatique de cette renaissance graduelle.

Les camionneurs accusés d’appartenir à l’extrême-droite

C’était prévisible : le mouvement des camionneurs doit toutefois composer avec des politiciens et des journalistes qui leur sont ouvertement hostiles et qui les accusent d’abriter des gens gagnés aux idéaux d’extrême droite. Les camionneurs et leurs supporters seraient des partisans zélés de Donald Trump et certains d’entre eux seraient des fondamentalistes chrétiens, de même que des individus aux tendances racistes et misogynes.

La chanson est bien connue : les camionneurs et leurs soutiens seraient des personnes sans éducation, des égoïstes qui ne penseraient qu’à eux et non aux autres. Pourtant, les mesures sanitaires qui n’en finissent plus sont surtout soutenues par des couches confortables et privilégiées de la société.

Le traitement médiatique des événements renforce une crise de la représentation qui s’accentue et parallèlement, celle des grands médias traditionnels qui accélère la transition vers les médias alternatifs. Dans un esprit manichéen digne des blockbusters américains, les camionneurs sont opposés aux membres du personnel de la santé exténués, comme si plusieurs de ces derniers n’étaient pas eux aussi opposés à la poursuite des mesures abusives et liberticides.

Un tout nouveau clivage

Dans ce même esprit manichéen, on tente de faire croire à un bloc monolithique de droite, alors qu’un nouveau clivage est né depuis quelques mois, lequel s’articule autour de la liberté et de la sécurité.

Depuis le déclenchement de l’état d’urgence, en mars 2020, le spectre politique a évolué au Canada, réunissant parmi les opposants aux mesures sanitaires des gens de gauche et de droite, des pro-laïcité et des croyants, des sociaux-démocrates et des libertariens. Dans ce contexte, il est ridicule et mensonger d’associer l’ensemble du mouvement à une extrême droite qui est d’ailleurs totalement inexistante dans les parlements canadiens.

Enfin, le mouvement serait anti-vax, alors qu’encore une fois, la réalité est tout autre. Selon les chiffres de l’Alliance canadienne du camionnage, une « grande majorité » de camionneurs canadiens sont doublement vaccinés (plus de 85 % selon d’autres estimations), ce qui met fortement en doute l’idéologie antiscientifique prêtée au mouvement.

Un mouvement antisystème ?

Dans leur ensemble, les partisans du convoi ne s’opposent pas tant au vaccin comme outil médical qu’au nouveau régime de soumission et de censure qu’il symbolise dorénavant, avec toutes ses contraintes et ses doses à l’infini.

Il serait tentant d’associer le mouvement des camionneurs aux Gilets jaunes, mais dans le contexte nord-américain, il s’agit encore moins de s’élever contre des inégalités économiques que de sauvegarder le libéralisme dans une zone géographique où il était censé être roi et le rester. Si les élites canadiennes avaient joué leur rôle et fait contrepoids aux dérives de leurs gouvernements durant la crise, la tâche de défendre la société libérale ne serait sans doute pas revenue à des camionneurs diabolisés. En revanche, le rejet d’une classe élitiste déconnectée de la réalité populaire s’apparente clairement à celui exprimé en France par les Gilets jaunes.

Voir en ligne : https://www.contrepoints.org/2022/0...