« Benoît Hamon, ou la victoire des autruches »
Emmanuel Macron peut se frotter les mains. Mais Marine Le Pen plus encore. La molle dynamique qui semble pouvoir porter Benoît Hamon jusqu’à la victoire de la primaire du PS, dimanche prochain, met en scène les vieux habits d’une idéologie coupée du réel. Manuel Valls, qui arrive deuxième à l’issue du premier tour poussif (il a obtenu 31% des voix, contre 36% à son adversaire), a raison de prédire la défaite assurée de cette gauche utopique, immature, acquise à l’islam politique. Le gauchisme culturel, majoritairement soutenu par ceux, peu nombreux, qui se sont mobilisés hier (1,6 million de votants), est voué à l’échec. L’accélération de ce que j’ai appelé la Révolution des Œillères (bloc-notes du 31 mai 2013) ne laisse plus d’espace à ceux qui ne veulent rien voir des réalités. De ce point de vue, Hamon est la caricature du dirigeant hors-sol et démagogique, avec notamment son revenu pour tous à 750 euros par mois, sa politique construite sur l’imposition fiscale alourdie et son électoralisme en direction des minorités. A moins que Valls n’arrive à mobiliser les abstentionnistes sur son programme réformateur et républicain - de ce point de vue, le débat de mercredi s’annonce frontal - une victoire finale de Hamon laisserait à Macron le monopole de la gauche réformiste. Pour autant, l’absence de Valls ferait place au déni sur la question identitaire. L’hypothèse d’un second tour Macron-Le Pen serait alors une aubaine pour cette dernière.
Les réticences de Hamon à aborder la question posée par l’islam en France sont celles de Macron. Tous deux partagent la même vision multiculturaliste de la société et la même attitude conciliante face à l’idéologie islamiste et ses demandes de visibilité. Hamon, qui ne fait pas mystère de sa stratégie déployée en direction des banlieues et des quartiers, est un défenseur du voile et de la cause palestinienne. Beaucoup de musulmans de France le voient comme un candidat allié. Or cette complaisance, qui est aussi celle de Macron avec sa politique de "bienveillance", revient à accorder une oreille attentive aux exigences identitaires d’une partie de la population, alors même que l’insécurité culturelle est combattue quand elle émane de la société d’accueil. Plus gravement, la volonté de séduire un électorat musulman victimisé amène ces hommes politiques à relativiser la montée du totalitarisme islamique qui consolide une contre-société. "Ce qui est inquiétant, c’est que les musulmans en France me paraissent plus fondamentalistes que ceux que j’ai connus en Palestine", remarque Waleed Al-Husseini, palestinien réfugié à Paris, dans sa contribution à l’enquête de terrain menée sous la direction de Georges Bensoussan (1). Une défaite de Valls, dimanche prochain, serait la victoire totale des autruches. François Fillon, qui n’en est pas une, a intérêt de se réveiller…
(1) Une France insoumise, Albin Michel