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Voitures électriques : les constructeurs occidentaux menacés par la domination chinoise

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Cet article provient d'une source externe à NJ sans autorisation mais à titre d'information.

Ce n’est pas encore forcément très clair, mais la voiture électrique pourrait constituer un changement de paradigme industriel, non seulement en affaiblissant l’avantage concurrentiel des constructeurs historiques occidentaux, européens et américains, mais également en bouleversant les équilibres de la filière. Et la Chine a bien compris tout le parti qu’elle pouvait tirer de la situation.

Sortons un peu des débats techniques ou écologiques sur la voiture électrique ; le fait est que la propulsion 100 % électrique est bien partie pour devenir la technologie de mobilité de demain. Il reste évidemment énormément de défis à relever : type de carburant (hydrogène ou batterie ?), autonomie, accès aux matières premières (les fameuses terres rares ), recyclabilité, réparabilité, sécurité incendie, temps de (re)charge, nombre de cycles, disponibilité et compatibilité des bornes pour les batteries, production d’un hydrogène vert…

Mais considérant les progrès réalisés en une petite décennie, il reste très probable que la majorité des points bloquants d’aujourd’hui, comme le prix, disparaissent ou s’atténuent grandement à moyen terme.

Fin de règne pour le puissant moteur thermique

Le « dieselgate » a été un avertissement précoce : faute de pouvoir se plier aux exigences environnementales de plus en plus contraignantes (et coûteuses en R&D), les constructeurs automobiles ont essayé de tricher. Le moteur thermique est en train de décrocher, éreinté par la quadrature du cercle des véhicules d’aujourd’hui : faire toujours plus avec moins, des véhicules toujours plus lourds exigeant toujours plus de puissance, mais moins de consommation pour moins d’émissions. Les voitures électriques ont bien des défauts, mais il reste un constat implacable : en fonctionnement, un moteur électrique n’émet rien (hormis un champ magnétique).

Du côté des acheteurs, en dehors du prix, les réticences au passage à l’électrique sont peu nombreuses, si on excepte les jusqu’au-boutistes du moteur thermique comme les Coal-Rollers aux USA : performance, fiabilité, silence, absence de vibrations… La propulsion électrique n’est pas dénuée d’atouts, y compris sur le plan plus technique du rendement énergétique et de la simplicité mécanique, un moteur électrique n’ayant rien à voir avec un moteur thermique en termes de complexité.

Mais ce sont précisément les attentes nouvelles des utilisateurs-conducteurs qui risquent d’avoir le plus d’impacts sur la filière industrielle.

Que demandent aujourd’hui les acheteurs d’une voiture électrique ?

En majorité, de l’autonomie et des équipements, à prix raisonnable. Or, sur les deux premiers aspects, les constructeurs automobiles n’ont pas la main, particulièrement pour les voitures électriques à batteries : ce sont les équipementiers qui vont répondre en premier aux exigences du client. Concernant le prix, les constructeurs occidentaux ont toujours répété à raison que la qualité avait un coût.

Mais l’Occident a de moins en moins l’apanage de la qualité.

Les constructeurs automobiles européens étaient en effet auparavant loués pour la qualité et les performances de leurs moteurs, en particulier en Allemagne. Mais qui se soucie des caractéristiques du moteur électrique aujourd’hui, même pour une Porsche ou une Audi électrique ? Avec la voiture électrique, les constructeurs automobiles européens, et dans une moindre mesure américains (il y a Tesla en embuscade), sont en train de perdre ce qui faisait jusque-là leur réputation et leur avantage concurrentiel : la qualité et la fiabilité du moteur, à la fois cœur et muscles de la voiture thermique.

La revanche des équipementiers

Si les noms des équipementiers Valeo ou Bosch sont familiers pour les conducteurs, c’est très certainement parce qu’ils les ont sous le nez chaque jour, étant les marques parmi les plus répandues d’essuie-glaces sur les voitures neuves.

Mais ce sont bien eux, et d’autres noms moins connus parmi les équipementiers, qui prennent aujourd’hui leur revanche et sortent de l’ombre. L’enjeu n’est pas que symbolique : les équipementiers représentaient déjà en France en 2020 un quart de la valeur ajoutée de la filière de construction automobile. Sur une voiture thermique actuelle sortie d’usine, les équipementiers représentent jusqu’à 50 % de la valeur ajoutée. Sur l’ensemble des véhicules produits, Xavier Horent , délégué général du Centre national des professionnels de l’automobile (CNPA), indiquait récemment devant le Sénat, que les équipementiers « étaient devenus les interfaces de l’ensemble du système automobile, dans la mesure où ils étaient à l’origine des deux tiers de la valeur ajoutée industrielle de la filière ».

Pour les constructeurs automobiles traditionnels, ce glissement de la valeur ajoutée vers les équipementiers a déjà imposé des ajustements.

Première étape pour retrouver des marges et de la rentabilité : les constructeurs investissent de plus en plus le créneau Premium, au détriment des offres sur les véhicules d‘entrées de gamme. Sauf que cela ne marche qu’à moitié : Tesla vient ainsi de détrôner Audi de la troisième place du podium des ventes de voitures mondiales, sachant que la production Tesla est 100 % électrique.

Seconde étape pour les constructeurs automobiles : devenir équipementiers eux-mêmes, ce que fait déjà Tesla via son partenariat avec le japonais Panasonic pour équiper ses voitures en batteries fabriquées dans ses « Gigafactories ». Stellantis s’est ainsi rapprochée de Samsung , et Renault d’Airbus .

L’effort est louable et doit être encouragé par tous les moyens publics à disposition, mais sera-t-il suffisant face à un adversaire que personne n’attendait si tôt et si puissant ?

La Chine mise tout sur l’électrique

Sur le marché chinois, le plus dynamique au monde pour la voiture électrique, cela commence à ressembler à une déroute pour les constructeurs automobiles occidentaux, qui, les uns après les autres , réduisent la voilure sur un marché face au rouleau-compresseur des entreprises chinoises, probablement aidées ou subventionnées sur place par l’État. Seul le constructeur allemand Volkswagen résiste encore à la tentation de plier bagages. Mais avec une part de marché dans l’électrique sur place réduite à 2 %, il n’est pas sûr que l’affaire soit rentable longtemps.

Considérant son accès aux matières premières , son quasi-monopole sur les batteries et la taille de son marché intérieur (en plus de facilités de subventions publiques aux entreprises dont ne peuvent se prévaloir les entreprises occidentales), la Chine est en train de réaliser un hold-up sur la mobilité électrique, probablement aidée par quelques mécanismes de dumping fiscal et social. Alors qu’elle pouvait difficilement rivaliser avec des décennies de R&D occidentales pour perfectionner et optimiser les moteurs thermiques, le moteur électrique ne pose aucune difficulté et la Chine n’a pas mis longtemps à développer des batteries performantes. D’ailleurs, le monde entier les lui achète .

Il y a encore un peu de temps avant de voir des voitures chinoises inonder le marché européen, mais si on soulève le capot, les voitures électriques occidentales sont déjà truffées de composants chinois, y compris ce qui coûte le plus cher sans rapporter grand-chose aux constructeurs occidentaux, la batterie. D’ailleurs, certains constructeurs ont commencé à délocaliser : la Dacia Spring est ainsi fabriquée en Chine. À l’heure où le gouvernement insiste sur les nécessités d’une réindustrialisation compatible avec nos engagements de transition énergétique et de mobilité durable, le cas de la voiture électrique risque bien de tourner au casse-tête, particulièrement dans un contexte de tensions sur le pouvoir d’achat des Français.

Sans avantage technologique significatif (voire avec du retard), avec une structure de coûts désavantageuse, et sans accès aux matières premières en quantité à prix abordable, la voiture électrique risque bien à terme de faire des constructeurs occidentaux de simples « designers-assembleurs » de véhicules dont l’essentiel de la valeur ajoutée est produit ailleurs et par d’autres, en Chine en premier lieu.

Voir en ligne : https://www.contrepoints.org/2023/0...