C’est en 1965 que la statue de la Vierge de Santa Cruz a été "rapatriée" à Nîmes, au Mas de Mingue. Pour ce cinquantenaire j’ai écrit un texte qui fait l’historique de la Sainte Patronne des Oraniens.
Jean-Paul Ruiz
En mil-huit cent quarante-neuf, fin de l’automne,
À Oran, le choléra fait d’atroces ravages,
Décime la population, chaque jour le glas sonne
Pour des défunts victimes d’un malheur d’un autre âge.
Les autorités impuissantes devant ce fléau,
Pétrifiées, ne savent plus à quel saint se vouer.
Le Général Pélissier pose ses yeux là-haut
Vers le fort de Santa Cruz et lance de plein fouet
À l’Abbé Suchet* : "Foutez-moi une vierge
Au sommet de cette montagne, faites une procession".
Alors une bonne partie de la population,
Le clergé en tête, avec icones et cierges,
Arpente en priant les sommets de la colline.
Sainte-Marie, très sensible à cette grande dévotion,
Demande aux Cieux de déverser une pluie divine
Sur cette malheureuse ville en pleine désolation.
Cette eau tant attendue va nettoyer la ville
Et éradiquer les miasmes de ce mal mortel
Qui aura été le plus dangereux des périls
Pour ceux qui viennent de vivre une période si cruelle.
Notre-Dame du Salut, notre chère Mère salvatrice
Devient Vierge de Santa Cruz depuis ce miracle.
Après l’exode, elle reste notre Mère protectrice,
Celle qui nous aide à franchir bon nombre d’obstacles.
Bertrand Lacaste, l’Évêque du diocèse d’Oranie,
Fut des nôtres, nous les factieux, rebelles forcenés.
Il nous savait victimes d’une infâme tyrannie.
Le pouvoir nous avait trahis puis condamnés.
Il devient l’Évêque du "diocèse de la dispersion"
Pour ses fidèles qui ont été disséminés
Un peu partout en France, sans commisération.
Ils sont déboussolés, brisés, déracinés.
Orphelins de leur Vierge, ils sont un peu amers.
La faire venir en France, bâtir un sanctuaire ...
De pieux Oraniens, opiniâtres et volontaires
Ont été exaucés de leur vœu le plus cher.
Grâce à leur dévouement, depuis près de cinquante ans,
Les Oraniens possèdent un lieu de pèlerinage.
C’est inutile de dire combien ils sont contents.
Tout comme là-bas à Oran, ils peuvent rendre hommage
À leur Sainte Patronne, au Mas de Mingue, à Nîmes.
Ce lieu de retrouvailles et de recueillement,
C’est grâce aux donateurs, bienfaiteurs anonymes,
Aux nombreux bénévoles, à leur acharnement,
Que la vitalité de ce lieu se perpétue.
Bien sûr, le point d’orgue c’est la fête de l’Ascension
Où tant de pieds-noirs, pour ce jour tant attendu,
Marquent leur dévotion et suivent la procession.
Ce pèlerinage est l’un des plus important
Qui existe en France et l’un des plus exaltant.
Venus de tous horizons, cette foule de pieds-noirs,
Avec une grande ferveur, célèbre cette fête chrétienne.
Jour de vénération et aussi de la mémoire
Pour nos morts restés là-bas en terre algérienne.
Journée de retrouvailles, combien ils sont heureux
De rencontrer des amis ou des connaissances,
Certains perdus de vue depuis l’exode douloureux.
Journée de l’amitié et de réjouissance.
Jean-Paul Ruiz le 21/03/2015
*Abbé Suchet, Vicaire général et aumônier militaire.
Avec mes plus vifs remerciements à tous ceux qui se sont investis sans compter pour que le vœu pieux des Oraniens, faire venir notre Vierge en France, bâtir un sanctuaire, se concrétise et se pérennise. Impossible de tous les nommer, mais je me dois de citer, d’abord à titre posthume, Monseigneur Bertrand Lacaste et le Chanoine Vincent Caparros, ensuite Antoine Candéla et Antoine Roca les précurseurs
de la création de l’Association Nationale des Amis de Notre-Dame de Santa Cruz dont le président actuel est Michel Pérez.
Je n’oublie pas Monsieur Denis qui a cédé généreusement le terrain sur lequel a été bâti le sanctuaire (acte de vente pour 1 franc symbolique).
J.P.R.