Par Jean Rochn.
La crise de la Covid-19 a montré le manque des moyens de production en Europe et en France. Consécutivement à ce constat, nos hommes politiques ont promis au peuple français que des entreprises allaient être relocalisées . Mais la promesse est loin de se réaliser.
Des freins historiques sont très présents dans l’esprit des industriels.
La spoliation des moyens de production par l’État
L’élection de François Mitterrand en 1980 a laissé dans les mémoires des entrepreneurs français des traces indélébiles. Comme en son temps Lénine , François Mitterrand nationalise les entreprises en 1982. Cette opération a vidé les caisses de l’État. Et comme en URSS, les sociétés nationalisées ont périclité, managées par des incompétents choisis pour leur proximité du pouvoir et non pour leurs compétences managériales. L’obligation de revente de ces entreprises suite à leur mauvaise gestion n’a pas permis de remplir les caisses de l’État car leurs valeurs s’étaient effondrées.
Cette spoliation a laissé des traces chez tous les entrepreneurs : ils savent que l’État français peut à tout moment spolier un entrepreneur en France.
La destruction du secteur industriel intermédiaire empêche les relocalisations
La seconde action de François Mitterrand est d’augmenter drastiquement les impôts sur les sociétés et sur la classe moyenne : c’est la clé de la réussite du socialisme dont le but avoué par Mitterrand lui-même est l’éradication des classes moyennes bourgeoises. En effet, avec l’augmentation des impôts sur les sociétés, de nombreuses petites entreprises vont licencier leurs employés ou se mettre en faillite. Avec l’augmentation des impôts sur les classes moyennes, beaucoup de ceux qui appartenaient à cette classe descendent vers les classes populaires.
Tout est ainsi fait pour que les entreprises s’effondrent car par manque de moyens, il leur est impossible d’investir et de rester compétitives.
Il ne leur reste qu’une solution pour survivre : délocaliser. De cette façon il n’y aura plus de spoliation et l’entreprise restera compétitive.
Ainsi en France ne restent plus que des entreprises de service nécessitant peu d’investissement à amortir. En cas de nationalisation, la spoliation sera faible et en cas d’augmentation des taxes, il sera peu coûteux de délocaliser l’activité.
L’assistanat vaut mieux que le travail
La troisième action de François Mitterrand a été de proposer l’assistanat aux travailleurs avec le RMI ancêtre du RSA et les 35 heures. Ainsi, un travailleur peu qualifié a le choix entre un SMIC et un RSA souvent complété par une activité complémentaire non déclarée et accompagnée d’autres avantages sociaux dont la liste ne cessera d’augmenter au fil des 40 dernières années.
De plus François Mitterrand décidera que seul le SMIC sera indexé sur l’inflation. Les autres salaires proches du SMIC vont par conséquent mécaniquement tendre vers le SMIC, car non indexés. Grâce à cette situation, les salaires tendent tous vers le SMIC : un salaire unique comme en URSS.
Pour des raisons électoralistes, le montant du SMIC n’est pas fixé en fonction du marché (comparaison à compétences égales et travail égal avec les salaires concurrents étrangers), mais de façon arbitraire. Comme le consommateur français, y compris le smicard, préfère acheter un jean fabriqué en Chine à 15 euros plutôt qu’un jean fabriqué en France à 45 euros, automatiquement, les entreprises délocalisent pour ne pas mettre la clé sous la porte. Et les travailleurs au SMIC finissent dans l’assistanat.
Cette main-d’œuvre peu qualifiée qui forme la majorité de nos chômeurs et de nos bénéficiaires de l’assistanat a un coût non compétitif et est ainsi inemployable.
L’État annonce aujourd’hui vouloir relocaliser le travail en France par des aides.
Pour cela, il annonce une aide publique aux relocalisations. Ainsi, en mars 2021, 268 millions d’aide publique sont alloués avec pour objectif la création de 3000 emplois directs qui vont conforter (ne pas créer) 7000 emplois déjà existants. Présenté de cette façon, Bruno Le Maire a de quoi être satisfait et faire la publicité de son efficacité gouvernementale.
Mais…
Si la délocalisation est gratuite, pourquoi la relocalisation ne l’est-elle pas ? Tout simplement parce que les entreprises ne veulent pas revenir sauf à être largement couvertes des trois freins précédemment présentés. Et encore, rien ne garantit que ces relocalisations et leurs emplois seront pérennes comme le montrent des fermetures d’usines qui ont grassement bénéficié de subventions avant de repartir en Europe de l’Est ou ailleurs.
Si nous faisons abstraction des personnes au RSA, il y a 6 millions de chômeurs en France toutes catégories confondues. Pour mettre cette population au travail via les relocalisations, l’état devrait ainsi sortir 536 milliards d’euros. Cette somme colossale montre bien l’inefficacité de la méthode qui n’est en réalité que poudre aux yeux.
Ainsi, cette méthode de relocalisation est entièrement vouée à l’échec.
Des méthodes pour diminuer assistanat et chômage et aider les relocalisations
Ces méthodes auraient beaucoup plus d’impact sur les relocalisations à condition que la classe politique dans son ensemble cesse d’être clientéliste.
Le premier constat basique qui vient à l’esprit est le suivant : sans assistanat, les 250 000 postes non pourvus à l’ANPE le seraient rapidement ; lorsqu’on n’a rien à manger, on n’hésite pas à se lever le matin pour faire un travail alimentaire, quitte à effectuer une formation au préalable.
Le SMIC étant trop élevé par rapport à des pays à faible taux de main-d’œuvre, plutôt que de subventionner des individus à rester chez eux avec un RSA, pourquoi ne pas, avec cette somme, subventionner les travaux à faible valeur ajoutée. En 2021, le montant du RSA s’élève à 565 euros et celui du SMIC à 1589 euros. Si le montant du RSA est versé à une entreprise qui emploie un travailleur à très faible valeur ajoutée et que pour ce travail, l’entreprise complète pour verser un SMIC, on permet à une personne peu employable de le devenir. Au lieu d’être assistée, elle devient ainsi productive et contribue à l’augmentation de la création de richesse du pays.
De plus, ayant désormais un SMIC, ses autres aides complémentaires disparaissent de facto. Ces aides complémentaires peuvent à leur tour être utilisées pour, à nouveau, financer des travaux ayant encore moins de valeur ajoutée.
Naturellement, on objectera que la personne ainsi employée aura un travail sans intérêt. Sans doute, mais travailler permet d’acquérir des compétences qui peuvent être valorisantes pour changer de travail et évoluer au lieu de rester chez soi.
Cette méthode est appliquée en Allemagne. Lorsque vous entrez dans la phase sociale après la période de chômage, l’assistance sociale ne vous propose pas d’argent, mais un poste à faible valeur ajoutée. En cas de refus du poste, aucune aide en argent ne sera proposée et aucun autre poste ne sera proposé.
Le taux de chômage en Allemagne est inférieur à 4 % et l’industrie ne s’est pas délocalisée.
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