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La subsidiarité pourrait redynamiser l’Union Européenne

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Cet article provient d'une source externe à NJ sans autorisation mais à titre d'information.

Par Joelle Brunet-Labbez.

« Ce n’est pas en fusionnant les souverainetés au bénéfice des technocrates en prétendant ignorer la réalité séculaire des nations que l’on construira l’Europe ».

Quelle actualité dans ce propos de Raymond Aron paru en 1952 dans Le Figaro ! Si selon lui, le volontarisme affiché par les pères fondateurs peut précéder la démarche européenne, il a peu de chances de susciter un sentiment d’appartenance à une identité particulière.

Identité européenne en panne

Une identité consiste dans la reconnaissance de ce que l’on se reconnaît pour soi-même et par les autres.

Depuis que les institutions européennes fonctionnent, le beau projet de Jean Monnet et Robert Schuman d’une identité européenne qui se construirait à travers des projets communs, pas à pas, s’est quelque peu affadi. Le contexte d’une Europe exsangue leur permettait d’y croire. Aron en doutait dès le début.

Or cette identité européenne est au cœur de la crise qui se développe en Europe depuis l’échec du référendum pour le Traité Constitutionnel de 2005, stigmatisant une Europe technocratique .

Peut-on bâtir un sentiment d’appartenance grâce à des subventions oudes règlementations tatillonnes jusqu’à la caricature dans le but d’uniformiser les modes de vie ou de consommer ?

Comment poser des normes qui protègent notre maison commune du monde alors que les forces les plus agressives peuvent y agir sans retenue ?

La question que nous posent les Eurosceptiques de différentes obédiences est celle du périmètre de la puissance commune, sa légitimité et comment l’exercer. Et d’ailleurs de quelle puissance parle-t-on ?

Les critiques reviennent sur l’impuissance de l’Europe à se défendre alors qu’à chaque étape visant à lui donner les moyens de se renforcer, elle sort affaiblie. Comment stopper cette mécanique mortifère qui ne sert que ceux qui veulent ruiner le projet européen ?

Quel acharnement à maintenir ce géant économique à l’état de nain politique !

Pourtant, nous disposons dans les principes même de l’Union Européenne des moyens de réorienter nos priorités en travaillant sur une construction européenne qui ne serait plus simplement économique.

La subsidiarité outil de la raison

En effet, le principe de subsidiarité qui demeure au cœur des traités successifs prend son origine dans la doctrine sociale de l’Église et constitue un outil pour répondre aux enjeux qui se posent à l’avènement d’une réelle puissance européenne politique… Il suppose la recherche du niveau hiérarchique le plus pertinent auquel doit être conçue une action publique, si elle est nécessaire.

Le but étant de ne pas déconnecter la prise de décision de ceux qui devront la respecter. Le principe de subsidiarité est clairement inscrit tant dans le droit que dans le discours européen dans l’article 5 du Traité de Lisbonne. Il procède par délégation vers un échelon le plus juste. Concrètement, lors d’une subsidiarité descendante, c’est l’échelon supérieur qui délègue. L’objectif est de réduire l’expansion du champ de l’action bureaucratique au sein de l’Union.

En réalité, les choix politiques des États-membres pèsent souvent lourd dans les arbitrages. L’application et le contrôle de la mise en œuvre de ce principe de subsidiarité descendante sont des questions légitimes, mais elles ralentissent les procédures dans certains pays dont la France qui a tendance à durcir les règlementations prises par l’UE.

Davantage de régalien dans les compétences de l’UE

En revanche, si le principe de subsidiarité a été largement utilisé dans son mode descendant au profit des États, la subsidiarité ascendante suppose un réalisme de leur part auquel peu de dirigeants sont prêts. Concrètement, dans le cas de subsidiarité ascendante, c’est à l’échelon inférieur de déléguer un pouvoir de décision supranational, comme on le fait en matière d’environnement, de protection des consommateurs ou de transports.

Cette supranationalité a tendance à rebuter les États-nations de l’UE, alors qu’elle fait moins question pour les États à tradition fédérale qui furent pourtant eux aussi des grandes puissances.

Si depuis le choc de Tchernobyl on a assez largement admis l’idée que les questions environnementales dépassent largement les frontières, c’est avec beaucoup plus de défiance que l’on envisage de déléguer des pouvoirs régaliens vers une entité supérieure.

Schengen en est un exemple majeur, où l’on voit bien que les egos et les traditions n’en finissent pas de freiner les décisions communes sur les conditions d’entrée, de séjour, d’asile, souvent fruits d’usage et de traditions.

La question de la nationalité pourrait aussi faire partie de ces champs à étudier pour harmonisation. Ainsi voit-on les migrants non francophones utiliser le droit du sol français pour entrer dans l’UE clandestinement par nos territoires ultramarins.

L’harmonisation fiscale produit elle aussi encore une lutte absurde et une perte d’énergie entre les États-membres qui deviennent compétiteurs pour l’attractivité de leur économie au sein de l’Union. Elle crée des conflits inutiles dans un espace d’où les ressources peuvent facilement s’expatrier.

Un contexte international hostile

Les tentations de repli sur soi et de sanctuarisation réapparaissent en situation de crise alors que notre géographie autant que notre histoire commandent la coopération et la mutualisation des moyens. Les différents élargissements nous ont donné une taille critique qui nous met au rang des États continents prétendant organiser un nouvel ordre mondial. C’est une chance, mais le risque réside dans notre retard à constituer les moyens de notre indépendance, et à nous penser comme une super puissance.

Si à ce jour l’OTAN demeure notre bras armé, les incertitudes qui planent sur l’inconditionnalité de l’assistance de notre grand allié qui a prévalu jusque-là nous poussent à nous redemander sur quoi repose un destin européen dont nous ne serions pas les maîtres.

La subsidiarité ascendante nous permet d’engager avec force une démarche stratégique de défense des intérêts spécifiquement européens dont chacun des États membres serait partie.

La chute du Mur de Berlin et la fin du communisme comme empire a ouvert la possibilité pour les États périphériques de choisir leur destin auprès de nous. S’engager vers le droit, la transparence des procédures les a conduit à des efforts dont la contrepartie est la solidarité de la défense, de la sécurité de l’espace commun, aérien, maritime et cyber. Comment considérer la sécurité des États baltes, scandinaves où encore de la Pologne comme non signifiante de la sécurité de l’Europe ?

La confiance dans la solidarité atlantique qui jusque-là ne s’était jamais démenti rencontre un doute qui n’est pas permis ni pour nos alliés, ni pour le reste du monde. Notre défense commune ne peut se satisfaire d’un hypothétique plan B.

Raymond Aron estime en 1949 que l’identité européenne viendra d’une défense commune et d’une indépendance politique :

L’Europe ne reprendra vraiment confiance en elle-même que le jour où elle sera de nouveau capable de se défendre. L’Europe a un avenir dans la mesure où elle est capable de reconquérir indépendance et autonomie politique.

Si la subsidiarité donne les moyens de progresser, seule la volonté politique des Européens et de leurs représentants peut l’autoriser, pour transformer l’Europe en une puissance majeure et lui donner l’âme que nous méritons pour elle dès l’été prochain.

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