La démission de « Super Mario » provoque une crise politique en Italie.
Jeudi 21 juillet, Mario Draghi, l’homme qui a accordé un répit à l’euro en 2012 avec son Whatever it takes, a remis sa lettre de démission au président de la République italienne, Sergio Mattarella. Cette démission intervient après des semaines, voire des mois, d’un bras de fer plus que musclé au sein de la coalition gouvernementale. Catapulté à la tête de l’Exécutif en février 2021, Draghi devait, officieusement bien sûr, tirer parti du chaos sanitaire et économique dans la Péninsule pour y dérouler toutes les thèses du Great Reset. A cette fin, l’ancien patron de la BCE, passé par Goldman Sachs comme d’autres passent par Rothschild & Co, était parvenu à regrouper presque toutes les formations politiques italiennes au sein d’une même coalition.
Mais l’unité nationale, de la gauche radicale à la Lega nationaliste, a volé en éclats en quelques semaines. Le Président du Conseil avait pourtant prévenu qu’il quitterait son poste en l’absence d’un large soutien. Cependant, le refus de Forza Italia (S Berlusconi) et des mouvements populistes de M Salvini et des Cinque Stelle de voter la confiance le 20 juillet au Sénat a fini de décapiter Draghi.
Sa démission laisse planer un grand flou sur l’avenir de la troisième puissance (mais deuxième pays le plus endetté derrière la Grèce) de la zone euro, laquelle est affaiblie par une menace grandissante de fragmentation économique, comme en attestent les tensions sur le spread (écart de taux entre les 10-ans italien et allemand que nous suivons de près dans notre mensuel sur abonnement Finance & Tic). Mattarella a dissout le Parlement mais le gouvernement actuel reste en place pour expédier les affaires courantes jusqu’aux nouvelles élections anticipées qui devraient se tenir le 25 septembre prochain. Avis de tempête !
Le chiffre de la semaine : la BCE augmente son taux directeur de 0,5 pt de %
Pour contrer l’accélération de l’inflation en zone euro (8,6% en glissement annuel), la BCE a relevé son principal taux directeur de 50 points de base. C’est un tournant monétaire qui met fin à la politique de taux négatifs depuis 2016. À compter du 27 juillet 2022, le taux des opérations principales de refinancement des banques commerciale passera donc à 0,50%. Avec grand retard, les banquiers centraux européens s’alignent donc sur la politique de la FED et frappent plus fort que prévu (le consensus tablait sur 25 points de base).
De façon assez risible et déconnectée, comme souvent, Christine Lagarde a tout de même réaffirmé son attachement à l’objectif de 2% d’inflation à moyen terme. Elle compte ainsi poursuivre le resserrement monétaire cet automne, les défis auxquels est confrontée la zone euro ne manquant pas : crise énergétique, guerre aux frontières de l’UE, difficultés politiques en Italie et, à plus ou moins brève échéance, risque d’éclatement… que la BCE espère conjurer à l’aide d’un nouvel instrument, le Transmission Protection Instrument (TPI) dont nous vous avons parlé la semaine dernière et qui est déjà rejeté par l’Allemagne, par la voix du patron de la Bundesbank.
Nos lecteurs y sont habitués : cette première remontée des taux coûtera à terme à la France environ 20 Mds € supplémentaires par an pour financer sa dette publique. Mais cela n’a pas l’air d’empêcher de dormir G Attal…
La déclaration de la semaine : Borne demande à ses ministres un « effort sans précédent en matière de sobriété énergétique ».
Elisabeth Borne annonce vouloir mettre en place des mesures visant à « réduire la consommation d’énergie et accélérer la sortie des énergies fossiles », en raison des « tensions internationales, ainsi que [de] l’indisponibilité d’une partie du parc nucléaire français ». Ah ! Qu’en termes galants ces choses-là sont dites ! Dans la cible : une baisse de la consommation d’énergie en France de 10% sur la période 2019-2024.
Une fois n’est cependant pas coutume : l’ensemble des administrations centrales, des opérateurs publics ainsi que des établissements recevant du public sont priés de n’utiliser la climatisation que lorsque la température intérieure dépasse 26°C (que faire à 25,9°C ?), de ne pas laisser les appareils électroniques en veille et d’éteindre systématiquement les lumières lorsqu’elles ne sont pas nécessaires. Un petit manuel pour faire usage des sanitaires dans le noir serait en cours d’élaboration…
Mais aux 63 milliardaires français qui émettent autant de CO2 que la moitié des Français, on ne demande aucun effort ! Pas sûr que couper le Wifi et mettre des pulls en alpaga cet hiver suffisent à enrayer le changement climatique
L’actif de la semaine : les produits de grande consommation
Ricard, Cristaline et Nutella : voici les trois produits les plus vendus en France, d’après le dernier classement réalisé par Nielsen, au 1er semestre 2022. Le top 10 est dominé, sans surprise, par les boissons. Malgré sa récente augmentation, Cristaline (127 M€ de chiffre d’affaires annuel) garde sa médaille d’argent, derrière le Ricard, qui tient le choc d’une concurrence accrue entre distributeurs. Le Coca-Cola fait son entrée (59 M€), de même que les bières Desperados (49,6 M€). Hors boissons, on retrouve donc le pot de Nutella d’1 kg mais aussi le fromage Caprice des Dieux (300g).
Globalement, la moitié des références du top 100 ont vu leur chiffre d’affaires reculer de 2,6 % au premier semestre 2022 par rapport à la même période en 2021. Dans l’univers des actions défensives (qui réagissent proportionnellement moins que les fluctuations de marché), la grande distribution occupe néanmoins toujours une place de choix, à côté des services aux collectivités, que, par principe, nous écartons de nos portefeuilles en raison de leur connivence trop grande avec la puissance publique.