Ils sont là tous les trois adossés à ce banc
Devenu le leur propre au bout de tous ces ans
Ils regardent les gens du village passer
Fuyant le soleil dans l’ombre du peuplier
Ils tiennent le pommeau de leur canne serré
Entre leurs doigts noueux de travaux ancestraux
Répétant aujourd’hui ce qu’ils ont dit tantôt
Qu’ils oublient aussitôt de l’avoir répété
Ils parlent de jardin, de la dernière guerre
Ils en parlent pour eux car ne s’écoutent guère
Les rides sont creusées et les joues affaissées
Mais dans l’œil quelquefois l’étincelle renaît
Les souvenirs ainsi se forgent d’avenir
Ils s’y ancrent sachant que c’est là leur empire
Comme dans leur vieux pull qu’ils ne quittent jamais
Ils retrouvent la promesse d’éternité
Le soleil disparaît, ils vont faire pareil
Ils rejoignent la chambre où ils se voient cloîtrés
Claudiquant mais contents de s’être rassurés
Jusqu’au jour où enfin s’éteindra le soleil (17/12/06)