Véronique Bouzou est professeur de français depuis une vingtaine d’années et enseigne dans un collège public de région parisienne. Elle vient de publier « Un monde sans profs », fiction dans laquelle elle décrit les problèmes qui minent le système scolaire français.
Véronique Bouzou insiste notamment sur la pénurie d’enseignants et les difficultés de recrutement, la profession suscitant de moins en moins de vocations. Une situation d’autant plus alarmante que de nombreux professeurs titulaires sont tentés de « quitter le navire » du fait d’un mal-être de plus en plus prégnant.
« L’Éducation nationale manque tellement de candidats qu’elle cherche des professeurs un peu partout. De plus en plus d’enseignants sont recrutés en quelques minutes via des annonces sur Leboncoin ou des “job datings”. Parfois, ce sont les parents d’élèves eux-mêmes ou les maires qui font la démarche de chercher des professeurs tellement il en manque. »
Recrutés dans l’urgence, ces professeurs contractuels ne bénéficient d’aucune formation : « Ils sont embauchés à la va-vite, leur niveau parfois déplorable contribue aussi à la baisse du niveau général de l’école. Il faut avoir des compétences disciplinaires solides et une maîtrise de la pédagogie pour enseigner devant une classe. »
Véronique Bouzou évoque aussi l’effondrement du niveau scolaire et la perte des savoirs fondamentaux : « En 4e et en 3e, plusieurs élèves ne maîtrisent pas les terminaisons verbales, la syntaxe. Certains ont très peu de vocabulaire et ne comprennent pas des mots simples. »
Elle regrette également la paresse et le manque de curiosité des élèves : « Beaucoup d’élèves ne veulent pas travailler. Tout ce qui n’est pas fait à l’école n’est pas fait à la maison. Certains parents ne suivent pas le travail de leurs enfants. »
« Quand nous étudions les grands auteurs, certains me disent : “Mais il est mort, m’dame ! À quoi ça sert ?” Quand vous essayez de leur apprendre du vocabulaire, ils pensent que vous venez du Moyen Âge et vous répondent : “C’est quoi ce mot ? Personne ne parle comme ça aujourd’hui, on est au XXIe siècle !” »
L’enseignante aborde aussi les problèmes de discipline et l’autorité bafouée des enseignants, fruits selon elle de « plusieurs années de laxisme » : « L’autorité des professeurs a tellement été remise en cause ces dernières années que nous payons les pots cassés. Certains professeurs n’arrivent pas à obtenir le calme et doivent passer leur temps à crier. »
Selon elle, l’omniprésence des écrans constitue également un facteur important dans l’effondrement du niveau : « Beaucoup d’élèves passent un temps fou sur les écrans à regarder des tonnes d’informations qui circulent très, très vite. C’est le zapping permanent. »
Si l’addiction aux écrans entraîne des problèmes de concentration et de mémorisation préjudiciables à l’apprentissage, Véronique Bouzou estime qu’elle engendre aussi un manque d’empathie qui participe à la banalisation de la violence à l’école : « Les élèves manquent de vocabulaire, de culture générale, de connaissances, ils ont des préjugés sur tout, ils ne sont pas capables de s’exprimer correctement et de développer un raisonnement. La communication passe par la violence, ils en viennent tout de suite aux mains et à la grossièreté. »
Bien que Véronique Bouzou admette être parfois en proie au découragement, elle ne se voit pas pour autant abandonner son poste : « Nous avons besoin d’un service public de qualité. Je sais que j’ai un rôle à jouer, nous sommes un rempart contre la barbarie et l’ignorance. C’est ce qui me porte tous les matins. »
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