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Irma ou l’heure de vérité !

, par  vanneste , popularité : 5%
Cet article provient d'une source externe à NJ sans autorisation mais à titre d'information.

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La France n’est pas à la hauteur ? La solidarité d’un grand pays à l’égard de ses ressortissants, victimes d’une catastrophe, se doit d’être exemplaire. Elle ne l’a pas été. Les informations et les images qui viennent de Saint Martin sont déroutantes. Nous savions qu’un cyclone d’une ampleur et d’une intensité rares allait frapper les îles de Saint-Barthélémy et de Saint Martin avec une violence extrême. L’ensemble des Antilles allait être touché sur sa façade nord-ouest avant que l’ouragan ne poursuive sa route dévastatrice vers la Floride. Ces phénomènes météorologiques sont récurrents et habituels en cette saison. Simplement, « Irma » était annoncée comme exceptionnelle. Il n’y a donc pas eu de surprise, mais l’on s’est contenté des recommandations d’usage et des théories des climatologues pour expliquer le rapport entre l’apparente montée en puissance de ces catastrophes météorologiques et la grande peur médiatique du réchauffement climatique. Sauf qu’ici, au lieu de disserter sur les angoisses théoriques à long terme, qui ne font d’ailleurs pas l’unanimité, il était plus pertinent de prendre toutes les mesures d’urgence pour parer ou au moins limiter le danger immédiat. Il fait certes mieux vivre à Saint-Martin qu’en Haïti. L’ancienne colonie devenue collectivité territoriale bénéficie d’avantages qu’envient les habitants de la première possession française à s’être rendue indépendante, au point qu’un certain nombre d’Haïtiens y ont émigré. Pour autant, il paraît aujourd’hui évident que l’Etat a été défaillant, et que le désordre qui règne après le passage ravageur du cataclysme a révélé un niveau d’insécurité et un état de la population qu’on ne soupçonnait guère auparavant.

La prévision des dégâts matériels et des risques humains n’a manifestement pas été suffisante. Elle n’a pas tenu compte de la situation réelle de l’île, vue de loin comme un paradis pour touristes aisés, ce qui est relativement vrai de Saint Barthélémy. La réalité, c’est que la population de Saint Martin a crû de manière extrêmement rapide et en accentuant des disparités considérables. En 20 ans, elle est passée de 25 000 habitants à 75000. La division du territoire entre les zones française et néerlandaise, sans véritable frontière est un élément d’attractivité non seulement économique, mais aussi démographique, puisqu’elle facilite les situations illégales. Le nombre des nationalités présentes dépasse la centaine. Il s’agit notamment de migrants antillais, haïtiens en particulier. Comme la Guyane ou Mayotte , Saint Martin, est une porte ouverte à l’immigration clandestine et une usine à fabriquer des français de papier. Le niveau de vie quasi-européen est un aimant pour les ressortissants des Caraïbes. La population du secteur français a donc rejoint et dépassé celle de la partie néerlandaise : de 8000 à 38000 pour la première, de 17000 à 30000 pour la seconde. Cette évolution explique en partie la mauvaise qualité de l’habitat et son exposition, qui dénotent de la part des autorités tant locales que nationales une légèreté coupable. Par ailleurs, Saint Martin connait un taux de chômage important, de l’ordre de 33%. Sa sociologie est donc comparable à celle des quartiers sensibles de la métropole, le soleil et le tourisme en plus. Compte tenu de ces données, et d’autres comme l’absence de ressource locale en eau potable en dehors de la désalinisation de l’eau de mer, des mesures préparatoires auraient dû être prises. La coupure de la production d’électricité était également prévisible, et ses effets désastreux, aussi. Il était certes trop tard pour renforcer les bâtiments, mais il fallait davantage regrouper la population, réunir les moyens d’assurer sa santé et son entretien physique. Cela n’a pas été fait. Enfin, il aurait fallu prévoir les problèmes d’insécurité, les pillages qui risquaient de se produire, et qui ont effectivement dévalisé les pharmacies. Certains résidents disent vivre dans la peur en raison de bandes armées qui circulent en quête de rapines. Là encore, les effectifs de sécurité, qu’on renforce tardivement, ont été mal évalués.

La réaction gouvernementale qui consiste à montrer des images et à nous abreuver de discours sur la livraison du matériel et l’envoi de renforts, pour rétablir l’ordre et la sécurité des habitants, cache mal son caractère tardif. Le gouvernement qui a dépêché son ministre a pensé comme d’habitude à communiquer plus qu’à agir. Comme les carabiniers, il donne l’impression d’arriver après la bataille, sans avoir anticipé. Que M. Macron préside une réunion de crise en même temps que son Premier Ministre n’a aucune utilité. Un seul aurait suffi pour prendre les décisions, mais il fallait montrer que le Président, à Athènes au plus fort de la tempête, ne faisait pas qu’injurier les Français, mais s’intéressait aussi à eux lorsqu’ils étaient dans le malheur. Il se rendra sans doute sur les lieux. Le souverain hollandais y est déjà, bien que la situation dans la partie de l’île qui dépend des Pays-Bas soit moins grave, notamment pour la sécurité, les effectifs nécessaires ayant été sur place à temps. Il est plus facile d’aller à la rencontre de la population sinistrée lorsqu’on a le sentiment d’avoir répondu à l’attente de celle-ci. La comparaison n’est, hélas, pas à l’avantage de la France. On observera que les Etats-Unis, les gouverneurs dont les Etats sont touchés ou menacés, et le Président Trump lui-même, ont fait preuve d’un plus grand sérieux et d’une anticipation très prudente, qui découlent de l’expérience calamiteuse de Katrina en 2005.

Sous les rafales qui ont emporté des constructions trop légères, deux décors se sont aussi effondrés : celui de l’efficacité de l’Etat, et celui d’un paradis touristique qui cachait une réalité bien française, celle d’un pays en voie de dislocation en raison d’une immigration massive. La cohésion sociale, ce que Durkheim appelait la « solidarité mécanique » entre des gens qui sont semblables, laisse place à une coexistence de gens qui, en grande partie, sont les uns avec les autres par intérêt. Lorsque les conditions sont réunies pour que cet intérêt prenne libre cours et quand des individus ne sont pas des citoyens animés par le sens du bien commun, alors la sauvagerie est de retour. Le gouvernement que nous subissons n’a aucune idée de la dimension de ce problème, pas plus qu’il n’en a eue de l’ampleur d’Irma.

Voir en ligne : http://www.christianvanneste.fr/201...