Par Jonathan Frickert.
C’est une bien étrange piste cyclable que nous prépare la maire de Paris et probable future candidate à l’élection présidentielle Anne Hidalgo .
Affublée de son habile mais très commercial intitulé, la « coronapiste », située avenue de la République, qui relie la place éponyme au cimetière du Père-Lachaise, devrait voir ses travaux débuter d’ici quelques mois .
Si elle n’étonne guère par son esthétique, la coronapiste impressionne par sa justification. Adjoint en charge des transports à la mairie de Paris, David Belliard a ainsi estimé que cette construction répondait à un impératif sanitaire : permettre aux de se mouvoir dans la capitale et ainsi d’éviter aux Parisiens la contrainte des transports en commun en pleine pandémie.
En somme, cette coronapiste n’est rien d’autre qu’une piste cyclable temporaire, comme les 48 kilomètres déjà en place dans la capitale.
Quoique, la municipalité est si fière de sa nouvelle création que la coronapiste devrait être pérennisée à la rentrée et que plusieurs autres sont à l’étude.
L’association de la créativité de la mairie de Paris et de la crise sanitaire montre particulièrement bien en quoi cette dernière est devenue le joker privilégié de certains politiques pour justifier tout, mais surtout n’importe quoi.
Covid-19 : un an d’absurdité
En matière d’absurdité fondée sur la crise sanitaire liée à la Covid-19 , l’année écoulée fut faste. Outre l’arbitraire distinction entre commerces essentiels et non essentiels, qui ne fait que rappeler la funeste époque des tickets de rationnement, c’est bien la fermeture des bars et des restaurants qui interroge et fait peser sur le pays une atmosphère qui rappelle la prohibition pratiquée aux États-Unis durant les années 1920 et ce d’autant plus dans une actualité marquée par la polémique sur les restaurants clandestins .
La fin de la convivialité
Mais la dernière interdiction Covid-19 farfelue en date n’est autre que l’interdiction de la consommation d’alcool sur la voie publique , dernière tentative selon Jean Castex le 1er avril dernier « prévenir tout rassemblement et tenter de limiter la circulation de l’épidémie de coronavirus. »
Qu’il s’agisse de la plage montpelliéraine ou du canal Saint-Martin , les espaces hier propices à la détente sont désormais interdits aux personnes consommant de l’alcool.
La mesure ne fait aucune distinction entre les alcools faibles ou forts. Une simple bière sera sanctionnée de la même manière qu’une bouteille de whisky.
Plus problématique encore : aucune distinction n’est opérée entre les alcools achetés en grande surface ou dans des restaurants déjà grandement touchés par les restrictions de la crise Covid-19. Les restaurateurs ne sont pas au bout de leur surprise, puisqu’en plus d’avoir dû fermer leurs salles il y a 6 mois, ils ont désormais l’interdiction de vendre de l’alcool. Interrogé par Le Figaro , Franck Trouet, délégué général du Groupe national des Indépendants hôtellerie et restauration pour l’Île-de-France dénonce une distorsion de concurrence, un restaurant ne pouvant pas vendre de bouteille d’alcool fermée, à l’inverse de l’épicerie du coin.
À ces interdictions s’en ajoute une troisième : la possibilité pour les préfets d’interdire l’accès à tout lieu public afin d’éviter les rassemblements, y compris les rassemblements en extérieurs, pourtant très peu vecteurs de contamination …
Des mesures qui interrogent légitimement sur leur opportunité dans la lutte contre la pandémie.
Covid-19 : des mesures injustifiées
Pour répondre, l’étude Comcor menée par l’institut Pasteur et publiée début mars donne plusieurs pistes.
Selon l’étude, 45 % des plus de 77 000 sondés savent où et par qui ils ont été contaminés. L’énoncé des ces lieux n’a rien d’étonnant : il s’agit de lieux fermés, très peu aérés et où les gestes barrières ne sont pas respectés.
L’étude montre que dès lors que les gestes barrières sont respectés, les lieux publics ne sont pas des lieux de contamination. Exit donc la fermeture des commerces – essentiels ou non – et des lieux de cultes, fermés durant les deux premiers confinements, dès lors que les gestes barrières sont correctement respectés.
L’institut Pasteur rappelle toutefois que les enfants scolarisés, les bars et les restaurants constituent des lieux exposant à des risques de surcontamination, du fait qu’ils sont des lieux fermés.
Compte tenu du retour des beaux jours, on voit mal pourquoi la réouverture des terrasses est aussi peu envisagée, celle-ci pouvant permettre de donner un peu d’oxygène au secteur de la restauration. L’expérience de l’été 2020 et la pression que ces mesures font peser sur le secteur seraient de sérieux arguments en faveur d’une réouverture plus rapide que ce que prévoit aujourd’hui le gouvernement.
Ainsi, et si les auteurs alertent sur le fait que ces résultats pourraient être remis en cause par les variants, il est difficile dans ces conditions de ne pas conclure que bon nombre de mesures mises en place sont purement esthétiques.
La crise de la Covid-19 comme moyen
Historiquement, les crises ont toujours été un moyen de justifier l’accroissement du poids de la sphère publique . Qu’elles soient militaires, économiques ou sanitaires, ces moments ont un effet de cliquet sur le poids de l’État. La pandémie justifierait toutes les restrictions, y compris les plus absurdes, comme hier le risque terroriste justifiait la surveillance de masse, avant-hier la crise de 1929 justifiait l’État-providence moderne et, le jour d’avant, la Guerre de Cent ans justifiait la levée de l’impôt.
À cet accroissement du poids de la sphère publique tristement connue s’ajoute donc aujourd’hui des politiques de plus en plus absurdes justifiées par une pandémie de moins en moins anxiogène pour les Français.
Reste ainsi à espérer que la mairie de Paris ne tentera pas d’imiter Londres en érigeant à son tour une statue de Sainte Greta en nous expliquant qu’elle repousse la Covid comme le fer à cheval repousse le mauvais sort…
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