On reste prisonnier toujours de quelque chose,
D’un rêve, d’une idée, du parfum d’une rose,
On porte en bandoulière encore un souvenir,
On s’en repaît parfois et sans s’en prémunir.
C’est aussi un visage tout juste entrevu,
Comme une apparition, un éclair imprévu
Qui nous a fait trembler et laissé des regrets
D’en avoir été trop subitement distraits.
La nuit s’encombre de tous ces tristes naufrages
Et des ressentiments de mauvais déchiffrages :
Il aurait bien fallu et l’on aurait bien dû
Profiter du "kairos", tout aussitôt perdu.
L’inconscient se réveille parfois dans la nuit,
Il est l’empreinte ineffable de notre ennui :
On n’a pas osé, on n’a pas pris cette route,
Et nous condamne alors notre propre déroute.
Le "carpe diem" de nos braves épicuriens,
Laissé pour compte a fait de nous des galériens :
Et l’on rame toujours vers quelque paradis
Qu’on a mis de côté, hélas trop étourdis. (3/04/16)