« Bloc-notes : "Printemps" macronien, hiver de la pensée »
Le macronisme disait "penser printemps" ; il allait rompre avec le "monde ancien" : la bonne blague. Le feuilleton estival de la piteuse affaire Benalla, du nom de ce garde du corps surprotégé par le chef de l’Etat, n’a certes pas l’envergure des grandes affaires d’Etat. Mais ce pauvre scandale a mis au jour la perpétuation du fait du prince, la morgue des arrivistes, les passe-droits de la cour. Jamais le népotisme et ses injustices ne se sont si bien portés que sous le règne "exemplaire" d’Emmanuel Macron. Il avait su tirer profit des maladresses de François Fillon, en se présentant comme le porte-voix des dégoûtés de la politique et de ses pratiques. Plus d’un an après, il suffit d’observer la morosité qui paralyse les partis, y compris au sein de La République en Marche, pour mesurer la gravité de la crise démocratique. Le président n’a voulu voir dans le cas Benalla qu’une "tempête dans un verre d’eau". L’affaire a plutôt été la goutte qui a fait déborder le vase. Un nouveau monde, respectueux des Oubliés, reste à inventer.
L’euphorie nationale née de la victoire française au Mondial de football, le 15 juillet, n’aura duré que trois jours dans les médias : le temps de laisser place à la polémique sur les dérives de l’exécutif, marqué par le narcissisme aigu d’un président immature. "Qu’ils viennent me chercher !", a dit le chef de l‘Etat le 24 juillet, entouré des siens dans un enclos, à l’adresse des journalistes et des parlementaires qui lui demandaient des comptes. Le chercher ? Chiche ! Son impunité institutionnelle ne l’exonère pas des critiques sur son goût pour l’autoritarisme et son mépris des contre-pouvoirs. Les révélations de la presse, complétées par un remarquable travail d’enquête sénatoriale, ont été les premières résistances à une "macrocrature" réduite au clan, aux technocrates, aux experts agréés. Le report de la réforme constitutionnelle, prévue pour consolider la présidentialisation du pouvoir, est la première conséquence de l’affaire Benalla. Les dormeurs se sont réveillés. Souvent, les révolutions commencent ainsi.
L’heure est venue pour la société civile de sonner la diane, face à un Etat qui se rengorge de son "progressisme" pour masquer ses faiblesses et diaboliser ses opposants.