Par Jo Moreau.
L’avalanche d’articles, de photos et d’avis de personnalités de tous horizons sur les incendies qui ravagent l’Amazonie constitue une illustration parfaite du sale boulot de manipulation de l’opinion publique exercée par les médias, et porteur de l’amalgame trompeur diffusé jour après jour entre protection de l’environnement et réchauffement climatique.
La première chose qui a attiré mon attention est le rapport fait entre le nombre d’incendies constatés en 2019, avec la situation en… 2018. Il est à peine croyable qu’une comparaison aussi peu significative sur le plan statistique et trompeuse sur le plan historique ait été diffusée sans aucune réserve par tous les médias mondiaux, mais serve de surcroît les intérêts d’hommes et de femmes politiques, à commencer par le leader auto-proclamé de l’Union Européenne et porte-drapeau mondial de l’écologisme, j’ai nommé le président Macron.
Illustré par une photo « détournée », son récent tweet sur le sujet résume parfaitement l’amalgame entretenu par les sauveurs de la planète sur base de fake news :
« Notre maison brûle. Littéralement. L’Amazonie, le poumon de notre planète qui produit 20 % de notre oxygène, est en feu. C’est une crise internationale. Membres du G7, rendez-vous dans deux jours pour parler de cette urgence. »
Alors, soit le président Macron est mal informé, soit il suit aveuglément les avis très orientés d’ONG n’ayant aucune légitimité scientifique ou démocratique. Le problème est que la majorité de ceux qui nous gouvernent a une démarche identique.
Mais reprenons les choses dans l’ordre.
Fake news
Je place sous ce titre l’emploi par les médias ou sur les réseaux sociaux de photos parfois anciennes, non pas « fausses », mais tout à fait étrangères avec la situation actuelle en Amazonie .
Il s’agit d’une tactique souvent employée, destinée à émouvoir le public et l’orienter dans le sens voulu. Le choix des photos qui illustrent un article a une grande importance. Ainsi, les photos de dirigeants politiquement incorrects montrent souvent des visages grimaçants ou dans des poses peu avantageuses, tandis que les dirigeants idéologiquement corrects (aux yeux des médias) nous sont montrés souriants et sympathiques.
Mais l’emploi massif de ces photos « détournées » était tellement flagrant qu’après les avoir abondamment publiées, l’ensemble de la presse émit dans un deuxième temps des réserves prudentes quant à leur origine , ce qui lui permit accessoirement de se draper dans une démonstration émouvante d’objectivité.
Désinformation
Mais qu’en est-il de la situation réelle de ces feux de forêt en Amazonie, remise dans un contexte global ? Je reprends ici quelques passages d’une interview, parue dans l’OBS , de Martine Droulers, géographe, chercheuse émérite au CNRS, responsable de l’équipe « Brésil » au Centre de recherche et de documentation sur l’Amérique Latine (CREDAL).
« Il y a vingt ans, on observait beaucoup plus de feux qu’aujourd’hui. Vingt mille kilomètres carrés brûlaient en moyenne chaque année. […]
La tendance était toutefois à la baisse depuis dix ans, avant que le nombre de feux n’augmente de nouveau depuis deux ans. Les incendies qui ravagent l’Amazonie aujourd’hui constituent une alerte qui appelle à la vigilance, mais il est important de rappeler que ces feux sont tout sauf nouveaux et que beaucoup d’entre eux sont des opérations de nettoyage de zones déjà déboisées. […]
Lula (président du Brésil de 2003 à 2010, NDLR) avait mis en place au début de son mandat une politique « environnementaliste ». […] Il l’a cependant beaucoup nuancée pendant la deuxième moitié de son mandat. La crise économique de 2008 a encore accentué le retour à une politique développementaliste d’exploitation à court terme des ressources de l’Amazonie.
Quant à Dilma Rousseff (présidente de 2011 à 2016, considérée comme l’héritière de Lula, NDLR), c’est elle qui, en tant que ministre des Mines et de l’Énergie, a relancé la construction d’usines hydroélectriques en Amazonie.[…]
Environ 50 % de la forêt est désormais sous un statut de protection nationale. Cette surface est partagée entre réserves indiennes et écologiques. Donc la moitié de l’Amazonie ne sera pas, ou très peu, sujette à la déforestation. Certains s’y risquent, mais les amendes sont sévères. »
Voilà qui nous éloigne de l’affolement actuel sur une situation qui, si elle n’est pas idéale, n’est pas non plus la catastrophe irrémédiable clamée partout.
Manipulation
Revenons sur l’affirmation — reprise par Macron — selon laquelle l’Amazonie est le poumon de notre planète, qui produit 20 % de notre oxygène.
Ici encore, je me réfère à une interview de Alain PAVE, professeur émérite à l’université Claude Bernard Lyon 1 , ex directeur du programme Amazonie du CNRS, parue dans le Huffington Post.
La forêt amazonienne produit-elle 20 % d’oxygène ?
« C’est très, très optimiste », s’amuse le chercheur qui se demande où le président (Macron) a bien pu trouver ce chiffre sans fondement scientifique. « Quelques pour cent, peut-être, estime le scientifique, mais on est loin des 20 %. »
Peut-on utiliser l’expression « poumon de la planète » ?
« Aïe aïe aïe… », réagit le scientifique devant cette formule qui fait actuellement la Une des médias. « J’étais à un sommet de l’ONU sur le climat en 1992, et déjà les scientifiques s’agaçaient de cette expression », précise-t-il.
Alors non, c’est un symbole mais ce n’est pas une image scientifiquement exacte. Au mieux, c’est un alvéole pulmonaire parmi d’autres. Les autres forêts déjà. Si la forêt amazonienne est immense, elle ne représente que 10 % des forêts mondiales également émettrice d’oxygène avec les limites citées plus haut dans cet article. « Et surtout, le producteur numéro 1 d’oxygène, c’est l’océan », souligne le professeur. Il fournit à lui seule la majorité de « l’oxygène que nous respirons » pour reprendre l’expression de Macron. « Le poumon de la planète, c’est lui. »
Voilà quelques mises au point à propos d’une pseudo-crise montée de toutes pièces dans le cadre plus général de l’idéologie climato-politique dominante, et déjà relayée par le mouvement de Greta Thunberg.
Et pour bien enfoncer le clou, on nous informe des projets apocalyptiques de l’infâme Bolsonaro en Amazonie : y construire une centrale hydraulique, une autoroute et un pont. À n’en pas douter : une catastrophe pour la planète !
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