Par Philbert Carbon.
Un article de l’Iref-Europe
La crise du coronavirus n’a fait qu’accentuer les travers de la France, et singulièrement sa propension à dépenser à tout-va. On ne compte plus les milliards injectés dans l’économie par le gouvernement.
Mardi 7 juillet, le tout nouveau Premier ministre s’est invité au « Ségur de la santé » et a annoncé ajouter 1 milliard d’euros supplémentaire (soit 7,5 milliards au total) pour revaloriser les salaires de la fonction publique hospitalière.
Des centaines de milliards d’euros d’aides
S’agissant des aides aux entreprises, le ministère de l’Économie et des Finances, chargé également de la relance, depuis la nomination de Jean Castex à Matignon, tient un tableau de bord en libre accès, mis à jour quotidiennement, qui fait le point sur les trois grandes mesures mises en place par Bercy, à savoir le fonds de solidarité, le prêt garanti et le report des échéances fiscales.
S’agissant du fonds de solidarité, qui verse jusqu’à 1500 euros par TPE et PME, et peut même monter jusqu’à 5000 euros supplémentaires dans certains cas, 1,6 million d’entreprises en ont bénéficié au 10 juillet 2020 pour un total de près de 5 milliards d’euros d’aides.
Pour le prêt garanti par l’État, les sommes sont bien plus importantes – mais il s’agit d’un prêt, les sommes devraient en toute logique être remboursées – puisqu’elles atteignent 108 milliards d’euros au 10 juillet pour 535 000 prêts.
Enfin, le report des échéances fiscales se monte à 2,6 milliards d’euros. Mais là encore, ces sommes devraient finir par être recouvrées par l’administration.
Ces aides ne sont pas les seules, le ministère des Finances ayant des dispositifs ad hoc pour certains secteurs d’activité comme le tourisme, l’hôtellerie et la restauration. S’ajoutent à cela les aides provenant des autres ministères, comme celui du travail avec le chômage partiel. L’Agirc-Arrco, l’Agefiph, l’Assurance maladie, l’ANCT distribuent également des aides. L’Urssaf, de son côté, a reporté le paiement de certaines cotisations sociales.
Bref, les milliards pleuvent par centaines sur les entreprises françaises. Comme l’a écrit Jean-Philippe Delsol dans ces colonnes , ces mesures sont nécessaires pour faire face aux circonstances exceptionnelles que connaît l’économie française, et éviter les dépôts de bilan en cascade.
Des défaillances d’entreprises en baisse
Mais il n’est pas interdit de s’interroger, comme le fait Jean-Philippe Delsol dans le même article, sur les multiples effets pervers de cette manne publique.
Un de ces effets délétères est la mise sous perfusion d’entreprises qui auraient dû mettre la clé sous la porte et ont peut-être profité des aides publiques pour se maintenir artificiellement en vie.
Car on ne peut qu’être perplexe devant les chiffres publiés par le cabinet Altares qui révèlent que le nombre de défaillances d’entreprises n’a jamais été aussi bas depuis 30 ans. Alors que nous traversons une crise majeure, il y a de quoi être étonné.
C’est ainsi environ 10 000 défaillances d’entreprises qui ont été artificiellement évitées au premier semestre de l’année. Pour Altares, cela s’explique en grande partie par l’activité réduite des tribunaux pendant le confinement et surtout par l’ordonnance prise par le gouvernement qui permet de considérer que toute entreprise qui n’était pas en cessation de paiement au 12 mars 2020 serait considérée ne pas l’être jusqu’au 23 août.
Par conséquent, à la fin du mois du mois, les faillites vont se multiplier. Altares en attend au minimum 60 000 entre juin 2020 et juin 2021.
On peut se demander si ces 10 000 entreprises qui n’ont pas été en redressement judiciaire ou en liquidation au premier semestre n’ont pas bénéficié de quelques-unes des aides mises en place par l’État. Dans ce cas, c’est de l’argent purement et simplement jeté par les fenêtres. Il n’aura servi qu’à repousser l’échéance d’une faillite qui aurait fini par arriver sans la crise.
« Une lance à incendie dans le désert »
Car, bien évidemment, l’argent dépensé sans compter attire aussi les fraudeurs et profiteurs de tout acabit.
Le ministère du Travail a publié fin juin les premiers résultats des contrôles sur les demandes de chômage partiel. Les 3000 contrôles effectués ont débouché sur 850 suspicions de fraude, soit plus de 28 %. Le travail de contrôle est loin d’être terminé car, au 7 juillet, il y avait plus d’un million d’entreprises concernées par le dispositif et 14 millions de salariés !
Même les syndicats s’inquiètent de cette situation. François Hommeril, président de la CFE-CGC, s’est demandé il y a quelques jours au micro de BFM Business , si on n’est pas en train d’utiliser une lance à incendie pour arroser le désert en espérant y voir pousser une petite fleur.
Pour le représentant des cadres, il faut certes aider les entreprises, mais discernement. Il demande davantage de « sophistication pour pouvoir atteindre ceux qui en ont vraiment besoin ». Pour lui, « il y a trop d’effets d’aubaine ». Et de rappeler qu’il s’agit d’argent public et que cela « coûte cher à la collectivité ».
On ne saurait mieux dire !
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