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Trop d’hôpitaux, trop d’étudiants, mais pas assez de médecins

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Cet article provient d'une source externe à NJ sans autorisation mais à titre d'information.
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Par Bernard Kron.

Il n’y a jamais eu autant de médecins en exercice (plus de 200 000), ni autant d’étudiants en médecine (plus de 50 000 en première année), mais l’on parle de pénurie.

La féminisation (70 % des étudiants), les départs massifs à la retraite et la diminution du temps d’activité des soignants en sont la cause. Mais la durée des études médicales a été prolongée.

L’ECN reçoit chaque année plus de 8000 médecins, mais la pénurie est inscrite dans le marbre, car 70 % des étudiants sont des femmes et seulement 9 % veulent s’installer en libéral.

L’Europe a uniformisé le LMD. Les Allemands et les Belges raccourcissent d’un an les études médicales, mais la France va les prolonger. On parle en effet de prolonger d’un an l’internat de médecine générale, c’est un deuxième paradoxe, car 10 à 11 ans d’études, c’était déjà trop.

On a supprimé le concours de l’externat en mai 1968, au prétexte de mieux former l’ensemble des médecins. Le concours de l’internat a en suite été supprimé par Bernard Kouchner, ministre de la Santé en 2002. Il est piquant de savoir qu’il n’avait pas réussi ce concours. On assiste en conséquence à un retard de compétence, un interne de première année en sait moins qu’un externe de l’ancien régime. On lui confiait la petite chirurgie pratiquée sous anesthésie locale et parfois sa première appendicectomie.

On pensait qu’un des problèmes de la médecine générale était le sentiment de sous spécialiste induit par la sélection. Ce fut une erreur, mais on ne peut plus revenir en arrière, car les idées égalitaristes de mai 68 sont toujours vivantes.

Les généralistes doivent maintenant faire un internat de 4 ans et sont menacés de nouvelles contraintes, ajoutant l’absence de reconnaissance après la frustration.

Raccourcir le cursus de médecine générale permettrait de régler en deux ans la pénurie de médecins généralistes en formant trois à 4000 médecins de plus chaque année. Des stages de six mois en petite chirurgie, en obstétrique et en médecine interne permettraient un meilleur suivi des maladies chroniques (diabète, hypertension) et de les former en deux ans pour devenir médecin de famille.

Fermer des facultés de médecine serait possible si l’on diminuait le nombre d’étudiants en première année tout en raccourcissant le cursus de médecine générale. Les économies dégagées permettraient de mieux former nos médecins. L’entrée en faculté est actuellement libre, ce qui ne le permet pas.

Les maisons de santé, autrefois appelées dispensaires, sont aujourd’hui plus de 200. Leur mise en place repose sur des investissements importants. Compte tenu de leurs objectifs particuliers de santé publique (permanence des soins, personnel administratif de support, professions médico-sociales), leur coût de fonctionnement est supérieur à celui des cabinets de médecine générale traditionnelle. Elles nécessiteront pour les développer une participation financière des régions concernées.

L’hôpital compte 100 000 médecins. Les internes sont au nombre de 18 000. Beaucoup vont choisir une spécialité exclusive ou une carrière hospitalière. Le recrutement international de 30 000 médecins a permis d’éviter la fermeture de nombreux hôpitaux, mais leur qualité est irrégulière, car nombre d’entre eux ne sont pas issus de notre cursus.

L’hôpital représente près 45 % des dépenses de santé alors qu’il ne réalise que 25 % des actes thérapeutiques (rapport de l’IGAS). Le plan Hôpital 2007/2012 a permis de continuer de moderniser certains hôpitaux, mais a laissé se développer des projets pharaoniques au détriment de l’ambulatoire.

L’hôpital reste trop coûteux.

Le coût des actes chirurgicaux pratiqués en clinique privée est inférieur. Ainsi une appendicectomie ou un accouchement pratiqués à l’hôpital coûtent en moyenne 1500 euros de plus qu’en clinique privée. La prise en charge des accouchements par l’hôpital coûte chaque année 500 millions d’euros de plus qu’auparavant (Cour des comptes).

Il va falloir reconvertir ou fermer 45 000 lits et 40 % des surfaces. Cela n’a pas empêché la construction du monstrueux hôpital sud-francilien de Corbeil-Essonnes-Evry. Plus de 1000 lits dont les deux tiers sont inoccupés faute de personnel soignant. Il a nécessité plus de 400 000 m3 de terrassements.

Les ARS peuvent contrôler les emprunts souscrits par les hôpitaux publics, mais c’est trop tard. Le déficit cumulé avoisine les 30 milliards d’euros .

« La dette hospitalière représente 40 % du budget annuel », déclarait un directeur. Certains prêts sont toxiques, car indexés sur des monnaies et cela menace leur pérennité

Moins de médecins, mais des médecins mieux formés

Une étude récente démontre que 28 % des actes médicaux seraient peu ou pas utiles. Ce n’est qu’un sondage, mais il interpelle. La formation des médecins généralistes et des chirurgiens devrait être au centre de la réforme. La baisse des vocations pour la chirurgie est préoccupante. Elle est constante depuis 30 ans, avec la dévalorisation de l’image et des revenus.

Au nombre de 22 000, dont 10 000 dans le privé, les chirurgiens généralistes en libéral sont en voie de disparition. Ils ne sont que 5890 en chirurgie générale (3300 en viscérale, 2543 en orthopédie). Leur effectif a baissé de 20 % en 5 ans. Le nombre en formation est un des plus bas d’Europe. La pénurie n’avait pas été anticipée jusqu’en 2005.

Les écoles de chirurgie doivent se développer.

Elles ont vu le jour il y a plus de 25 ans, grâce à l’initiative de leurs promoteurs, dans quelques villes de facultés pour perfectionner et enseigner les nouvelles technologies. La viscérosynthèse et la cœliochirurgie se sont développées par le privé. La chirurgie NOTES (Natural orifice translumenal endoscopic surgery) est encore expérimentale et réservée à des experts.

La télé-chirurgie a trouvé de larges applications en stomatologie, en cœlioscopie, viscérale, urologique, gynécologique et en cardiothoracique. La télé-microchirurgie est apparue dès 1998, avec la première anastomose coronaire.

Utiliser un robot chirurgical potentialise certes les capacités sensorielles et la gestuelle, mais son coût limitera longtemps son usage. Peut-on croire que le robot remplacera un jour l’Homme ? En cas de panne, comment former le chirurgien à se convertir s’il n’est pas suffisamment formé à la chirurgie ouverte ?

Ces technologies développent une chirurgie hyper spécialisée qui nécessite de mobiliser dix chirurgiens pour assurer les gardes. C’est une menace pour l’avenir de notre chirurgie qui était considérée comme une des meilleures au monde.

Ainsi notre système de soins trop réglementé ne répond plus à ses objectifs : accès à des soins de qualité pour tous, suivi des maladies chroniques, prévention, équilibre des comptes.

Ni la droite, ni la gauche n’ont pris la dimension de ces problèmes en ne réformant pas notre modèle social1.

Les médecins généralistes ont été abusés quand on leur a fait miroiter le titre de spécialiste et promis le clinicat. Tout cela pour plus de 10 ans d’études et une consultation augmentée de un euro (23 au lieu de 22) puis de deux euros (de 23 à 25)2

Avec cette pleine puissance, en huit mois un ministre de génie eût changé la face de la France, de l’Hôpital peut-être. Seulement voilà, il a laissé passé sa chance.

Décidément avec nos ministres de la Santé on n’a pas eu de chance. Que fera la nouvelle ministre ?3 Elle aura du pain sur la planche. Le modèle social français est le pur produit du Conseil National de la Résistance. C’était un compromis entre les idées gaullistes et communistes. Il n’est plus adapté aux temps modernes et à la crise. Il surtaxe le travail et bride la compétitivité de nos entreprises et de nos étudiants. ↩ En compensation on leur a donné le P4P, qui pourrait leur apporter un complément en moyenne de 4 à 5000 euros chaque année s’ils se montrent vertueux ↩ Article écrit en 2012. ↩

Voir en ligne : https://www.contrepoints.org/2019/1...