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Retraites : comment le RN a gagné la bataille des oppositions

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Cet article provient d'une source externe à NJ sans autorisation mais à titre d'information.

Le dernier sondage Ifop pour le JDD paru dimanche est particulièrement éclairant. Le Rassemblement national y est désigné comme le parti politique qui « incarne le mieux l’opposition » à la réforme des retraites pour 25 % des Français, contre 23 pour les Insoumis.

Une victoire sondagière confirmée par le match de la personnalité politique incarnant le mieux cette opposition. Marine Le Pen (46 %) y dépasse en effet Jean-Luc Mélenchon (43 %).

Le Rassemblement national sort donc grand gagnant de la fin des débats contre la réforme à l’Assemblée nationale . De son côté, l’extrême gauche semble abasourdie. Certains notent le manque de véhémence des députés Rassemblement national voire leur absence dans les débats en commission comme dans l’hémicycle.

Pourtant, ce sondage ne fait que confirmer une situation dont la chambre basse n’est que le théâtre depuis maintenant huit mois : le Rassemblement national a gagné la bataille des oppositions.

La stratégie du murmure

Depuis le début du débat sur la réforme des retraites, le Rassemblement national n’a cessé de marquer des points.

Dès le début de la contestation, il s’est positionné en opposant résolu à la réforme des retraites tout en refusant de faire déborder cette opposition dans la rue où il n’est de toute façon par le bienvenu.

Les députés Rassemblement national se sont donc concentrés sur les travaux parlementaires, ce qui ne l’a cependant pas empêché d’être très peu productif en termes d’amendements déposés. Sur les 20 000 qui le furent au 2 février, près de 13 000 ont été produits par la gauche. Le Rassemblement national, quant à lui, n’en a déposé que 200 , soit deux fois moins que Renaissance pourtant à l’initiative du texte. Toutes oppositions confondues, le Rassemblement national est donc le parti qui aura déposé le moins d’amendements tout en étant le principal groupe d’opposition.

Le 15 février, tentant de jouer la carte du pragmatisme, la gauche retire de nombreux amendements pour permettre le vote de l’article 7 , clef de voûte de la réforme puisqu’il s’agit ni plus ni moins que de celui repoussant l’âge de départ de 62 à 64 ans. Le Rassemblement national anticipe avec une certaine acuité que l’article ne pourra pas être voté mais propose tout de même une motion de censure.

Sur le fond, comme depuis le début du débat sur la réforme clef du quinquennat, le Rassemblement national se concentre sur sa volonté de soumettre le report de l’âge légal à référendum.

Le hasard aura fait le reste, puisqu’une seule motion référendaire ne pouvant être discutée, le tirage au sort a désigné celle du Rassemblement national et non de la NUPES. Le texte n’aura été voté que par le groupe mariniste et Nicolas Dupont-Aignan. De son côté la NUPES a refusé de le voter.

Une stratégie du murmure qui dénote avec le feu et la fureur de l’extrême gauche.

Une percée historique

C’est un fait : depuis juin le Rassemblement national est à la surprise générale le premier groupe d’opposition à l’Assemblée nationale.

Malgré la désunion de la droite radicale entre Rassemblement national et zemmouriens, le premier a réussi l’exploit d’envoyer 89 députés, devenus 88 en janvier dernier suite à la défaite d’une candidate dans la Marne après une législative partielle, au palais Bourbon.

Début juillet, ce nombre de députés et l’impossibilité pour la gauche de former un groupe unique ont permis au Rassemblement national de devenir le premier groupe d’opposition à l’Assemblée.

Cette situation lui laissa envoyer deux députés au perchoir en tant que vice-présidents de la chambre basse .

Comme à son habitude, plutôt que de tenter sincèrement de s’interroger sur les causes de sa propre déchéance, la gauche s’est purement et simplement contentée de pousser des cris d’orfraie , notamment par la voix de Sandrine Rousseau.

Un Rassemblement national pragmatique

Ces cris d’orfraie, le Rassemblement national ne s’en embarrasse pas.

À l’automne, LFI a déposé une motion de censure. À la surprise générale, le Rassemblement national décide de voter comme un seul homme pour le texte pourtant déposé par le bord opposé de l’hémicycle. Les réactions ne se font pas attendre, provoquant même des remous entre Les Insoumis et le Parti socialiste, ce dernier reprochant à son ex-allié d’avoir volontairement mis de côté un paragraphe consacré à l’immigration pour s’attirer les faveurs des marinistes.

Ces réactions sont à la fois hypocrites et disproportionnées, ce type d’événement étant tout sauf historique puisqu’une motion de censure commune FN-PS a déjà été votée en 1988 .

À l’inverse de LFI, le Rassemblement national s’est donc ici positionné comme une opposition travaillant davantage dans l’intérêt des Français que du sien, ce qui est particulièrement fort de café lorsqu’on se souvient de sa tendance à vassaliser tout parti qui tenterait de s’en rapprocher, à la manière du CNIP , du SIEL ou de DLF, parti devenu exsangue après l’appel de son leader à voter pour Marine Le Pen en 2017 et dont les cadres les plus prometteurs sont depuis devenus députés RN, à la manière de Laurent Jacobelli et Jean-Philippe Tanguy.

Fin d’année dernière, les traditionnelles niches parlementaires ont été une nouvelle occasion pour le Rassemblement national de se normaliser en singeant son principal concurrent populiste . Un terrain sur lequel le RN a volontairement mis de côté ses fondamentaux sur l’immigration et l’insécurité pour se concentrer sur les sujets sociaux et en particulier la réintégration des soignants non-vaccinés, enjeu électoral majeur pour les deux forces souhaitant s’assurer l’électorat contestataire à la politique vaccinale.

Une diabolisation concomitante

Mais ces petites victoires obtenues par le finaliste de la présidentielle ne le seraient pas sans le concours involontaire des forces politiques conformistes.

En effet, si l’expression de « dédiabolisation » est particulièrement éculée s’agissant du Rassemblement national, nous pourrions parler sans crainte d’une « diabolisation » concomitante des forces politiques dites républicaines.

En effet, qu’elles soient économiques, sociales, sécuritaires ou sanitaires, les différentes crises se sont toujours soldées par une marche ininterrompue, bien qu’à bas bruit, vers une forme d’autoritarisme soft. Chaque crise est l’occasion d’une nouvelle salve de normes et de réglementations attaquant les fondements de la propriété et de la liberté au nom d’impératifs alimentés par la peur et les intérêts électoraux.

Et ces politiques ont été le fait de partis au pouvoir qui se sont positionnés depuis maintenant un demi-siècle en opposition frontale à l’autoritarisme de l’extrême droite montante.

Nous avons donc assisté à une relativisation de la menace fasciste par des politiques autoritaristes menées par des forces se présentant comme républicaines.

Une gauche triple A

Dans un contexte de flou de plus en plus flagrant entre les forces anticonformistes et les mouvements dits républicains, le Rassemblement national a donc surpassé son principal concurrent insoumis dans le rôle de première force d’opposition.

LFI l’a largement aidée, l’extrême gauche ayant décidé de résumer sa stratégie d’opposition à un triple A, à la manière de la notation que nous n’atteindrions jamais si nous suivions leur politique : aboyer sur le gouvernement, asphyxier le débat parlementaire puis s’apitoyer de voir la part de gâteau de l’opposition lui passer sous le nez.

L’avenir de l’opposition se trouve donc du côté droit de l’hémicycle et cela ne devrait pas changer avant quelques temps.

Voir en ligne : https://www.contrepoints.org/2023/0...