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Mademoiselle Joséphine Loumagne (1922-2016)

, par  FERNON Jean-Paul , popularité : 4%
Cet article provient d'une source externe à NJ sans autorisation mais à titre d'information.
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Mon premier souvenir de Mademoiselle LOUMAGNE est associé à mon père. Délégué départemental de la MAIF à Oran, il nous a dit, un jour, à table : "J’ai fait la connaissance d’une dame qui est née à Cucugnan". Nous devions sans doute venir de lire Daudet et, forcément, Cucugnan nous faisait sourire, surtout prononcé avec un accent catalan bien imité. J’allais, quelques années après (combien, je ne sais pas le dire), faire vraiment connaissance avec ce parler si chantant (ah .... "les lignes z’isobares" nous ont bien fait rire !) en 3ème d’abord puis en 2nde.
Fin de l’épisode Algérie sans autre chose de notable.
Arrivée à Toulouse, rentrée 1962 : ma sœur Colette (elle aussi ancienne élève de Stéphane Gsell) se retrouve au lycée Saint-Sernin avec comme professeur d’Histoire-Géo une certaine Mademoiselle Loumagne. Reconnaissant le nom d’Abriat, elle eut vite fait le rapprochement avec sa carrière outre-Méditerranée. "Et où sont vos parents et que fait votre sœur ?".
Justement la sœur en question faisait de l’Histoire-Géo à la fac de lettres ! De fil en aiguille nous nous sommes retrouvées, un jeudi après-midi, toutes les deux et tout intimidées dans la salle de séjour de Mademoislle Loumagne près du lycée, rue Saint Hilaire. Sur la table de quoi nourrir un régiment de jeunes filles (fort minces à l’époque ... ).
Et forcément nous avons parlé de mes études. Elle était heureuse - et assez fière je crois - que j’aie choisi cette voie (et, en prime, l’option Géographie, comme elle !). Mais il y avait aussi deux certificats
d’Histoire à passer dont un qui nous posait à Toulouse bien des problèmes : l’indispensable double tome de " la Méditerranée occidentale au XVIème siècle" de Braudel manquait cruellement en bibliothèque (nous n’avions pas google .. ).
Et, soudain, ces deux pavés sont sortis d’un placard comme par enchantement. Ils ont permis aux 4 Pieds-Noirs (dont Marie-France Georges, elle aussi ancienne de Gsell) qui, comme par hasard, travaillaient ensemble d’être reçus à leur certificat d’Histoire moderne en fin d’année.
Pareille chose ne pouvait pas rester sans lendemain et Joséphine est vite devenue une vraie amie, venant souvent à la maison, voyageant avec Maman (jusqu’en Chine comme Marco Polo). " Il faudrait que je retrouve une photo sur laquelle elles figurent toutes les 2, sur un bateau, dans la baie de Hong Kong ! ", tricotant des vêtements à notre fille, la nourrissant de croquants aux amandes venant de Catalogne. Chaque fois qu’elle revenait à Toulouse, lorsqu’elle a eu quitté cette ville pour rejoindre Perpignan, elle prenait le chemin de la maison. Elle a donc vu grandir - et s’agrandir - la famille, la mienne et celle de ma sœur .
A Perpignan où nous passions sur le chemin de Font-Romeu, elle nous recevait chez elle alors que nous voulions l’emmener au restaurant. Elle vidait son garage pour qu’on puisse y ranger notre voiture à l’abri du soleil. Un jour, elle m’a aussi permis de renouer des liens, distendus par
le temps et l’espace, avec Herminie Mojica qui partageait notre repas.
Et, chaque fin d’année, elle me faisait rougir de honte parce que sa lettre de vœux arrivait toujours avant que je n’aie eu le temps d’écrire la mienne. Cette année seulement - et j’aurais dû y voir un signe - j’ai été plus rapide qu’elle. Elle m’annonçait son entrée très proche en maison de retraite à Latour de France et me donnait sa nouvelle adresse. Je lui ai écrit mais je ne saurai jamais si ma lettre est arrivée avant l’accident dont elle a été victime (NDLR : opération à la suite d’une fracture du col du fémur).
Et puis, nous échangions souvent des coups de téléphone qui duraient longtemps parce que, jusqu’à la fin, elle est restée curieuse du monde, elle voulait donc tout savoir de nos voyages, elle qui avait parcouru bien des pays. Je rêve du Japon qu’elle connaissait mais je n’aurai plus le
plaisir de partager mes impressions avec ma chère amie disparue.
Bien que je n’aie pu me rendre à ses obsèques, je sais qu’elle repose maintenant au pied du château de Peyrepertuse (à prononcer avec son accent) qu’elle aimait tant et dont j’ai reçu maintes cartes postales tout au long de ces années.
Je n’oublierai pas, c’est une évidence, l’amitié sincère qui nous a unies pendant si longtemps

Jacqueline ABRIAT-DULIEU

Voir en ligne : http://alysgo-apollo.org/ils-ne-son...