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Interdire les chants homophobes dans les stades ne résoudra rien

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Cet article provient d'une source externe à NJ sans autorisation mais à titre d'information.
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Par Benjamin Faucher 1

Ces derniers mois, quatre matchs de football ont été interrompus pour cause de chants homophobes. Si la ministre des Sports Roxana Maracineanu a salué cette initiative et souhaiterait la voir généralisée, cette pratique fait débat.

Entendons-nous bien, il ne s’agit en aucun cas ici de remettre en cause la légitimité de la lutte contre les comportements homophobes, et encore moins de justifier ces derniers. Les actes de violence commis contre des individus homosexuels sont abjects et hautement condamnables.

En fait, la question est plutôt de savoir comment lutter contre de tels comportements et surtout quel est le rôle de l’État et de la justice.

Si les interruptions de match sont à l’initiative des arbitres, des joueurs, des clubs ou de la Fédération Française de Football (FFF), qui est une association de loi 1901, alors on ne peut qu’applaudir.

En revanche, l’intervention d’un ministre quelconque est problématique : ce n’est pas le rôle d’un représentant de l’État d’exiger une action militante, aussi louable soit-elle.

C’est encore moins le rôle d’un représentant de l’exécutif de condamner des comportements. Si des individus se sentent lésés par un tiers, ils portent plainte, et c’est à la justice de gérer le litige. Ne sacrifions pas la séparation des pouvoirs sur l’autel de la morale.

L’état doit-il condamner l’homophobie ?

En fait, cette affaire interroge de façon plus générale la manière dont l’État lutte contre les actes homophobes. Doit-il condamner l’homophobie ?

Sur le plan théorique, la réponse est non.

L’homophobie est la haine de l’homosexualité, c’est-à-dire la conviction profonde que celle-ci est immorale. Or il serait dangereux et inefficace de doter l’État du pouvoir de contrôler les convictions individuelles.

Si on veut que les individus restent libres, il vaut mieux que l’État ait peu de pouvoir, plutôt que celui de décider ce que chacun est autorisé à faire en fonction des convictions morales du gouvernement au pouvoir. Si ce principe de neutralité morale de l’État avait été respecté, l’homosexualité n’aurait jamais été illégale.

De plus, si l’homophobie était interdite par la loi, donc par la force, elle ne serait que réprimée et ne pourrait pas être combattue.

Cette question peut se transposer à d’autres domaines : racisme, antisémitisme, négationnisme.

Que prévoit le Code pénal ?

Cette problématique se retrouve d’un point de vue pratique dans le traitement par la justice des actes de violence. Depuis le 27 janvier 2017, le Code pénal prévoit des circonstances aggravantes pour tous les délits et crimes soumis à des peines d’emprisonnement.

Dans l’article 132-77 du Code pénal, il est précisé que la circonstance aggravante s’applique lorsqu’un « crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui soit portent atteinte à l’honneur ou à la considération de la victime ou d’un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe, son orientation sexuelle ou identité de genre vraie ou supposée, soit établissent que les faits ont été commis contre la victime pour l’une de ces raisons. »

Cette conception du droit est problématique, puisque la loi pénalise en même temps l’acte violent et l’homophobie. Si la première raison est légitime, la seconde l’est nettement moins.

Encore une fois, ce n’est pas à la loi de réprimer ce que pensent les individus, aussi abjectes soient ces pensées. Cette situation est également difficilement tenable face aux autres victimes.

Si un meurtre homophobe ou raciste est puni d’une sanction aggravée, cela veut-il dire que le meurtre d’un homme hétérosexuel est moins grave ? Cela semble difficilement tenable.

Le risque serait également que chaque minorité, chaque cas particulier réclame lui aussi son statut de victime privilégiée, conduisant à une inflation des circonstances aggravantes.

Alors, face à ces violences, que faire ?

D’abord, supprimer la caractérisation des délits et des crimes comme homophobe ou raciste n’empêche pas de les punir par la loi.

Si deux femmes se font attaquer dans la rue parce qu’elles se tiennent la main, elles pourront quand même porter plainte pour agression et les auteurs seront punis par la justice.

Est-ce que cela signifie qu’il faut renoncer à dénoncer et lutter contre l’homophobie et le racisme ? Sûrement pas. Mais c’est le rôle de la société civile, pas de l’État.

Assouplissons les lois corsetant la liberté d’expression qui permettent des procès en diffamation à la pelle et n’empêchons pas les imbéciles de parler pour mieux les contredire et les combattre.

Il serait peut-être également temps de permettre aux individus d’assurer leur protection eux-mêmes.

Pourquoi les armes non létales (taser, bombes lacrymogènes…) ne peuvent pas être portées librement sans appréciation du juge ? Cela pourrait sauver des vies et être une piste efficace dans de nombreux problèmes de société, y compris les violences quotidiennes dont sont victimes de nombreuses femmes dans la rue.

Cessons de croire que l’État est la solution à tous les problèmes de la société.

Plutôt que la censure, préférons la concurrence des idées.

Plutôt qu’une protection hypothétique, inéquitable, inefficace et dangereuse d’un État-nounou surpuissant, laissons aux individus la possibilité d’assurer un minimum leur défense.

Benjamin Faucher est Coordinateur local pour Les Affranchis – Students For Liberty. ↩

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