Il est des dates, il est des moments, il est des horreurs que rien n’efface.
Le 26 mars restera pour tous celles et ceux qui l’ont vécu, la date de ce que l’esprit ne peut comprendre, que la raison rejette, que la mémoire refuse d’effacer, que le cœur refuse de ne plus en souffrir, même si l’évènement est tous les jours plus loin du calendrier qui l’a éternisé.
La rue d’Isly est un simple nom de rue jusqu’à ce 26 mars 1962 presque ignoré de tous ceux qui le découvriront, malheureusement, à travers les images d’horreur, les cris des blessés, les hurlements des parents ou amis des tués et blessés, le crépitement des armes meurtrières et assassines, l’horrible hurlement des sirènes des ambulances.
Le drame, ce jour-là avait succédé à la quiétude d’un printemps d’Alger. Le drame s’était installé là où on aurait voulu que se prolonge l’espace d’amitié, de fraternité, de convivialité que nos compatriotes avait bâti depuis plus d’un siècle et qui en faisait des passionnés de ce qu’ils avaient construit et aimé.
Point n’est besoin de relater le drame vécu ce jour-là. Tout le mode l’imagine à travers les images de sang, de cris de celles et ceux qui quittèrent ce jour-là la terre que leurs aïeux avaient enrichie avant qu’ils continuent l’œuvre commencée dans l’anarchie initiale du pays qu’ils avaient découvert et la pauvreté de ceux qui l’occupaient.
Point n’est besoin de dire que notre refuge, notre mince consolation, c’est peut être, aujourd’hui, la prière et les rassemblements où on se retrouve , tristes du souvenir de l’être cher disparu, de l’ami parti dans la dignité souvent, dans la souffrance plus surement.
N’oublions jamais ce jour où des Français ont tué des Français. Les uns ont tué par devoir et obligation d’exécuter et d’obéir même si l’exécution et l’obéissance rendent quelquefois aveugles et autistes. Les autres, hommes, femmes et enfants, sont tombés, victimes de leur passion, qui fut belle mais fatale. Ils ne pouvaient vaincre par cette seule passion. Elle leur fut fatale. Qu’ils soient admirés d’avoir voulu dire leurs convictions. Ils ne seront jamais oubliés mais toujours honorés.
Que notre pays ne connaisse plus jamais un tel drame. Personne ne le mérite. Personne ne l’avait souhaité. Tout le monde en a souffert. Tout le monde souhaite qu’autour du souvenir douloureux la réconciliation s’installe, la mémoire continue d’honorer nos amis disparus dans cette rue, qui fut belle mais que l’histoire a ensanglantée d’une tâche indélébile.
Que toutes les victimes reposent en paix, celle qu’ils auraient connue si la passion ne l’avait emporté, un jour, le 26 mars 1962, sur cette terre qui fut la nôtre, qui fut la leur.
Michel Richaud
Vice-président national
Président UNC 13