L’humanisme, porté en sautoir en guise de respectabilité, est un artifice qui sonne faux. « Si vous étiez en responsabilité, auriez-vous laissé mourir ces 44 enfants ? », a lancé mardi Gérald Darmanin à la députée RN Laure Lavalette. L’élue questionnait le gouvernement sur son attitude conciliante face à l’Ocean Viking et ses 234 immigrés. « Nous avons fait preuve d’humanisme, vous auriez laissé mourir ces enfants ! », s’est défendu le ministre de l’Intérieur. Il a annoncé que 44 « rescapés », accueillis dans un centre de loisirs, avaient été reconnus mineurs et pris en charge par l’Aide à l’enfance, tandis que seuls 44 illégaux seront expulsés. Le droit d’asile a été reconnu pour la majorité des clandestins, qui seront répartis dans onze pays d’Europe. Reste cette question : les bons sentiments suffisent-ils à faire une bonne politique ? Et la réponse est évidemment non. Darmanin, qui expliquait cet été vouloir « incarner le bon sens populaire », dissimule le renoncement de l’Etat à défendre ses frontières derrière un prêchi-prêcha de défroqué. Le refuge du gouvernement dans le camp des mirobolants signe sa lâcheté. Il va de soi que les passagers malades avaient à être pris en charge. Mais le chantage humanitaire des ONG, auquel a cédé l’Etat en s’en flattant, réduit la politique a un sentimentalisme qui annonce l’abandon de toute fermeté face à l’immigration qui force les portes et s’impose à une Europe culpabilisée.
Les dirigeants politiques servent-ils encore à quelque chose, quand ils se montrent incapables d’être garants de l’intégrité du territoire, au prétexte d’exhiber leur générosité et de faire la leçon ? Dans son dernier essai (1), Bérénice Levet remarque : « Le parti de la déraison est préféré et l’obsession de donner des gages de son appartenance au camp du Bien triomphe de toute autre considération ». L’essayiste rappelle cette réplique de Raymond Aron à ceux qui lui reprochaient sa « dramatique sécheresse » : « Nous que la misère des hommes n’empêche pas de vivre, qu’elle ne nous empêche pas au moins de penser. Ne nous croyons pas tenus de déraisonner pour témoigner nos bons sentiments ». Darmanin, toujours soucieux de dénoncer les « populistes », serait bien inspiré d’entendre ce conseil. Car il est peu probable que l’argumentaire humaniste, agité depuis des décennies au prix d’innombrables mensonges sur les bienfaits de l’immigration, suffise encore à convaincre l’opinion. Quand Darmanin s’en prend au « Front national » sur cette affaire de navire indésirable, il promeut en réalité le Rassemblement national dans son rôle de lanceur d’alerte. Les sondeurs ne semblent pas se presser pour demander l’avis des Français sur l’attitude du pourvoir face à l’Ocean Viking. Il m’étonnerait qu’ils approuvent l’angélisme de Darmanin.