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L’Impasse de l’Emotion.

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imagesL’émotion planétaire qui envahit nos écrans est une illusion rassurante. Des foules se réunissent, des défilés s’organisent, des hommages sont rendus : d’Obama allant signer le registre à l’Ambassade de France jusqu’à l’anonyme qui dépose des fleurs sur les lieux de la tuerie, la communion parcourt le monde. Que veulent dire tous ceux qui brandissent leur crayon ou leur pancarte « je suis Charlie » ? Certains étaient des lecteurs et expriment leur solidarité avec des journalistes provocateurs et courageux, avec un périodique qu’on a voulu tué. D’autres, je pense aux Catholiques que Charlie ne ménageait pas, sont révoltés par la barbarie, l’inhumanité de ces assassinats. D’autres encore manifestent leur désir d’affirmer haut et fort le caractère « sacré » de la liberté d’expression et de tous ceux qui y concourent. Compassion, tristesse, révolte et résistance animent les rassemblements. L’affectivité qui domine notre vie collective scandée par les médias laisse-t-elle encore une place à la réflexion et au raisonnement ?

L’émotion répond a un besoin. C’est d’abord un appel intérieur pour rétablir notre équilibre après un choc. Ce peut être aussi une manière de restaurer la solidarité d’un groupe. Les pleurs versés à l’occasion d’un deuil participent de ces deux mouvements. Mais l’émotion qui mobilise nos affects est le contraire de l’action. Aussi, tout en la sachant nécessaire et profondément humaine, il ne faut pas s’en contenter. Il faut même s’en méfier, et ne pas craindre d’en mesurer les risques.

Ainsi, la mobilisation populaire très médiatisée contre les assassins de Charlie va certes montrer toute l’horreur qu’inspirent leurs crimes. Mais en même temps ne va-t-elle pas les combler ? Que quelques individus médiocres aient pu remuer le monde entier, quoi de plus satisfaisant pour leur narcissisme ? Qu’ils aient pu accomplir sans faille l’exécution de leur « mission », venger le prophète, « exécuter » les « blasphémateurs » récidivistes, abattre froidement des policiers et tenir en haleine des forces de sécurité considérables, voilà qui risque bien d’en faire des héros, promis au paradis d’Allah, non seulement à leurs yeux, mais aussi dans l’esprit des centaines de djihadistes, qui sont ou seront chez nous après leur passage au Moyen-Orient. Quelle publicité aussi pour les commanditaires directs ou indirects de cette opération meurtrière ! Les cortèges n’y changeront rien. On défile contre un gouvernement. On ne défile pas contre le terrorisme qui par essence se veut minoritaire et violent, et que les masses réunies contre lui n’impressionnent pas, même si des musulmans s’y trouvent. Le fanatique a besoin des traîtres et des hérétiques.

L’émotion doit laisser place à l’action. Mais celle-ci doit être claire dans ses motivations et ses objectifs. Si la liberté d’expression doit être défendue, ce n’est pas de manière sélective. On voudrait être sûr qu’une agression contre un média d’un bord opposé eût subi pareille condamnation unanime. La chape de la pensée unique n’a pas tardé à peser sur les commentaires et les discours. On a remarqué l’insistance des politiciens et des journalistes à préférer les mots d’extrémisme ou de fondamentalisme à celui d’islamisme. J’ai même entendu M. Askolovitch, journaliste militant, parler de fascisme en évoquant les terroristes musulmans, ce qui paraît un amalgame plus poussé que de dire qu’ils sont musulmans, même si, Dieu merci, ils sont très minoritaires. Le politiquement correct impose la pensée unique de manière plus sournoise que le militantisme. De peur de rappeler que la France est une vieille nation catholique qui se rassemble à Notre-Dame dans ses plus grands moments d’émotion collective, une journaliste a fait de la cathédrale de Paris un symbole de laïcité : il fallait oser ! Avec moins de délicatesse, les politiciens ont récupéré sans vergogne l’indignation générale pour appeler à s’unir autour du Chef de l’Etat. On a noté que cette union sacrée était hiérarchisée, et comme d’habitude sélective. La République est par définition l’affaire de tous, mais tous ne sont pas républicains. Qui décide de qui est républicain ? Mais les républicains, bien sûr ! Ah, bon…

Donc, union, mais pour quoi faire ? Pour soutenir une politique américaine qui a jeté l’ensemble du Moyen-Orient dans le plus grand désordre et multiplié les lieux d’entraînement des futurs terroristes, mais se refuse à engager des troupes au sol ou à appuyer l’armée syrienne pour écraser les djihadistes ? Pour tolérer encore la duplicité de nos riches amis du Golfe qui donnent aux doctrines extrémistes les moyens de se répandre ? Pour continuer à favoriser l’immigration et l’accession à la nationalité de populations qui représentent à l’évidence un risque statistique à terme ? Pour poursuivre une politique pénale absurde, qui par manque de moyens et de volonté, n’impose pas le travail aux détenus, les libère trop vite et leur offre par laxisme ou bêtise la possibilité de s’entretenir physiquement ou de se droguer, de créer des liens criminels ou de se convertir au djihadisme ? 12 morts à Charlie Hebdo, un policier municipal abattu. Les meurtres n’ont été ni dissuadés, ni empêchés. La police recherche les assassins. Le nombre des acteurs potentiels et des armes en circulation rend la surveillance impossible et la protection illusoire. Il est vraiment trop facile d’appeler à l’union contre le terrorisme derrière une politique aussi inefficace. C’est cette politique qu’il faut absolument changer !

Voir en ligne : http://www.christianvanneste.fr/201...