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Ne pas confondre sport et sport…

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JOJCHier, la une de l’actualité était « sport plein pot ». Oubliés les massacres, les attentats, les guerres qui du Mali à l’Afghanistan montrent combien l’islam est une religion de paix. Oubliés, les immigrés qui affluent sur nos côtes pour être accueillis par notre pays ou le quitter pour la prospère Angleterre. Oubliés les chiffres du chômage et la stagnation économique que la politique sans imagination ni vigueur du gouvernement entretient. Il n’y en avait que pour le coup de tête d’un danseur de tango quittant brutalement l’entraînement des footballeurs marseillais et pour la médaille d’or de Camille Lacourt à Kazan. Autant la seconde information méritait notre intérêt, autant la première jette une lumière inquiétante sur la place donnée au sport dans notre société, on n’ose pas dire notre civilisation.

Alors que la disparition de l’enseignement du grec et du latin va couper les dernières racines qui reliaient notre présent en décomposition au passé qui a alimenté la pensée européenne, peut-être faut-il trouver dans l’opposition entre les Jeux Olympiques des Grecs et les Jeux du Cirque des Romains l’origine de la confrontation entre les deux visages du sport actuel. Les premiers se déroulaient dans la ville sacrée d’Olympie pendant une trêve religieuse. Certes, il n’y avait pas de nageurs, mais les conducteurs de chars ou les athlètes, étaient des champions qui gagnaient couronnes de laurier seuls tout en incarnant leur cité. Un mois de paix entre les cités grecques était proclamé pour garantir la sécurité des compétiteurs qui se rendaient aux Jeux dont la durée n’excédait pas une semaine. Le sport apparaissait ainsi comme une sublimation de la violence guerrière portée par la religion : le vainqueur honorait sa cité. Les redoutables Spartiates semblent d’ailleurs avoir dominé les Jeux. Ceux-ci n’ont pas mis fin aux guerres, mais ils permettaient de les remplacer périodiquement par des victoires individuelles et symboliques. On observera qu’à notre époque les Jeux ressuscités par Coubertin ont pu ensuite remplir un rôle analogue en transposant la guerre froide en compétition sportive entre l’Est et l’Ouest. Malgré les nageurs/nageuses de l’ex-RDA, c’était un progrès. Les préoccupations éthiques étaient vives chez les organisateurs des Jeux de l’Antiquité : des magistrats les contrôlaient sous l’autorité d’un Sénat olympique. La Cité qui ne respectait pas la trêve comme l’athlète arrivé en retard pour avoir participé à une compétition rémunérée étaient exclus ou soumis à une amende. La victoire était récompensée : certaines cités entretenaient généreusement les vainqueurs jusqu’à la fin de leur vie. Sparte leur offrait l’honneur de participer aux batailles au côté du roi. A chacun son style. La médaille d’or d’un Lacourt qui récompense des années d’efforts et d’entraînement a fait retentir la Marseillaise et se lever les trois couleurs. Elle a suscité un peu de fierté nationale et stimulé sans doute chez beaucoup le goût du sport. Cela mérite bien que l’intéressé en tire quelqu’avantage, ne serait-ce qu’au travers de la publicité, en évitant toutefois d’en faire un Ministre des sports, ce qui est une autre affaire.

Sous la République, les jeux romains, des courses de chars principalement, se situaient également dans un contexte de fête religieuse. Mais leur dérive a accompagné l’extension de Rome et le passage à l’Empire. De 75 jours de jeux à la fin de la République on passera à 176 au IVe siècle ap. JC. 64 jours offriront chacun 24 courses que les Romains pourront suivre au long du jour, leur oisiveté étant préservée par le clientélisme des plus riches. Caligula y intégrera les combats de gladiateurs. Des batailles navales, les naumachies y seront réalisées. La compétition sacrée était devenue un grand spectacle mobilisant des moyens extraordinaires. Celui-ci fascinait, hypnotisait les foules soumises au « panem et circenses ». Les barbares pouvaient arriver. Ils le firent d’ailleurs, d’après Ferdinand Lot, en surprenant et massacrant la population de Trêves au cirque, lors de ce que les historiens n’appellent plus les « invasions », mais les « migrations »… L’importance démesurée donnée au football professionnel dans notre « civilisation » n’a-t-elle pas quelque ressemblance avec ce précédent romain ? Des mercenaires sont recrutés sur un marché mondial par des entreprises de spectacle qui réunissent des moyens considérables dans ce but. Sans la moindre logique, les victoires obtenues par des équipes constituées de champions venus d’ailleurs, financées par de l’argent venu parfois de très loin, entraînées souvent aussi par des étrangers, comme notre célèbre « loco » Argentin, vont enthousiasmer les habitants d’une ville comme si ce spectacle avait la moindre conséquence réelle pour celle-ci, la moindre retombée concrète sur la vie des vraies gens. La religion chrétienne, dont Marx pensait qu’elle était l’opium du peuple, a mis fin aux Jeux Olympiques comme aux Jeux du Cirque, par souci de morale dans le second cas, et pour en finir avec des rites païens dans le premier. Si on peut se réjouir de la réhabilitation du corps avec la renaissance des compétitions sportives devenues laïques, on doit toutefois s’inquiéter d’un sport qui détourne l’attention des périls qui menacent notre société et notre pays, un opium du peuple particulièrement efficace. Un pays, quelque soit son régime, est-il sympathique parce qu’il finance une équipe de football ? Est-il bon que des jeunes adulent tel champion incapable de prononcer la moindre phrase intelligente, quand ils ignorent le nom de notre dernier Prix Nobel ? Est-il sain que les politiciens fassent semblant de s’intéresser au football par démagogie ? Est-il responsable de donner plus de place à ce qui n’est qu’une affaire d’argent par rapport à la recherche du Bien Commun ? Il y a trente ans, malgré 39 morts dans les gradins, on n’avait pas annulé le match Liverpool-Turin(où jouait un certain Platini), et sa retransmission télévisée depuis le stade du Heysel. Certes, aucune violence de cette dimension n’a plus marqué le football, mais on la craint toujours à en juger par la mobilisation des forces de police lors de certains matchs. Manifestement si le sport peut être riche de symboles, il peut aussi constituer un angoissant symptôme de notre avenir… de notre décadence.

Voir en ligne : http://www.christianvanneste.fr/201...