Si l’on veut prendre conscience de manière brutale de la réalité du séparatisme, il suffit de regarder deux images : la première montre une rangée de policiers avançant le long de la Seine pour repousser la foule des flâneurs qui ont profité du beau temps, entre deux couvre-feux pour mettre le nez dehors, pas vraiment d’ailleurs, car le masque obligatoire le dissimule dans un pays où la loi interdit très théoriquement de dissimuler le visage. La lutte contre la pandémie a inversé le commandement, et très docilement les promeneurs refluent vers les escaliers gardés par des policiers en obéissant aux consignes données par haut-parleur. La présence des forces de l’ordre est massive, dissuasive mais sereine. Rien à voir avec la répression des Gilets Jaunes. Toutefois “la peur du gendarme”, la crainte de l’amende généreusement distribuée, la densité de ces silhouettes sombres et de leurs véhicules pour faire respecter la loi par des citoyens dociles créent un malaise : cette image est celle d’un Etat-policier !
La seconde image est celle d’une voiture de police fuyant un groupe de loubards courant vers elle armés d’instruments divers. Nous sommes en France aussi, peut-être non loin de Paris, mais nous sommes dans un autre pays, où ce sont les policiers qui ont peur et s’enfuient. En 2018, deux ministres de l’Intérieur plus tôt, avec un total manque d’imagination, la macronie avait instauré la “sécurité du quotidien”, resucée bien socialiste de la “police de proximité” de Lionel Jospin dont chacun avait pu mesurer l’inanité. Le ton était martial : on allait augmenter la présence policière dans les “quartiers de reconquête républicaine”, quinze au départ et devant monter jusqu’à soixante à la fin du mandat présidentiel, c’est à dire au départ de Macron que l’on souhaite. Drôle de reconquête lorsque le conquérant fuit devant le reconquis pour sauver sa peau, quand il ne se fait pas tabasser, quand sa voiture ne brûle pas, quand son commissariat n’est pas assiégé par des groupes tirant au mortier d’artifice. Non seulement le nombre des secteurs où règne une autre loi que celle de la République ne cesse d’augmenter, mais la violence se fait de plus en plus extrême envers les forces de l’ordre, et bien sûr entre les bandes qui se partagent le territoire dont l’identité séparée de celle de la nation repose sur un trépied : immigration nombreuse, trafic intense et islam très visible.
Depuis le début de l’année, les événements se sont multipliés pour souligner l’échec de cette politique, comme s’il y avait deux France, celle de la peur du covid et de la dictature sanitaire, et l’autre, celle de la chienlit des quartiers perdus de la République, lesquels n’hésitent pas d’ailleurs à déborder sur la première. C’était le passage à tabac de Yuri dans le cadre de l’affrontement entre deux bandes, dans le 15e arrondissement de Paris, qu’on aurait du mal à placer parmi ceux où la pauvreté et le désespoir engendrent la révolte. Un élu “centriste” s’est empressé de minimiser l’incident dans un quartier selon lui “pas plus problématique que les autres” et explicable par le manque de sport et de défoulement. Quelques jours plus tard, le maire ” Républicain” d’Etampes organisait une marche blanche pour rendre hommage à Nourredine et à Samir, deux multirécidivistes, morts dans un accident de voiture pour avoir fui un contrôle de police en prenant la Nationale 20 à contre-sens. Dans cette ville déjà touchée par les émeutes, et pour éviter une réaction violente, le Maire a rendu hommage à ceux qu’il craint parce qu’ils ont le vrai pouvoir chez eux, dans leur quartier, à des délinquants victimes de leur délinquance ! C’est ce type d’allégeance à l’autre France qui suscite la rébellion, le refus de l’ordre, puisque l’ordre lui-même étale sa faiblesse, sa soumission.
Plus récemment un tour de France des violences urbaines s’est mis en marche, avec Beauvais, Fréjus, et l’agglomération lyonnaise, Bron, Rilleux-la-pape, et Lyon dont la mollesse du maire “pastèque” n’a rien de rassurant : il veut apaiser. Pourquoi ? Parce que là-aussi le scénario habituel a été amorcé : un voleur de scooter est victime d’un accident sans casque, et bien sûr la culpabilité plus que virtuelle de la police devient prétexte à des incendies de voitures qui servent de guet-apens pour les pompiers et les policiers qui les accompagnent. Pour les distraits, cela prend la forme d’une rébellion, qui tient un territoire et y attire les “loyalistes” pour leur tendre des embuscades. A Beauvais, un policier dit qu’en vingt ans, il n’avait jamais connu une telle violence. Alors la caravane ministérielle suit le tour, annonçant de nouveaux quartiers de reconquête, à la manière des généraux affirmant que la retraite sur des positions mieux défendues constitue une victoire. C’est inacceptable clame le ministre qui semble toutefois mieux accepter ces troubles que les manifestations non-violentes de Génération Identitaire.
Chacun sait que la circulation des effectifs de police d’un quartier à l’autre ne sera qu’un placebo. La maîtrise de l’immigration, la réforme de l’accession à la nationalité, de sa déchéance, des procédures d’expulsion, la suppression des aides sociales aux familles de délinquants, l’application de peines infiniment plus sévères, et strictement mises en oeuvre, une remise en cause de la justice des mineurs, enfin, constitueraient un dispositif plus sérieux que les “quartiers de reconquête” où la police bat en retraite. Il faut un changement radical de politique, et il faudrait surtout que l’appareil judiciaire s’y adapte sans réserve. Nous en sommes loin car le macronisme est aux antipodes de cette conception.