LES ENJEUX DE L’ECOLE EN ALGERIE AVANT 1962
Le 22 février dernier, la présidente du Cercle algérianiste d’Aix-en-Provence, Evelyne JOYAUX, a tenu une conférence sur un sujet qui lui est cher : l’Ecole en Algérie avant 1962".
Sa conférence nous permet de revenir sur ce que représente l’Ecole pour la France, notamment depuis l’esprit des Lumières ; on y voit également la réalité des chiffres se confronter aux "fake news" construits contre l’oeuvre française en Algérie. On y rencontre aussi ces hommes et ces femmes partis enseigner au bled, comme des apôtres au service de l’école française.
Evelyne Joyaux a bien voulu rendre compte de sa conférence en l’allégeant nécessairement.
Nous publierons son contenu en 3 parties .
I - Préambule et chiffres de la scolarisation en Algérie - Ecole primaire II - Enseignement et Colonisation III - L’instituteur du bled : un sacerdoce |
Ière PARTIE
Les générations de Français qui sortaient de « la Communale » munis de leur certificat d’étude tenaient peut-être l’école pour une évidence, mais Charles Péguy, qui donna aux instituteurs le nom de « Hussards Noirs de la République, » leur reconnaissait le mérite de jouer un rôle primordial dans la formation de l’homme et du citoyen.
Plus près de nous le philosophe Jean François Mattéi écrivait à propos des violences dans nos écoles : « Que la barbarie la plus primitive, celle de la prédation, ait réussi à s’installer de manière endémique dans les établissements scolaires dont les plus touchés ont été pillés, dévastés ou brûlés, alors que « l’école » symbolisait depuis toujours le plus haut lieu de civilisation pour la tradition européenne aurait stupéfait tous ceux qui, parmi les défenseurs des lumières, et de la République, de Condorcet à Jules Ferry ou Alain, avaient engagé leur foi dans une institution destinée à permettre aux hommes d’accéder à leur humanité. »
Un siècle s’est écoulé entre ces deux écrivains qui partagent pourtant la même conception de l’école L’enseignement ayant ainsi une telle puissance symbolique , il n’est pas étonnant qu’il ait constitué une des principales cibles pour ceux qui veulent discréditer l’oeuvre française en Algérie.
Un article d’El Watan affirme après beaucoup d’autres « que la colonisation a été un processus d’exploitation, de répression, de marginalisation, d’exclusion de déni des droits, fondé pour une large part sur une idéologie de l’inégalité des races… L’auteur de l’article ajoute que « Les thuriféraires de la colonisation prennent l’exemple scolaire pour mettre l’accent sur les effets « positifs ». Or, écrit-il, l’effet sur le plan des effectifs scolaires concernés a été dérisoire. Il y a à peine 10% d’une classe d’âge scolarisable qui sont scolarisés au début de la lutte de libération nationale. Dans le même temps plus de 97% des enfants européens étaient scolarisés. »
Quelques chiffres permettent d’évaluer cet effet « dérisoire ».
Chiffres de la scolarisation en Algérie.
Enseignement primaire
En 1900 total des enfants scolarisés : 114 900
24 200 musulmans +90 700 origine européenne
6 filles musulmanes sont scolarisées pour 100 garçons
En 1945 Total des enfants scolarisés : 240 100
129 300 musulmans +110 800 origine européenne
Les enfants musulmans représentent 54% des effectifs des classes
22 filles musulmanes sont scolarisées pour 100 garçons
En 1954 total des enfants scolarisés : 436 550
306 700 musulmans +129 850 origine européenne
Les enfants musulmans représentent 70% des effectifs des classes
1961 Total des enfants scolarisés : 845 000
735 500 musulmans +109 500 origine européenne
Les enfants musulmans représentent 87% des effectifs des classes
37 filles musulmanes sont scolarisées pour 100 garçons
Entre 1900 et 1961 l’accroissement du nombre d’élèves musulmans est de 710 000. Il est de moins de 20 000 pour les élèves d’origine européenne et israélite.
Quoique important, l’effort de la France pour scolariser les enfants musulmans ne compense pas la forte progression démographique, (Progression de la population : 250 000 par an soit 1 village de 700 habitants chaque jour). D’où plusieurs initiatives.
En 1955
Création des centres sociaux avec pour objectif l’alphabétisation de 900 000 enfants en 5 ans
Les SAS sont créés par le Gouverneur général Soustelle
En 1956
L’Algérie : 9 000 000 d’habitants a 25 fois plus d’instituteurs que l’Egypte avec 22 000 000 habitants
Création du corps des instructeurs niveau BE(décret du 16 août 1956)
La grève générale est décrétée par le FLN. 300 écoles sont détruites. L’académie rouvre les écoles où elle le peut. Les militaires prennent le relais des enseignants.
En 1957 création de 697 SAS.
1 200 militaires assurent des rôles d’enseignant.
En 1958 l’ordonnance du 20 août prévoit la création de 1 800 classes chaque année (Construction de locaux, équipement, formation des maîtres…)
(Source : M Naegelen ministre 1956 et annuaire statistique de l’Algérie de 1961)
Budget
En 1957 : 30 milliards sont consacrés à l’enseignement sur un budget de 148 milliards
......A SUIVRE : II - Enseignement et colonisation