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Départementales : On tourne en rond !

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imagesLa politique a deux visages : la lutte pour prendre le pouvoir et le conserver, la gestion du Bien commun. L’une des caractéristiques françaises est la disproportion en faveur du premier au détriment du second. Le manque d’intelligence, de courage et tout simplement de travail qui caractérise le microcosme politique français explique en grande partie les faibles performances d’un pays dont les atouts sont prodigieux et souvent gaspillés. En revanche, le nombre de places à occuper, les avantages qui s’y attachent se mesurent à l’âpreté et à l’acharnement des luttes pour les acquérir. Cette appétence se trahit par l’emploi assez scandaleux du mot conquête (ou reconquête) lors des victoires électorales. Comme si un parti pouvait s’emparer du territoire et des dépouilles d’un adversaire pour en devenir le possesseur ! Une victoire électorale, c’est l’honneur et la chance de mettre son talent et ses idées au service d’un territoire et de tous ses habitants, même ceux de l’autre camp, dans l’espoir de mieux réussir à défendre et à promouvoir le Bien Commun. Ce n’est pas occuper la place au profit de sa tribu ! La quantité d’apparatchiks qui vivent sur la bête et voient dans ces combats l’occasion d’une carrière en faisant de la politique un métier, alors qu’ils seraient plus utiles dans nos outils de production et d’échanges, est d’ailleurs l’une des tares de notre pays.

La compétition politique pour le pouvoir a, elle aussi, deux aspects : le débat et le jeu. Le premier oppose des idées, des valeurs, des projets, des propositions, des programmes. Le second combine tactique et stratégie, calculs, additions ou divisions, alliances ou isolement, à court ou à long terme. Là encore le deuxième est de loin le plus important dans la politique française. Les élections départementales en ont fait la démonstration. L’avenir des départements n’y a joué aucun rôle. Il s’agissait de préparer la finale, l’élection présidentielle. Tout le reste a été vain bavardage. Celui qui a emporté la partie est clairement Nicolas Sarkozy, parce qu’il est sans doute celui qui considère le plus la politique comme un jeu où les idées ne sont que des moyens tactiques et non des objectifs. Le but est la victoire et le pouvoir qui en découle.

La politique française oppose aujourd’hui trois grandes forces. L’élection présidentielle au second tour n’en retient que deux. Il y a et il y aura toujours la gauche. En revanche, il y a deux droites. Le danger mortel pour Sarkozy est que la seconde droite ne supplante la première, que le FN « normalisé » prenne la place de l’UMP, et ne soit face à la gauche au second tour de la présidentielle. La tactique choisie a consisté à dénoncer toute alliance avec un parti avec lequel il prétendait n’avoir rien en commun, tout en reprenant certains de ses thèmes. Cela a fonctionné. Au second tour des élections départementales, les électeurs FN privés de candidat se sont reportés sur celui de droite. Les électeurs de droite et du centre se sont partagés entre abstention, vote en faveur de la gauche ou du FN. Le résultat est que dans la majorité des cas, le FN a perdu les duels et a reculé dans les triangulaires, même lorsqu’il était en tête au premier tour. Le renforcement de l’UMP aux municipales et aux départementales lui confère une grande chance d’être présente au second tour des présidentielles à moins d’une improbable et mortelle division. Son adversaire, de gauche ou de droite aura peu de chances de l’emporter, en raison de l’affaiblissement et peut-être des divisions de la gauche et de l’isolement du FN.

La France semble donc condamnée à un jeu de balancier. Celui-ci serait clair comme dans les pays qui pratiquent l’élection uninominale à un tour et n’ont que deux partis. En France, le jeu est faussé, car en introduisant la proportionnelle dans certaines élections, on a fait émerger un troisième parti qui, en raison du nombre de ses électeurs l’emporte dans ce type d’élections, mais est éliminé dans les scrutins majoritaires, à cause de sa solitude. L’ostracisme pratiqué par le PS comme par l’UMP a entraîné le maintien d’un tiers des départements à gauche, notamment dans le bastion du sud-ouest, et la victoire de l’UMP et de ses alliés dans les autres départements. Aucun département n’aura d’exécutif frontiste. Or, on voit que l’implantation locale est indispensable pour crédibiliser et légitimer le mouvement et lui permettre de supplanter son rival de droite. Le succès éclatant de Robert Ménard à Béziers en fait la démonstration. Son exemple biterrois a fait gagner le FN dans les trois cantons de la ville alors qu’il était battu dans le reste du département. Dans la plupart des villes dirigées par un maire frontiste, les candidats du FN sont arrivés en tête et ont été élus, sauf quand ils ont subi les effets du découpage. Il est fort probable que l’élection régionale sera beaucoup plus favorable au parti de Marine Le Pen, mais elle aura un impact plus faible dans l’enracinement.

On peut évidemment maudire l’injustice et la mauvaise foi d’un jeu politique qui accorde plus d’élus au Parti Communiste qui a réuni 1,32 % des suffrages du premier tour qu’au Front National choisi par 25, 24% des électeurs. Ce n’est pas tant le mode de scrutin qu’il faut critiquer, lequel évite l’instabilité et dégage des majorités de gouvernement, que l’absence d’alliance à droite, alors que sur de nombreux sujets, des accords pourraient être trouvés. Mais la logique de parti l’emporte sur le souci du pays : l’UMP lutte pour sa survie. Le FN a entamé une longue marche qui vise peut-être la victoire après un second mandat d’opposition. Pendant ce temps, les Français qui ont conscience des retards et des déficits accumulés après des décennies d’alternance calamiteuse, et votent « à droite », risquent une fois de plus d’attendre le miracle d’un élu qui ferait ce qu’il a promis de faire.

Voir en ligne : http://www.christianvanneste.fr/201...