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Carlos Ghosn, l'homme révolté

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« Carlos Ghosn, l’homme révolté »

J’avoue : Carlos Ghosn me devient sympathique. Jusqu’alors, l’ex-patron de Renault-Nissan m’apparaissait répulsif dans son avidité pour le fric accumulé, sa morgue d’autocrate, son goût pour le paraître, la mesquinerie de certains de ses comportements. Mais depuis sa rocambolesque évasion du Japon, où la Justice le tenait en liberté surveillée dans des conditions honteuses, je découvre un indigné qui a toute mon admiration et ma solidarité. Ghosn donnera plus de détails sur sa fuite ce mercredi en début d’après-midi, lors d’une conférence de presse organisée à Beyrouth. Pour ma part, je trouve normal et sain qu’un homme broyé par une machine judiciaire d’un autre âge cherche à reprendre sa liberté. "Je n’ai pas fui la justice", a-t-il expliqué. "Je me suis libéré de l’injustice et de la persécution politique". L’évadé avait été arrêté au Japon le 19 novembre 2018. Il était assigné à résidence depuis 8 mois, après avoir connu une longue incarcération humiliante, motivée par des soupçons d’abus de confiance et de minoration de revenus aux autorités boursières japonaises. Je trouve que l’honneur de la France aurait été d’accueillir son ressortissant, qui a également les nationalités libanaise et brésilienne. Au lieu de cela, à en croire un de ses avocats, Me Jean-Yves Le Borgne, Goshn n’a cessé de subir l’"hostilité constante" de Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie. Une hostilité dont le mobile serait, selon l’avocat, de "plaire à la France des Gilets jaunes" (Le Figaro Economie, ce mercredi). La position de Le Maire manque en tout cas de panache.

En réalité, il y a une filiation entre Ghosn et les Gilets jaunes, en dépit de ce qui sépare et oppose ces deux mondes. Le lien tient dans ce refus commun de subir des décisions arbitraires dénuées de considérations pour les gens. Etre riche n’est pas une présomption de culpabilité, quand le respect des personnes est bafoué. Rappelons que le droit de "résistance à l’oppression" est un des quatre droits naturels et imprescriptibles de la Déclaration des Droits de l’homme de 1789. Celle de 1793 prévoyait même un droit à l’"insurrection" quand le gouvernement "viole les droits des peuples". De ce point de vue, la gauche pavlovienne qui accable Ghosn en ne voulant y voir d’un méchant patron arriviste tient le même raisonnement que les épurateurs. Ghosn, dans sa rébellion contre un système liberticide, retrouve une part de l’humanité qu’il avait perdue dans ses hautes fonctions. Il n’est pas question qu’il se dérobe à ses responsabilités pénales s’il en a. Mais l’homme révolté n’est pas moins respectable que les Oubliés qui entendent reprendre leur destin en main. D’ailleurs, Jean-Luc Mélenchon n’est pas tombé dans la facilité de la chasse à homme. Mardi, le leader de la France Insoumise a déclaré, sur Europe 1 : "Les droits de l’homme et les droits de la défense ne s’appliquent pas en fonction de critères de classes. Carlos Ghosn y a droit comme tous les autres. La maltraitance à laquelle s’est livrée la justice japonaise est inacceptable."

Liberté d’expression par Ivan Rioufol

Voir en ligne : http://blog.lefigaro.fr/rioufol/202...