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Anthologie

, par  FERNON Jean-Paul , popularité : 8%
Cet article provient d'une source externe à NJ sans autorisation mais à titre d'information.

NOTRE DRAPEAU (Renée CHALENÇON)

Tu les connais les trois couleurs,
Les trois couleurs de Notre France
Qui ont tant fait battre les cœurs,
De Gloire et d’Espérance ;
Bleu céleste couleur du jour,
Rouge du sang de nos Amours,
Blanc Franchise et Vaillance !
Flottant sur nos écoles, nos lycées, nos mairies
Fanal tricolore de notre appartenance.
Marseillaise en tissu aux couleurs de la France,
Nous étions ses Enfants, Enfants de l’Algérie !!
Le Drapeau sur les barricades
Tressaillait comme un guerrier franc,
Et du bled jusqu’à la bourgade,
Des plus jeunes à la vieille garde,
Comme aux jours du Débarquement :
Toujours premier ! Toujours devant !
Dans la mêlée qu’il était beau,
Même en lambeaux,
Tout étoilé de votre sang !!
Ils sont morts en le défendant
Ô sublime folie !
Un jour, ils seront triomphants
Nos Morts que la France a trahis !!
L’Histoire revient toujours dicter SA VERITÉ !!
Et nos enfants sauront : des labours à la guerre,
Alsaciens, Espagnols, Catalans ou Maltais :
Le prix du sang versé, des harkis, de nos pères !
Car le Drapeau garde en ses plis
L’Âme Vraie de Notre Patrie !!

ORAN S’ENDORT (Jean-Marie TINTHOIN)

ORAN s’endort…
aux sons nasillards et aigus des raïtas arabes,
au rythme très lent des tobeuls…
Dans la blanche clarté du soir qui l’enveloppe,
on distingue mal les flèches des clochers de nos églises
de la silhouette des minarets…
Communion étroite et muette de deux peuples
qui se confondent dans un calice d’air pur
et de moites senteurs de la nuit…

Oran s’endort…
comme lentement bercé par la mélopée,
si douce de al brise de mer…
de la brise de mer si âpre au goût,
mais si parfumée du baume des pins,
des pins… noire coulée d’ombre
qui descend le long de la colline...
Au loin, l’indigo de la mer,
argentée par endroits des reflets de lune,
apporte un souffle de nostalgie.

ORAN s’endort…
comme son peuple, insouciant de ce que sera Demain…
insouciant et fataliste…
L’immense ruche, trépidante
de vie brillante et insatiable, pendant tout un jour,
s’est immolée au silence de la nuit…
Lentement, les derniers feux de la ville arabe,
les plus longs à mourir,
s’éteignent dans le soir…

ORAN s’endort…
La fumée des foyers de bois vert
a emporté, avec elle, le dernier souffle de vie…
C’est l’heure où, grisé par le vent de mer,
le grand silence apporte un poème d’éternité,
avec l’apparition subite des « djinns ».
C’est l’heure où l’âme s’envole,
pour se confondre avec la brume du soir…
la brume légère du soir qui enveloppe, légère,
la coupole immense des milliers de terrasses blanches..

ORAN s’endort…
Et oui… il faut le reconnaître,
il y a du charme, dans ce pays « chaud »,
aux teintes « chaudes », aux langages gutturaux,
nuancés comme les appels des raïtas et des tobeuls…

ORAN s’endort…
mais l’homme, cet éternel mécontent
se lasse vite de tout… et je connais tellement tout cela !...
Depuis ma « tendre » enfance,
j’ai été bercé par les sons lointains
de cette musique nostalgique, aux accents plaintifs,
j’ai été enivré par le parfum du « cahoua »,
du thé, du bois vert, mêlé à celui,
plus âpre et plus prenant qui s’exhale du Vent de la mer…

Tout cela, ça fait trop oublier la réalité, la triste réalité…
Il faut avoir été l’enfant de cette terre,
pour pouvoir comprendre
tout ce qu’il y a de décevant, de cruel en elle
... et pourtant, on ne peut pas l’oublier,
on ne peut pas s’en détacher,
sans avoir l’impression de la trahir…
… Et pourtant…..

EXOTISME (Jean-Marie TINTHOIN)

Terre imprégnée de mélancolie, où l’on respire le pin,
Le pin qui se joue d’une brise capricieuse,
Le pin vert sombre et la mer bleu d’étain,
La mer bercée de ses vagues paresseuses…

Terre où les rêves ressemblent à l’azur,
L’azur de tes cieux de douces chaleurs,
Eclatant de lumières et d’un bleu trop pur,
Où tes yeux se ferment sous un rythme enchanteur…

Terre de couleurs chaudes, injectée de sang,
Où vient mourir ton regard de profane…
Terre qui s’embrase au soleil couchant,
Comme le feu dont s’allume ton ciel de gitane..

Terre aux regards terriblement mystiques,
Aux regards qui fascinent et qui tuent
Le poète, trop confiant, que tu piques,
Impitoyable et cruelle, pour le vaincre.

Terre nuancée, comme les appels d’une lyre,
Sous l’aspect dévasté de tes ruines antiques,
Où la broussaille cache un sourire,
Le sourire étrange d’un mausolée aristocratique..

Terre d’ombres éclatantes et de clartés éteintes,
Palette de contrastes et d’énigmes,
Qu’un pinceau ivre a barbouillée de teintes,
Des teintes qu’aucun artiste n’exprime

ADIEU ORAN (Jean-Marie TINTHOIN)

Dans le port d’Oran
les cheminées des steamers
du dernier voyage
rejettent leur fumée blanche,
comme un foulard
qu’une main agite,
du bout des doigts,
et la houle qui les balance
ressemble à un sanglot.

Adieu Soleil
Adieu terre brûlée
ma terre
Adieu marabout blanc
sur la colline
et toi, Vierge de ce peuple
de ce peuple sacrifié, exilé,
et qui part, brisant ses attaches et sa vie
vers l’exil.

Adieu Vierge de ce peuple,
Adieu Santa Cruz,
Vierge de la peste,
de la peste, de la prière,
des ex-voto par milliers,
témoins fragiles,
de la pitié des petits peuples,
de ceux de labeurs quotidiens
et qui ont uni leurs mains
vers toi qu’ils ont vénérée
tant d’années
en processions et pèlerinages.

Adieu ma terre
ma terre des oliviers…
toujours des oliviers
à l’heure du sacrifice.
Adieu les sentiers de rocaille
qui cheminent
à travers les oliviers
avec les petits ânes gris.

Adieu, Oran, ma belle,
tes accents d’Andalouse,
tes chants de l’Orient,
tes marchands de bonheur,
tes maisons blanches,
tes rues chaudes.

Adieu Oran, ma belle,
tes églises,
tes synagogues,
tes mosquées,
ta foi naïve et sincère,
tes contrastes,
tes enthousiasmes,
tes contradictions…

Les steamers de l‘Adieu
ont franchi la passe
et leur fumée blanche
s’est perdue à l’horizon…..

ORAN (Paul BELLAT)

Oui, je la chanterai, la ville méprisée,
Si noble en son jupon troué de gitane
Avec ses yeux meurtris, avec sa peau bronzée
Et ce pic où jadis l’Espagne culmina.

Je dirai les reflets changeants de sa falaise
Les aurores de nacre et les midis dorés
Et les couchants qui la couvrent de rouge braîse
Et l’encens qu’à ses pieds versent les flots moirés.

Je dirai la Calère et le coin d’Italie
Où l’on entend le soir des airs napolitains,
Où les couples unis sous la lune pâlie
Mêlent à leurs baisers des rires argentins.

Je dirai la splendeur du beau golfe où se mirent
Les sévères donjons du vieux Rosalcasar
Les jardins de Létang où la brise soupire
Etalés au soleil comme un frileux lézard.

Et tous ces murs puissants dont te dota l’Espagne
Blasonnés de gueules au lion passant d’or
Et les noirs souterrains rampant sous la campagne
Et le haut Murdjadjo, sublime mirador.

Et tes grands boulevards déferlant vers la plaine
En cercles élargis, submergeant les faubourgs,
Tes casernes qui sont de héros toujours pleines
Où des échos lointains répondent aux tambours

Que d’autres fassent fi de ton Hôtel de Ville !
Il atteste la France avec sa sérénité,
Deux lions orgueilleux de sa gloire civile
Proclament sa présence et sa pérennité.

Et les lions de bronze et les blondes Victoires
D’un obélisque fait du granit le plus pur,
Célèbrent à jamais, France, ta double victoire :
Guerrière du passé, prêtresse de l’azur.

Et partout, même au pied de tes sombres bastilles
Dans tes jardins, à l’heure où finit le travail,
Qui donc n’a remarqué la beauté de tes filles
Leurs yeux de flamme et leurs lèvres de corail ?

Qui n’admire sur tes grands stades et tes pistes
La force de tes fils et leur ardeur au jeu ?
Hélas ! et qui n’a lu dans le marbre les listes
Tragiques de tous ceux qui sont tombés au feu

Des noirs combats, durant les affreuses années ?
Oui, combien sont tombés ! combien tombent encor
Sur tous les points du globe où l’alerte est donnée !
Chaque fois qu’on entend Roland sonner du cor…

ORAN, que l’Aïdour coiffe d’un diadème !
ORAN, reine des cœurs humbles et dévoués !
Ta beauté, ta bonté, ta douceur, je les aime
Et ton accueil et tes beaux rires enjoués !

J’aime tes habitants, tes fécondes familles,
Cet accent spécial que l’on raille en Alger,
Tant d’amour frémissant sous tes brunes charmilles !
Tant de poètes nés parmi tes orangers !

Et les essaims d’enfants joyeux que tes écoles
Lâchent deux fois par jour sur les trottoirs étroits,
Classes où l’on attend que les heures s’envolent,
Gais retours au bercail quand le soleil décroît.

Grandis pour accomplir ta haute destinée,
Rivale de Marseille et de Naples, grandis !
Ta gloire éblouira la Méditerranée.
Elle a déjà franchi les déserts interdits

ORAN JANVIER 1962 (Christine LLOPIS-PRÉVOST)

Sur Santa-Cruz, le soleil tend sa pourpre d’or,
Et cependant tu parais sommeiller encor…
Bientôt tu secoueras ta langueur somnolente.
Alors, ORAN, tu apparaîtras toute vivante.

Tes quartiers achalandés sembleront toujours
Nous emporter très loin, dans une éternelle liesse,
Et nous nous baignerons dans votre constante ivresse,
Gambetta, Maraval, berceau de nos amours.

Tes rues bordées de néon resplendissent le soir,
Et j’aime contempler leur majesté sereine.
Tes enseignes lumineuses font tout pour m’émouvoir,
Car près de tes sœurs d’Algérie, tu es la Reine.

Près de toi, Alger, Bône, Blida, Bougie,
Et tant d’autres encore dont j’ai oublié le nom,
Toutes, ORAN, près de toi, semblent souffrir d’anémie,
Lorsque tes belles se mettent à leurs balcons.

Fort de Santa-Cruz, te rappelles-tu l’histoire
De notre Cité et de nos ancêtres espagnols ?
A tous, tu dois la raconter dans la nuit noire,
De même qu’aux cigognes dans leurs interminables vols.

Toi, ô combien Sainte Basilique, tu fus construite
Parce que nous en fîmes le vœu si nous échappions
Au choléra. Or, du haut de tous ces avions
Qui survolent le Murdjadjo, nous te voyons si vite.

Mais si nous suivons le sentier tout sinueux
Qui mène à ta crête, nous admirerons ton dôme
Tout en nous soumettant, ô Madone, à ton dogme.
Devant un tel prodige, nous rendrons grâce aux Cieux.

Mais nous devons t’admirer aussi, toi, Mosquée
Du Pacha. De tes fontaines s’écoulent les eaux fraîches
Et miroitantes ; tandis qu’elles bruissent dans ton bosquet
Leur divin murmure nous parvient par quelque brèche.

Quel Oranais digne de ce nom n’a parcouru
Les sombres et tortueuses rues de la Calère ?
Quelle Oranaise n’a frissonné sous l’ombre légère
des palmiers du Front de mer, et qui n’a connu

Les diverses caches de ta Promenade de Létang ?
Qui n’a parcouru ta sinueuse rue Philippe,
Vu ce « home » des amoureux quand le soir descend
et ces couples enlacés qu’aurait décrit Ménippe ?

La Calère ! tu es le cœur même du Vieil Oran,
Et lorsque par tes rues tortueuses on déambule,
Et que tout là-haut Notre Dame veille sur nos rangs,
Ton fort solitaire, son histoire récapitule.

Ton port grouille et vibre d’une activité stridente :
Paquebots et frêles embarcations s’y côtoient.
Tout démontre que tu restes malgré tout bien vivante
Et c’est pour te garder française que l’on combat.

Quant à vous, Casino de Canastel, Pinède,
Côte Turquoise, Aïn-el-Turck, Andalouses et Genêts,
Toi, Montagne des Lions, ô Canastel, comme l’aède,
A vanter vos charmes, je ne me lasserai jamais !

Vous êtes, pour moi, la halte
Rêvée quand, après avoir marché sans arrêt,
Je viens m’asseoir au bord de l’asphalte,
C’est le paradis terrestre qui s’ouvre à mes pieds.

Vois-tu, je rêve d’une ville à l’aimable visage
Où tout le monde serait censé être sage ;
les amoureux pourraient s’y promener la nuit
En regardant sur Santa-Cruz la lune qui luit.

J’espère que cela ne sera pas un mirage,
Malgré que l’on éprouve pour toi soif et rage.
Cependant, O ma ville, le jour approche, sois certaine ?
Où de tous tes feux tu brilleras, sereine.

Tes habitants auront retrouvé la gaieté.
Et alors, tout comme au bon vieux temps du passé,
Tous pourront à l’unisson dire que tu es belle,
ORAN, ma bien aimée, ma tendre jouvencelle.

AUX ARMES D’ORAN (Mme A. MARAVAL-BERTHOIN)

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Avec leurs rayons d’or sur fond d’azur, nos armes
semblent symboliser ce qui fait la beauté
de l’antique et farouche et brûlante cité
dont le soleil est le sultan buveur de larmes.

Avec les deux lions, debout pour terrasser
l’ennemi qui voudrait qu’on plie ou qu’on abdique,
gardiens des tours d’argent d’un domaine héraldique,
Nous savons demeurer debout, le cœur blessé.

Avec le fier croissant, choisi par le Prophète
pour célébrer Allah en pays musulman,
Nous voyons s’éveiller, à la voix de l’Iman,
des guerriers dont la poudre est la chanson de fête.

Avec le clair vaisseau qui brave les antans,
au-dessus des blasons d’Islam et de Castille,
Se dresse dans la nef, à la blanche écoutille,
le progrès qui rayonne et domine le temps…

Et je pense soudain à ce qu’il tient de choses
dans ce blason d’Oran où l’azur et le sang
font un ciel de lumière ou de soir frémissant
au passé qui s’endort dans des apothéoses…

Ah ! tel le coq gaulois qui claironne sa joie,
Campé sur ses ergots pour saluer le jour,
Nous voulons, nous aussi, saluer tour à tour
Chaque aurore brodée et d’épis et de soie.

AMERTUME (Christine LLOPIS-PRÉVOST)

Le vent mutin, un brin musicien
M’apporte, de bien loin, l’écho
Des rires et des chants anciens
De là-bas, de notre Eldorado.
Là-bas ! Quel là-bas ?
Nos ancêtres l’avaient créé,
On nous a menti, spolié, bafoué.
Là - bas ? Nous n’en avons pas.
Il paraît que j’ ai gardé son accent
Ensoleillé, aux sons rocailleux.
Mon accent, quel accent ?
Il dort là-bas, près de nos aïeux.
Les jours, les mois, les années passent.
On ne veut toujours pas de nous ici.
Nos rangs se raréfient !
Mais les souvenirs point ne s’effacent

RIVAGE D’ORANIE (Jocelyn PERPIGNAN )

Assis sur un rocher j’écoute bien souvent
L’enivrante chanson de la Mer et du vent.
La mer est à mes pieds, si bleue, belle et immense
Comme elle me fait rêver : je la regarde et pense.
Elle étanche ma peine en douceur et sans peine
Quand parfois j’épanche ma douleur et l’entraîne !
Un vague murmure venant des vagues, oh !
Infini et vivant petit clapotis d’eau.
Monotone et prenant est son refrain qui traîne,
C’est la douce chanson d’invisibles sirènes.
Mais je regarde au sud, au-dessus de l’écume,
Une terre là-bas, apparaît dans la brume.
Cette mer caressant la côte d’Algérie
Vient rouler les galets de mon pays chéri.
C’est ma terre natale et c’était ma patrie :
Pour elle je n’avais que de l’idolâtrie !
C’est mon " Île " perdue, loin de moi, éthérée,
Ne sachant toujours pas si je la reverrai.
J’ai tout laissé là-bas, mes plus belles années
De l’autre côté de la Méditerranée !
Et bien qu’il m’ait trahi, et bien qu’il m’ait banni,
Je n’oublierai jamais mon pays d’Oranie.
Je n’oublierai jamais cette ville d’ORAN
Pour tous mes souvenirs, un hommage lui rends.
Je n’oublierai jamais son merveilleux rivage
Que j’ai souvent longé, à pieds ou à la nage :
De la ’Pointe d’Aiguille’ aux criques de ’Kristel’,
Des genets du ’Cap Roux’ au plat de ’Canastel’ ;
Des Falaises d’Oran aux mains de ’Notre Dame’
Protégeant le ’Vieux Port’ où j’ai fait de la rame ;
Du haut de ’Santa Cruz’ au ’Rocher de la Vieille’
Où le paysage est une pure merveille ;
Du sable de ’Trouville’ humecté par la mer
Où le soleil et l’eau se mariaient à la terre ;
Des plages ’d’Aïn el Turck’, au bout du ’Cap Falcon’,
De ses sables dorés frôlés de mon balcon ;
De ses fenouils de sable aux asperges du Phare
Qu’un jour m’y promenant, j’ai trouvées par hasard !
Et puis ’les Corales’, aussi ’les Andalouses’,
Et toi belle ’Île plane’ que la mer épouse !
Et vous ’Les Habibas’ en face du ’Cap Blanc’,
Vous reverrai-je un jour et pour tout dire : quand ?
Alors ces souvenirs qui viennent m’assaillir
Me font tergiverser : l’aimer ou la haïr ?
Car ayant tout perdu, de tout mon paradis,
Il ne me reste plus que son nom : ORANIE !

Lien : Corniche oranaise

PREMIER AMOUR (Jean-Luc MOREAU)

Ils marchaient lentement sur la plage déserte,
Comme font les enfants se tenant par la main ;
On eût dit qu’une porte au ciel se fût ouverte
Dont l’étoile du soir leur montrait le chemin ...
La forme de leurs pieds s’imprimait sur le sable :
Ils cheminaient toujours et ne soupçonnaient pas
Que déjà, derrière eux, les vagues inlassables
Effaçaient doucement la trace de leurs pas.

SYRACUSE (Jean-Paul TADDEI - Saint-Florent (Corse))

J’aimerais tant voir Syracuse
L’île de Pâques et puis ORAN
Et mes Arabes qui s’amusent
Leurs blancs burnous sous le vent
Voir les jardins de Babylone
Et le palais du grand Lama
Retrouver mon copain Bérone
Au sommet du Fuji-Yama
Voir le pays du matin calme
Aller pêcher au cormORAN
Et m’enivrer de vin de palmes
Pour remercier tel un orant
Avant que ma jeunesse s’use
Et que mes pas délaissent la muse
J’aimerais tant revoir ORAN
Pour en rêver à SAINT-FLORENT

LYCEE LAMORICIERE (Jean-Paul TADDEI)

Années bénies, temps des fifties
Matches de foot, surprise-parties
Au mois de mai dans les vieilles turnes
Travaillons dur et sans cothurne
La mer brasillante à l’accore de Kristel
S’étend majestueuse, cligne sous Canastel
Caresse la jetée, salue Mers-el-Kebir
Monte du minaret la prière "Allahkbir"
Et Roustan, Esclapez, Nicoli, Lalaoui
S’escriment en Latin. "Rosam ? Ah là, oui"
’’L’armée romaine en ligne ; alors qui le dit ?"
"Très facile ... host, hostis" nous répond Ould Kadi
Lors le censeur passe, surveille ces potaches
Il a l’œil aux aguets car difficile tâche
Après les feux éteints, par dessus le grand mur
Quelques bougres enfiévrés filent quartier Lamur
"Aujourd’hui la compo, j’ai fait quelques impasses"
"T’inquiète … j’ai dans la manche certains tours qui passent"
"Prendre un tel risque et que nos cous se rompent !"
"Je te le dis ... sois calme ... mon sarrau sent la pompe"
Or nous aimions nos profs : Roustouil, Fatmi, Salesse
Tous gant de velours qui maintient bien la laisse
Car leur pédagogie en ces temps vertueux
Faisait de grands enfants des élèves bienheureux
Voici venir juin, nonchalant et placide
Mais Baccalauréat a une saveur acide
Chut ... chut ... écoute ... admissible, puis reçu
Que peut bien égaler ce grand bonheur perçu
Il nous faut donc quitter le lycée de notre vie
Et l’âge étant là, le revoir. .. quelle envie !
Mais tu es dans mon cœur pour encore bien longtemps,
LYCEE LAMORICIERE ... le vent emporte autant

IL EST...DES SOUVENIRS QUI SE NOMMENT ESPOIR (Danièle MATAIX-DEME)

Il est des soirs étranges
Tout remplis de beauté.
C’est comme le chant des anges
Dans une nuit dorée...
Il est des jours d’ennui
Tout remplis de tristesse.
C’est comme une longue pluie
Dans les coeurs en détresse.
Il est des matins clairs
Où le soleil sans fin
Inonde de sa lumière,
Illumine nos destins...
Il est des soirs tout noirs,
Des soirs où nulle joie
N’atténue nos désespoirs ...
Des soirs sans paix ni foi.
Il est des soirs de souvenirs
Où l’âme évoquant le passé
Retrouve le sourire
Des belles nuits d’été...
Des soirs où dans les yeux
Brille la lumière
De ces jours heureux
Caressés par la mer ...
Et ces soirs-là, j’entends
Les vagues sur la grève ;
Et ces soirs-là, le temps
S’arrête comme un rêve !

MON FLEUVE D’ENFANT .... (Henri BELASCO)

Dans mon fleuve d’enfant il ne coulait pas d’eau.
Ses rivières affluentes ou encore les ruisseaux
Qui s’y jetaient ne charriaient que la lumière
D’un soleil blanc, sans ombre, désintégrant les pierres...
Et jamais animal ne s’y désaltéra.
Aucun vert pâturage jamais ne le borda,
Ses galets immobiles semblaient couler sans fin
Entre des gorges ocres, sans bords ni sable fin.
Dans le lit de mon fleuve vivaient des scorpions
Mais aussi des oiseaux ... jamais aucun poisson.
Et puis soudain mon fleuve était torrent
Colorant la mer bleue d’un nuage oppressant,
Arrachant tout, la terre, les épineux, les ponts,
Le berger imprudent ainsi que ses moutons...
Et pourtant je l’aimais mon fleuve, pour sa beauté,
Sa puissance, sa rage, ... son immobilité.
Comment imaginer que sous d’autre cieux
D’autres fleuves pouvaient couler, majestueux ?
Dans mon fleuve, aujourd’hui, il ne coule pas d’eau,
Mais il charrie le sang et il y coule en flots.
Je ne l’avais pas dit ? Pardonnez mon oubli.
Mon fleuve est un oued ... là-bas... en Algérie.

MON ACCENT (Jeanne DARMON)

J’ai gardé mon accent… celui d’une Oranaise.
Avec lui, croyez-moi, je me sens très à l’aise.
C’est sûr, je parle mal… sans trop me corriger
Que voulez-vous, chez nous… nous étions mélangés
en race, en religion… chantant « La Marseillaise »
car nous étions tous liés par l’Algérie Française.
Rachel ou Consuelo…, Mohamed et Bernard
se bagarraient parfois, mais c’étaient des fêtards … !
même les plus instruits estropiaient les mots
dans un vocabulaire… plutôt « fortissimo » !
Alors, c’est obligé qu’on garde cette empreinte.
Pourtant lorsque j’écris, c’est plus en demi-teinte.
En Oranais je dis que je fais « entention »,
mais là, sur mon papier, j’ai d’autres munitions,
je réfléchis un peu et, le dictionnaire m’aide.
En parlant… ça va vite et les mots se succèdent.

Bref ! Je suis comme je suis, oui…,déjà je suis vieille,
pour ne pas m’écouter, bouchez-vous les oreilles.
C’est tout ce qui me reste avec mes souvenirs.
Laissez-moi mon accent, pourquoi m’en démunir ?

L’ACCENT DE LÀ-BAS (Anonyme)

Oh ! Mon Dieu, ils m’ont tout pris : mon pays, ma maison, mon ciel bleu,
mes djebels et ma petite église.
De mon pays perdu, il ne me reste plus que l’accent.
Seigneur, faites que le temps qui passe
ne me prenne pas mon accent !

Ce n’est pas que l’accent de Provence
ne sent pas bon le thym et la lavande !
Ce n’est pas que l’accent du Nord n’est pas noble et généreux !
Ce n’est pas que l’accent de Paris n’est pas beau !
Mais le mien, Seigneur, c’est tout ce qui me reste de là-bas.

Parfois, il y en a qui me disent que mon accent, il sent la merguez.
Ils ne savent pas ces ignares qu’au lieu de me vexer,
ils remplissent mon cœur de joie.
Oh ! Seigneur,
faites que le temps qui passe ne m’efface pas mon accent !

Parce que, vous savez Seigneur,
cet accent là,
c’est l’accent de mon père qui m’a tout raconté,
et qui, à Monte-Cassino, a crié à ses tirailleurs
"Allez ! Larby, allez Mohamed, en avant nous zôtres pour la France"
Cet accent-là Seigneur,
c’est aussi l’accent de mon grand-père
qui a crié à Verdun à ses Zouaves
"Allez ! Pépito, allez Rénato, baïonnette au canon et vive la France"

Si le temps me prend mon accent,
comment je vais faire, mon Dieu,
pour raconter à mes petits enfants avec l’accent de Paris,
comment c’était chez nous zôtres ?

Vous m’entendez Mon Dieu, moi, avec l’accent d’ici,
leur dire comment criait le marchand de légumes
dans les ruelles de chez nous ?
Le marchand de calentica à la rue Fondouk à Oran,
le marchand de sardines ou encore le marchand de beignets à la rue d’Arzew,
le marchand de bliblis place du gouvernement à Alger,
et le marchand de zalabias d’El Kantara à Constantine ?

Ce n’est pas que l’accent d’ici n’est pas joli,
mais Mon Dieu,
vous m’entendez leur dire les gros mots
que l’on disait à Galoufa l’attrapeur de chiens
avec l’accent de Paris, Marseille,ou de Lyon ?

Alors, Seigneur, je vous en supplie,
laissez-le moi encore un peu cet accent de là-bas,
L’Accent de mon pays perdu.

Voir en ligne : http://alysgo-apollo.org/coups-de-c...