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Pour une énergie abondante, retenons les leçons de l’Histoire

, par  Samuele Furfari , popularité : 6%
Cet article provient d'une source externe à NJ sans autorisation mais à titre d'information.

Un article de Conflits

Emmanuel Macron n’a pas retenu la leçon que Clemenceau a apprise à la dure. Reagan a appris celle de Churchill . Faute de solution à la crise des prix de l’énergie, crise dont il a largement contribué à la création, le président de la République française, M. Emmanuel Macron , n’a rien trouvé de mieux que de plaider pour la décroissance, puisqu’il décrète la fin de l’abondance.

Il faut dire qu’il a eu d’illustres prédécesseurs qui ont également succombé au pessimisme de cette rengaine.

La première annonce de la fin de l’abondance de l’énergie

Il y a presque un siècle, Calvin Coolidge, président des États-Unis, était lui aussi convaincu que la fin de l’abondance pétrolière était arrivée. L’augmentation de la demande de pétrole créée par le remplacement des véhicules électriques par des véhicules à essence, notamment la Ford T produite à partir de 1908, a conduit certains experts à penser que la fin de l’abondance du pétrole était arrivée. En 1924, pour faire face à l’annonce de la fin de l’abondance, le républicain Coolidge met en place une série de politiques et de mesures de contrôle de la vie que les démocrates d’aujourd’hui ne renieraient pas.

Les secrétaires à la Guerre, au Commerce extérieur, à la Marine marchande et aux Affaires intérieures ont pris des dispositions pour gérer la fin de l’abondance annoncée. Bien entendu, cette stratégie prônait la conservation de l’énergie en créant une agence spécifique, le Federal Oil Conservation Board. Ils ont également créé une agence pour gérer la fin de l’abondance en décidant qui pouvait recevoir des quotas de pétrole distribués avec parcimonie. Bien sûr, les auditions publiques et les rapports se multiplient. Comme aujourd’hui, ils ont couru comme des poulets sans tête pour faire face à la peur de la fin de l’abondance.

Puis vint la solution. Pas celle des politiques. Celle des ingénieurs et des géologues.

La solution aux peurs de la fin de l’abondance

Dad Joiner et son géologue A.D. Lloyd ont découvert, grâce à la collaboration de la science et de la technologie, la richesse pétrolière de l’est du Texas, une région qui produit encore abondamment aujourd’hui et qui croit en l’avenir des hydrocarbures depuis que le gaz de schiste est venu s’y ajouter en abondance.

Ils en sont tellement convaincus que l’État du Texas a décidé de ne plus travailler avec les banques qui, dans le cadre de leur politique EGS, ont annoncé qu’elles allaient désinvestir dans les entreprises de combustibles fossiles. Le Texas sait que cette richesse énergétique est abondante. D’ailleurs, certains Texans appellent même l’État à quitter les États-Unis, estimant que ces derniers risquent une dérive économique en raison de la politique de décarbonisation et de la fin de l’utilisation des abondantes énergies fossiles.

Depuis 98 ans, malgré le fait que chaque annonce de la fin de l’abondance pétrolière soit démentie, les antiphones de la fin de l’abondance refont surface. La fin du pétrole viendra un jour, tout comme la fin du charbon dans le Nord-Pas-de-Calais ou dans ma ville natale de Charleroi. Pourtant, dans ces sous-sols, le charbon est encore abondant, mais il n’a aucun sens économique. Tant que le monde n’aura pas trouvé une véritable alternative aux produits pétroliers, l’abondance du pétrole se poursuivra, car les réserves sont un concept économique qui dépend de la technologie et du prix. Ce sont eux qui déterminent l’abondance, pas un homme politique, même s’il s’agit d’un président.

La fin de l’abondance de Georges Clemenceau

Quelques années avant la panique de Calvin Coolidge, Georges Clemenceau, président du Conseil français, a lui aussi tremblé. La Première Guerre mondiale a révélé à quel point l’imprudent État français s’est retrouvé dans une situation de pénurie énergétique. Winston Churchill et l’amiral Lord Fisher avaient prudemment planifié l’approvisionnement en pétrole de la Grande-Bretagne pour faire face à la guerre.

Le 1er août 1912, le roi George V publie au journal officiel un texte clair sur l’objectif final.

« Considérant que nous avons jugé opportun qu’une commission fasse immédiatement rapport sur les moyens d’approvisionnement et de stockage du combustible liquide en temps de paix et de guerre et sur son application aux moteurs des navires de guerre, que ce soit indirectement ou par combustion interne. Sachez maintenant que Nous, ayant une grande confiance dans vos connaissances et vos capacités, avons autorisé et nommé, et par les présentes, nous vous autorisons et nommons ledit John Arbuthnot, Lord Fisher (Président) ».

Comme Macron aujourd’hui, Clemenceau ne l’a pas fait. À l’époque comme aujourd’hui, la France a douloureusement découvert son ignorance de la géopolitique de l’énergie. Elle n’avait pas perçu le rôle stratégique du pétrole et s’est donc trouvée dans une position difficile. Aujourd’hui, il ne s’agit pas seulement de pétrole, mais aussi de gaz et d’électricité.

L’armée française n’était pas préparée à une guerre de mouvement, elle a négligé l’approvisionnement en carburant liquide. En 1914, les approvisionnements de l’armée française en essence et autres équipements automobiles sont énumérés au chapitre 53, intitulé « Nourriture pour les hommes et les chevaux ». En outre, la France ne peut pas acheter de pétrole à la Roumanie ou à l’Empire ottoman. Le fournisseur américain habituel, la Standard Oil Company du New Jersey, avait arrêté ses livraisons afin d’éviter que ses pétroliers ne soient coulés par la marine allemande. En 1917, en pleine Première Guerre mondiale, la prise de conscience est très douloureuse. Tout comme aujourd’hui l’Europe est stupéfaite de découvrir sa vulnérabilité ; la France de Clemenceau gémit.

Georges Clemenceau demande au sénateur Henry Berenger, président du Comité général des pétroles, d’élaborer une stratégie pour l’approvisionnement de la France en produits pétroliers.

Il déclare :

« La question du pétrole et de l’essence, plus que jamais, ne peut se limiter à une simple affaire d’intérêts privés. Elle devient de plus en plus une question d’importance nationale. Plus largement encore, c’est une question de politique internationale. »

Churchill l’avait compris cinq ans plus tôt. Aucun Européen moderne ne l’a saisi. Vladimir Poutine l’a compris et, à la guerre comme à la guerre, il utilise l’arme de l’énergie pour contre-attaquer l’UE.

En décembre 1917, Clemenceau a dû faire appel au président américain Woodrow Wilson.

Il écrit :

« Une rupture de l’approvisionnement en pétrole entraînerait la paralysie immédiate de nos armées, et pourrait nous contraindre à une paix défavorable aux Alliés. La sécurité des Alliés est en jeu. Si les Alliés ne veulent pas perdre la guerre, ils ne doivent pas permettre que la France manque, au moment de la grande offensive allemande, du carburant qui est aussi nécessaire que le sang dans les batailles de demain. »

Le président Wilson intervient personnellement auprès de l’United States Shipping Board, un organisme d’urgence créé en 1916 pour réglementer la navigation en temps de guerre. La société de Rockefeller, Standard Oil, allait livrer le carburant dont la France avait désespérément besoin. La guerre a révélé l’importance stratégique des produits pétroliers aux élites françaises. Suivant l’exemple de Churchill, un peu tard, mais pas trop tard, le président français Raymond Poincaré crée une société française pour produire du pétrole. La « Compagnie française des Pétroles » (CFP, qui deviendra Total) est créée en 1920 pour développer la production de pétrole sous contrôle français dans différentes régions pétrolifères. L’État français rachète les parts de la Deutsche Bank au Moyen-Orient. Ainsi, la France est entrée dans le secteur pétrolier avec les actifs des réparations de guerre et l’Allemagne l’a quittée pour ne plus y revenir. Consciente de son retard dans ce domaine crucial, elle a préféré miser sur les énergies renouvelables avec sa catastrophique EnergieWende .

Jimmy Carter et Ronald Reagan, deux politiques aux antipodes

Avant même la deuxième crise pétrolière de 1979, provoquée par l’Iran de l’ayatollah Khomeini, le président américain Jimmy Carter a ravivé la peur de l’abondance.

Dans un discours radiodiffusé en 1977, il déclarait un plan ambitieux pour faire face à la fin du pétrole en développant l’énergie solaire et promettait 20 % d’énergie solaire en 2000. Aujourd’hui, avec 1,56 exajoule, l’énergie solaire représente 1,7 % de l’énergie primaire utilisée par les États-Unis.

Il déclare :

« La crise énergétique ne nous a pas encore submergés, mais elle le fera si nous n’agissons pas rapidement. […] Le plus important dans ces propositions est que l’alternative peut être une catastrophe nationale. Tout retard supplémentaire peut affecter notre force et notre puissance en tant que nation. […] Les citoyens qui insistent pour conduire de grosses voitures inutilement puissantes doivent s’attendre à payer plus cher pour ce luxe. »

Comme nous le voyons aujourd’hui, la fin exige l’urgence et des mesures coercitives.

Son plan a été oublié par son successeur Ronald Reagan , qui a misé sa présidence sur le développement technologique.

Dès son élection, son entourage lui donne les conseils suivants que Churchill aurait appréciés :

« La bataille entre la réglementation gouvernementale et le marché privé n’est nulle part plus évidente que dans le domaine de l’énergie, où le marché dispose d’un avantage comparatif décisif. L’intrusion gouvernementale dans la production et l’utilisation de l’énergie fournit un exemple flagrant de la manière dont la réglementation nous coûte cher à tous. »

La négligence coupable des leaders européens

L’histoire se répète, mais les dirigeants d’aujourd’hui n’ont pas suivi de cours de géopolitique énergétique pour tirer les leçons stratégiques de Churchill et Reagan et assimiler les bévues énergétiques de Coolidge, Clemenceau et Carter. L’une des erreurs des dirigeants européens — et donc de M. Macron — a été de négliger, comme Clemenceau, la sécurité de l’approvisionnement énergétique. Cette impérieuse nécessité était pourtant au centre de la politique énergétique européenne il y a seulement vingt ans, sous la Commission Prodi-de Palacio.

On savait qu’on ne se passerait d’aucun type d’énergie (« aucun tabou » proclamait le Livre vert sur la sécurité d’approvisionnement énergétique d’octobre 2000) et qu’il fallait diversifier les pays et les voies d’approvisionnement. Les dirigeants qui ont suivi ont nié cette réalité comme des niais, en misant tout sur des énergies renouvelables inefficaces , coûteuses et imprévisibles tout en interdisant les centrales nucléaires, alors même que le traité Euratom impose à la Commission européenne de les promouvoir. N’oublions pas que c’est M. Macron qui, de manière souveraine, a fermé la centrale nucléaire de Fessenheim .

Une solution est possible, mais il faudra admettre l’erreur

Que devons-nous faire maintenant ? Quand on se trouve dans un cul-de-sac, on est obligé d’admettre la réalité et l’on doit opérer un demi-tour.

Dans ce cas il faut abandonner l’ostracisme nucléaire, non pas en s’en félicitant du bout des lèvres comme le fait la Commission européenne, mais en proclamant une relance dynamique et ambitieuse de toutes les activités nucléaires. Mais cela sera totalement insuffisant, car ce redéploiement nucléaire, aussi souhaitable et nécessaire qu’il soit, prendra du temps.

Il est donc urgent de réhabiliter les énergies fossiles, qui représentent 85 % de la consommation mondiale d’énergie primaire et 75 % de celle de l’UE. En particulier, le Parlement européen doit cesser de considérer le gaz naturel comme une passerelle vers l’avenir radieux des énergies renouvelables. Le gaz naturel est là pour être une énergie cruciale au cours de ce siècle. En fait, aujourd’hui, 70 % de celui-ci est indispensable pour des utilisations thermiques telles que le chauffage et la fourniture d’énergie thermique pour les processus industriels. Il faudra attendre longtemps avant que l’énergie nucléaire puisse remplacer ces utilisations, et oublions les éoliennes et les panneaux solaires pour ces utilisations.

Contrairement à l’UE et aux États-Unis de Joe Biden, la majorité des pays ne se soucient pas des rapports du GIEC, si bien que les émissions mondiales de CO2 ont augmenté de 58 % depuis qu’on a promis de les réduire. Commençons par annuler le cirque des COP qui n’ont servi qu’à donner à la Russie l’arme pour nous assommer. Dans les circonstances de 2022, maintenir la COP 27 à Charm El-Cheikh, prévue pour novembre 2022, est une offense au bon sens.

Les vrais dangers — et ils sont immédiats — sont la précarité énergétique des Européens qui ne pourront pas payer leurs factures d’énergie et la fermeture de nos entreprises faute d’une énergie bon marché et abondante. Le danger n’est pas la température globale calculée par un modèle numérique pour dans 80 ans.

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Sur le web

Voir en ligne : https://www.contrepoints.org/2022/0...