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La surconsommation d’administration, maladie mortelle de la France.

, par  NEMO , popularité : 5%
NJ-Ile de France

La fonction publique, c’est comme les médicaments : en surdose, on en meurt ou on finit grabataire.

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J’ai bien conscience que je ne vais pas me faire que des amis avec cette tribune, en particulier chez les lecteurs fonctionnaires, mais c’est pourtant une vérité qu’il faudra bien affronter, si ce n’est pas déjà trop tard... La France est intoxiquée, paralysée, étouffée par un excès d’administration, ce que la crise du corona virus a mis (une fois de plus) en évidence : la politique de l’autruche, dans ce domaine comme dans bien d’autres, qui a été la ligne directrice de nos gouvernants jusqu’à ce jour, avec la bénédiction, hélas, d’une majorité de votants plus préoccupés par leurs RTT que par l’avenir de la France, n’est plus tenable. Nous sommes l’un des pays au monde, sinon le pays du monde qui compte le plus de fonctionnaires. Je ne vais pas rentrer ici dans le détail, ni dérouler un inventaire à la Prévert de tous les métiers de la fonction publique, qu’elle soit d’état, territoriale ou hospitalière, qu’il s’agisse des entreprises publiques, de l’armée ou des organismes consulaires. Le public représente au bas mot 6 millions d’emplois (chiffre probablement minoré), sur une population active d’environ 30 millions, dont à peu près 3 millions au chômage, soit 22% des emplois.

J’avais lu une étude il y a quelques années, étude restée très confidentielle, et pour cause, qui montrait qu’il fallait 2 emplois marchands pour financer un emploi public... En comparaison, l’Allemagne compte moins de 5 millions d’agents publics (dont 37% seulement de fonctionnaires contre 75% chez nous) pour une population de plus de 80 millions. Et ne parlons pas des dépenses sociales...

Au moins, me direz-vous, vu ce que nous coûte la fonction publique, nous devrions bénéficier d’un service impeccable dans tous les domaines... Sauf que non. Nous ne sommes les meilleurs en rien, il nous arrive même d’être mauvais à tout, pour paraphraser le regretté Marcel Pagnol (dans le film « le Schpountz »). Pourquoi ? Parce que l’administration, c’est comme les médicaments, le surdosage peut tuer.
Le surdosage administratif fait que la fonction publique française souffre de deux défauts mortifères, qui ont contaminé jusqu’aux plus hautes fonctions de l’État : un excès de contrôle et une absence de responsabilité.

Le rôle premier d’un employé de l’administration (je ne parle pas des opérationnels), c’est avant tout de produire du texte, de la norme, du règlement. Le fonctionnaire justifie son existence en produisant du texte. Plus on compte de fonctionnaires, plus on produit du texte, et ce n’est pas pour rien que la France peut s’enorgueillir de disposer de la littérature administrative la plus fournie du monde. Et plus il y a de la norme, du règlement, plus le Français, que notre vénéré président, dans sa grande lucidité, a traité de « gaulois réfractaire », s’ingénie à ne pas les appliquer, à les contourner, à les esquiver, essentiellement pour embêter le fonctionnaire. Conséquence, l’obligation de recruter plus de fonctionnaires pour les faire appliquer, et de contrôleurs pour les faire respecter. D’où des services administratifs pachydermiques, y compris dans les entreprises privées, et une armée de contrôleurs, des impôts, du travail, de l’agriculture, du bâtiment, de la marine, de ceci, de cela, investis de la mission divine de punir le fraudeur qui sommeille en chacun des Français. Un contrôleur n’est heureux que lorsqu’il qu’il a pu trouver un motif (et dieu sait que ce n’est pas ce qui manque) pour vous coincer, selon le principe que « nul n’est censé ignorer la loi ». Le pire, c’est que ces gens-là (y compris un premier ministre qui n’hésite pas à vous pondre un décret applicable dans les 24 heures) n’ont aucune idée des dégâts que leur boulimie normative provoque chez les administrés, particuliers et entreprises.

Et cela nous amène au deuxième défaut, encore pire que le premier, si possible : l’absence de responsabilité individuelle.
Un fonctionnaire bénéficie de la garantie d’emploi à vie. Pas seulement l’assurance d’avoir un boulot jusqu’à sa retraite, mais aussi qu’il n’en changera que s’il veut bien. Une des conséquences, c’est que la fonction publique est encombrée de personnels qui ne sont plus adaptés aux progrès technologiques et aux besoins des administrés, qu’il faut satisfaire en faisant appel à des sous-traitants du privé. Un autre effet « kiss cool » de la pléthore de fonctionnaires est la multiplication des niveaux hiérarchiques, qui fait que l’administré qui subit un préjudice du fait d’une décision arbitraire de l’administration n’a quasiment aucune chance de se voir dédommager. « Responsable mais pas coupable », s’était justifiée Georgina Dufoix à l’époque du sang contaminé. Ni coupable, ni responsable, telle serait la devise de l’administration (et du pouvoir) d’aujourd’hui.

Quand notre président de la République s’exonère de toute responsabilité dans les mesures qu’il a lui-même décidées, il ne faut pas s’étonner que nous soyons incapables d’organiser correctement une vaccination de masse, quand bien même en sollicitant le renfort (très cher payé) de cabinets conseil américains qui ne sont pas réputés pour être des « chevau-légers » mais plutôt de la grosse artillerie. Il ne faut pas s’étonner non plus que nous soyons le seul pays à avoir inventé l’autorisation de sortie, un document que l’on pourrait croire avoir été rédigé par une bande de hippies sous LSD. Il ne faut pas être surpris non plus si à chaque « fait divers », le premier réflexe de nos gouvernants, issus eux-mêmes de l’administration ou entourés de haut-fonctionnaires, soit de s’abriter derrière une indignation hypocrite, pour ne pas avoir à assumer les responsabilités pourtant au cœur de leur fonction.