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La grève, le droit à tous les droits ?

, par  NEMO , popularité : 6%
NJ-Ile de France

Il se dit beaucoup de bêtises sur le droit « constitutionnel » à la grève, comme si c’était un droit sacré qui permet tout et n’importe quoi. Hé bien non, il y a des règles à respecter, et si nos gouvernants n’avaient pas du sang de navet, ils les appliqueraient.

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Il fallait voir Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement, se gondoler lors d’un point de presse à l’évocation du bordel ambiant provoqué par la grève du 5 décembre, quelle revanche pour cette franco-sénégalaise victime du blanc colonisateur, la France une fois de plus dans la m..., un vrai bonheur. Et Philippe Martinez, le patron de la CGT, sortant d’une réunion ministérielle, fier comme un Thierry le Paon (jeu de mot), sourire discret du vainqueur. Enfin, après tant d’années de vaches maigres, la gloire, la victoire au bout des rails. Et la France, les petites gens en galère, ce qu’il avait l’air de s’en foutre.

D’ailleurs, c’est bien simple, s’il n’y a plus de trains, c’est la faute à l’Etat qui entend mais n’écoute pas. Des négociations, dans les centaines de réunions pour préparer la réforme des retraites ? Tout était bouclé d’avance, d’après l’intransigeant défenseur des « travailleurs », le gouvernement s’est contenté de leur dicter ses décisions (à quoi ont donc servi ces centaines de réunions, on se le demande, ou alors à faire le joli cœur à la sortie, devant les micros et les caméras ?).
Bref, encore une fois, et comme c’est parti, un syndicat ultra minoritaire, implanté essentiellement dans les services publics, et dictant sa loi dans les transports, va mettre le gouvernement à genoux. Pas touche à notre statut (la défense des salariés en général, c’est pour faire passer la pilule aux gogos).

Je reviendrai une autre fois sur le statut des salariés de la SNCF, qui ne subsiste que grâce à la générosité de l’ensemble des français (plus de 3 milliards par an, rien que pour les retraites), y compris ceux qui ne prennent jamais le train. Ce qui m’intéresse aujourd’hui, c’est ce fameux droit de grève qui serait « constitutionnel », donc imprescriptible et inaliénable. Eh bien figurez-vous que ce n’est pas si simple.

Sachez d’abord que le droit de grève a été interdit (y compris par la révolution de 1789), il a même été considéré comme un « délit de coalition » jusqu’à Napoléon III. Si la loi Ollivier autorisait la grève, elle était considérée comme une rupture du contrat de travail, et les patrons (lire Zola) n’hésitaient pas à envoyer la troupe pour protéger les « jaunes » ou la main d’œuvre étrangère recrutée pour remplacer les grévistes. Jusqu’en 1909, les agents de la fonction publique en étaient exclus.

Il a fallu attendre la constitution de 1946 et son préambule pour que le droit de grève soit gravé dans le marbre : « Le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent », sans autre précision. Et encore 3 ans pour qu’un arrêt du Conseil d’Etat reconnaisse aux agents publics le droit de grève, à condition que ce droit soit conciliable avec les missions du service public. Grande discussion à l’époque dans l’hémicycle du Conseil d’Etat. Pour certains conseillers, le droit de grève pour les agents chargés d’une mission de service public était une absurdité, à l’argument que le fondement de la grève, c’est bien de faire pression sur un employeur, donc de le pénaliser en ne produisant plus, bref, en appuyant là où ça fait mal, le portefeuille des grands patrons. Sur qui pèse la pression des agents publics ? Pas sur un patron, mais sur l’Etat. Or, qu’est-ce que l’Etat, sinon l’ensemble des Français, agents publics compris. Faire grève lorsqu’on est agent public, c’est faire grève contre soi-même. Un peu spécieux, j’en conviens, mais pas totalement dénué de fondement.

C’est la thèse de l’égalité des droits qui l’a emporté : il ne fallait pas créer un antagonisme entre le privé et le public (la bonne blague). Mais il n’était tout de même pas question de pousser ces droits jusqu’aux fonctions régaliennes de l’Etat, armée, police, justice, mais pas seulement. Ces braves conseillers eussent été bien inspirés d’ajouter à la liste les « transports publics » et l’énergie.

Et ce qui devait arriver arriva : au fil du temps, le droit de grève, à l’origine moyen ultime de défense des salariés contre des patrons sans scrupule, est devenu une arme de destruction massive des institutions entre les mains de syndicats ultra politisés [1]. et fort peu représentatifs en dehors du secteur public. Et pourquoi le secteur public ? Parce que la grève "révolutionnaire" est un moyen pour les communistes qui se cachent sous les syndicalistes de détruire la société capitaliste qu’ils abhorrent. Et parce que pour les agents publics, c’est à la fois sans risque et très avantageux : l’Etat ne va pas mettre la clé sous la porte, les agents publics ne risquent pas de perdre leur emploi, et la grève, quoi qu’ils en disent, paie. Aujourd’hui, en moyenne, et à fonction équivalente (sauf les cadres supérieurs) on gagne plus dans le public que dans le privé, alors que jusque dans les années 70 c’était l’inverse. Le beau résultat des luttes syndicales : il faut deux à trois emplois privés pour financer un emploi public en France.

Et puis prendre en « otage » les usagers, ça ne leur pose aucun cas de conscience, puisque à chaque fois c’est la faute de l’Etat patron, que les usagers des services publics sont l’Etat, donc s’ils sont emm..., c’est bien fait pour leurs pieds. CQFD

[1c’est un secret de polichinelle que les secrétaires généraux de la CGT ont toujours eu une double casquette de membres de la direction du parti communiste (même si Martinez a rendu sa carte suite à un conflit avec Robert Hue, qu’il trouvait trop mou)