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Quand le service public se fait inquisiteur !

, par  vanneste , popularité : 7%
Cet article provient d'une source externe à NJ sans autorisation mais à titre d'information.

desinformationLe duo Lapix-Cohen face à Florian Philippot dans « C’à vous »* pose évidemment deux questions. La première est celle de l’utilité d’un prétendu service public de l’audio-visuel. Celui-ci devrait être d’une neutralité irréprochable. Or, en tentant de déceler dans une réponse formulée par Marine Le Pen sur la responsabilité de la rafle du Vel d’Hiv une preuve de son retour à des positions d’extrême-droite et l’hypocrisie de sa démarche de normalisation du parti qu’elle préside, Mme Lapix a témoigné d’un parti-pris agressif résolument hostile au choix d’un certain nombre de Français. Ce faisant, elle n’a pas respecté non plus le niveau de pensée exemplaire qui devrait être une exigence du service public. Elle s’est senti ainsi le droit d’imposer ses préjugés en dépit de l’éthique de sa profession. La seconde question est celle du Front National : ou cette formation porte atteinte à nos institutions, menace leur existence et elle doit être interdite ; ou elle est un parti, fût-il nationaliste, mais respectueux des lois et des règlements, et il est scandaleux qu’elle subisse un traitement discriminant dans les médias et notamment sur le service public.

Selon un procédé devenu habituel, une phrase tenue par une personnalité a été surinterprétée par le microcosme médiatique. Mazerole sur RTL interrogeait Marine Le Pen sur la « rafle du Vel d’hiv ». La candidate du Front National a adopté une position gaulliste qui consiste à rappeler que Vichy, « l’Etat français », n’était pas la France, et que la France, la « vraie France », comme disait de Gaulle était alors à Londres et continuait de se battre contre les nazis. Cette position a été maintenue par tous les Chefs d’Etat jusqu’à Jacques Chirac, qui n’a nullement clos la polémique, contrairement à ce qu’a affirmé péremptoirement Fogiel sur RTL. Accepter que Vichy, « nul et non avenu », était la France, c’est nier que la France ait été résistante et victorieuse. C’est nier l’annulation de la légalité du régime collaborateur en 1944 et oublier les condamnations qui ont frappé ses membres et leurs soutiens. C’est ouvrir la voie à la repentance et à la haine de soi que la France doit rejeter parce qu’elle s’est battue et que grâce au Général de Gaulle et à ceux qui l’ont rejoint, elle a participé à la victoire. Qu’on mette davantage l’accent sur la complicité de ceux qui s’étaient emparé du pouvoir en 1940 avec les nazis plutôt que sur ceux qui dès 1940 avaient mis leur vie en jeu pour défendre l’honneur et la liberté du pays, d’Honoré d’Estiennes d’Orves à Jean Moulin, revient à insulter ceux qui dès les premières heures ont fait le bon choix, les Schumann, les Rémy, les Galley, les Guéna. Le débat n’est pas clos. Contrairement à ce que dit Fogiel, ce n’est pas en évoquant les pages noires qu’on peut valoriser les moments plus brillants, puisque désormais seules les premières sont rappelées et les autres oubliées. La position de Mme Le Pen n’est d’ailleurs pas extrémiste puisqu’on la retrouve chez Mitterrand ou Badinter, comme chez Seguin ou Guaino. Le refus d’imputer les crimes de Vichy à la France est le contraire du négationnisme ou d’une quelconque nostalgie pétainiste puisque cela revient à maintenir l’illégitimité de ce régime dans notre histoire. Quant à ceux qui s’appuient sur le vote des parlementaires pour accréditer la continuité de l’Etat, ils semblent oublier qu’aucun vote populaire n’est intervenu entre 1936 et 1944 tandis que la dérive du pouvoir après 1940 l’amenait à trahir sans cesse davantage nos valeurs nationales et à se soumettre de plus en plus à l’occupant. Historiquement et intellectuellement, la distinction de la France et de l’Etat français n’a donc rien à voir avec l’extrême-droite et ne saurait être confondue avec la volonté de légitimer ou de disculper Vichy. C’est même le contraire et l’interview subie par Philippot reposait donc sur le contre-sens et était animé par la mauvaise foi, intellectuellement et moralement indignes du service public, si ce n’est du journalisme en général.

Durant l’émission de la 5, Mme Lapix a tenté de faire signifier à cette distinction l’inverse de son intention. En fait, pour elle, ce n’est pas ce qui est dit ou pensé qui a de l’importance, mais qui le dit ou le pense. Mme Lapix prétend que cette question a une signification différente lorsqu’elle est exprimée au Front National, qui aurait un « statut particulier » (vous avez dit statut ?), et soulève le soupçon quand celle qui l’évoque s’appelle Le Pen. Mme Le Pen n’a pas le droit d’avoir une position gaulliste. Même lorsqu’elle en a, ce n’est pas pareil, en raison de l’origine de celui qui la formule. (Vous avez dit origine ?) C’est ce qu’on appelle le procès d’intention, l’argument « ad hominem », qui consiste à juger ce qu’une personne dit, non en fonction de ses dires mais à partir des préjugés qu’on nourrit à son encontre, de l’identité qu’on lui impose. C’est la démarche propre à tous les totalitarismes depuis la loi des suspects jusqu’à la Shoah, en passant par les répressions communistes. Certains mauvais esprits diraient que c’est une forme de racisme. Vous êtes coupable, non parce que vous avez fait ou dit, mais parce que vous êtes « ci-devant », juif, bourgeois, noir etc… Vous êtes au Front National … donc… Que ce parti ait prodigué des efforts pour se dégager de certaines de ses origines n’est nullement considéré comme un progrès, mais comme une mystification, un camouflage. Il n’y a ni prescription ni pardon. « Vous êtes né fasciste et êtes donc coupable à vie et de père en fille », en quelque sorte. Il est amusant de voir nos inquisiteurs , accusateurs publics, commissaires politiques adopter à l’encontre du Front National une tournure d’esprit révélatrice qu’ils critiquent dans d’autres cas, par exemple pour les crimes de droit commun. Mais là encore, c’est une constante. Les totalitaires sont toujours plus durs avec la déviance politique qu’avec la délinquance. Car, le problème est là, et grave. Je voterai pour François Fillon parce que je suis gaulliste, mais il me paraît très inquiétant que des journalistes de notre service public puissent être pris ainsi en flagrant délit et qu’un parti politique qui a de nombreux élus et une masse importante d’électeurs ne soit pas traité à égalité avec les autres. Chaque jour qui passe montre que la France s’écarte du fonctionnement d’une véritable démocratie. C’est infiniment plus grave que de vouloir rebâtir un récit national où la France était résistante et non collaborationniste.

*(Il est remarquable que RTL dans son commentaire parle de l’Etat français sans paraître s’apercevoir que cette expression utilisée à propos de cette polémique est maladroite. L’Etat français ici ne peut désigner que le régime de Vichy, et non l’appareil administratif de la France)

Voir en ligne : http://www.christianvanneste.fr/201...