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PIERRE ETIENNE MUVIEN

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Cet article provient d'une source externe à NJ sans autorisation mais à titre d'information.

« Je n’irai pas franchir, de l’amertume, le seuil, Ouvrir le souvenir dont je porte le deuil... »

Pierre-Etienne Muvien nous a quittés à 93 ans, le 25 septembre 2013. Il était né en 1920 à Alger. Son cœur y était resté, saignant à jamais des blessures morales reçues en ce 26 mars 1962 : « La tâche indélébile sur le « pouvoir gaulliste ».

Poète, il a écrit des vers d’une rare violence : « 40 ans, merci la France... 40 ans, une vie depuis l’indépendance.. ». Et ce poème : « Non retour », qui ouvre cet article.

Ce n’est pas une nécrologie. On écrit des nécrologies pour les morts, Pierre-Etienne est un poète. Les poètes ne meurent pas, Ils chantent pour toujours leurs peines et leurs joies.

Pour l’ami, parti à peine plus loin, derrière la porte du songe, une pensée, une prière. Le silence.

A Dieu.

Geneviève de Ternant Jeudi 26 septembre 2013

Ses obsèques auront lieu lundi 30 septembre en l’église de la sainte famille à Cagnes/mer à 10 heures.
L’incinération se fera dans l’intimité l’après-midi.

Téléphone d’Éliane MUVIEN : 09.52.83.21.52

PIERRE-ETIENNE MURIEN

PIERRE-ETIENNE MURIEN2


Maintenon, y a des choses que tu peux pas les dire,
Des mots que comme insultes, oualou, y’a pas plus pire !
Appelle un, n’importe où, négro, youpin, bicot,
La police, le procès y z’arrivent aussitôt !
Y’a les ligues qu’elle défilent et tout l’monde y s’déchaîne !
La honte elle est sur toi, t’y es bon comme la romaine !
A côté d’ça, t’y a le droit, même c’est recommandé
D’appeler « pied-noir » un qui t’a rien d’mandé !
S’plique moi la différence, aousqu’elle est l’astuce ?
Sauf qu’pour noyer son chien, on dit qu’il a des puces…
Suppose qu’les marseillais on s’les nomme « blague à mort »,
Les bretons « tête de mule », « Bazouk » les gens du nord,

Les parisiens « gros bec », les auvergnats « rapia »,
Les toulousains « saucisse », les corses « vendetta »,
Quel beau sac d’embrouilles pour parler des Français !
Combien de tchaklalas pour combien de procès…
Au sujet des Pieds-noirs, rapport à l’étiquette,
Y’en a qui z’ont sarché, y z’ont fait des enquêtes
Qu’on dirait le concours du tchalef le plus gros !!!
Personne y peut prouver ça qu’y disent, ces falsos…
Un, il accuse les zouaves, les « pieds-noirs » pleins d’la boue…
Un aut’, y s’leur répond « c’est à dormir debout » !!!
« Moi, j’dis que les raisins que les pieds y z’écrasent
S’les sont peints en noir… Pas la peine d’faire des phrases !!!

Embrouillounes que vous êtes, un troisième il ajoute :
C’est rapport au charbon des marins dans la soute,
Que, bessif, les pieds noirs y z’avaient quand y sortent…
Personne y peut m’enl’ver cette preuve que j’apporte !
On était tous babaos à s’poser des questions
Quand d’un coup y’en a un qui lance sa solution :
On descend d’Amérique, des tribus, des indiens,
De ceuss qu’on a chassé, nous aut’es comme des chiens…
On s’les appelait « blackfeet », peignaient leurs pieds en noir,
Tribus comme « œil de lynx », « sioux » ou « faucons noirs »…

Je ne trancherai pas parmi ces hypothèses,
Il n’y a pas matière à présenter une thèse.
Ce pseudo sobriquet, vulgaire, péjoratif,
Quelque soit l’employeur, la raison, l’objectif,
Nous fut attribué pendant l’Indépendance
Par un large consensus du mépris de la France…
Afin d’édulcorer ce terme peu flatteur,
Certains se plaisent à dire qu’il n’est pas réducteur…
Pourtant traiter quelqu’un de « pied » ou « d’imbécile »
Est d’une équivalence ni fortuite, ni subtile…

Le « noir » incarne le deuil, l’obscurité, la crasse
Et conforte l’anathème, l’injure, la disgrâce…
Mais ces vains subterfuges nous laissent convaincus
Que « Pieds-noirs », à dessein, synonyme de « vaincus »,
Est ce terme foncier que la France affectionne
Distillant le venin que l’hypocrisie donne…
Ces manœuvres mesquines, misérables et sans gloire
Ne parviendront jamais à falsifier « L’Histoire »…
Les français d’Algérie quelle qu’en soit l’origine
Ont des critères palpables, des vertus synonymes
De vaillance, de courage. Du fond de leurs entrailles,
Issus des bâtisseurs et des champs de bataille,
Contre vents et marées, ils ont pourvu la France
D’une œuvre colossale jusqu’à… l’Indépendance


PLACE DU GOUVERNEMENT

C’était la Principale, un lieu commun, un symbole ! Un centre populaire, l’Agora ! l’Acropole !

JE NE REVERRAI PLUS...

Cette place coutumière dont l’Histoire a chassé Les fantômes d’avant, ces ombres du passé

Enfouis dans ma mémoire en clichés entassés.

La foi semblait pourtant protéger de sa grâce Ce carrefour de la ville, ce mélange de races :

Cathédrale et Mosquée qui priaient face à face.

Bab-Azoun, Bab-et-Oued, quartier de la Marine, La Pêcherie, Front de mer, les petites rues voisines

Déversaient chaque jour leurs nuées citadines.

Partis tôt le matin par des tramways grinçants, Des bus à l’impérial au "souk ahurissant",

Venaient de l’intérieur, les chaouïas d’antan

Burnouss et djellabas, chapeaux kabyles sévères, Couffins, sacs, peaux et poules ! parfois une moukère

Tatouée, silencieuse et se tenant derrière...

Que n’y vendait-on pas ? Du thé, des fèves chaudes, Calentita, beignets que les mouches galvaudent !

Sur le coup de cinq heures, "les allumettes" en maraude !

Sur la place bariolée où prédomine le blanc, Se mêlent des chéchias, des képis, des turbans,

Des feutres, des pailles, des voiles, des cheichs en longs rubans.

Parmi cette ruche où le temps déambule, La vie s’écoule au rythme que le soleil formule :

Le plus souvent "ardent" "pesant" : la canicule !

Les éventails s’agitaient éphémères et poussifs, Aux cafés d’alentour, mus par des inactifs,

Indolents, paresseux ou des juifs attentifs.

La vue de ma mémoire a retenu ces tons Eparpillés en vrac sur une toile de fond,

Echancrure vers le port d’un horizon profond.

ET JE N’ENTENDRAI PLUS...

L’ensemble de ces bruits qui résonnent encore Les cris, les invectives, les phonos trop sonores,

Le bruit gai des claquettes autour des oublies d’or !

Les vendeurs de pastèques aux onomatopées... A dix-sept heures : "Dernière heure", journal anticipé !

Tohu-bohu des trams "ferraillants", dissipés !

Les marchands ambulants, turbulents et pressants, "Les Marabouts de pluie", derboukas, en dansant !

Les échos, les rumeurs qu’on raconte en passant !

Et ce théâtre vivait heureux et débonnaire, Chacun suivant le cours de la Place légendaire

Remplie du tulmute de scènes populaires.

Parfois, venant du Port, une sirène mugissait : "Le Ville d’Alger" partait ! Le remorqueur s’empressait :

Trois coups brefs, joyeux, la passe disparaissait...

Ces bruits montent et bourdonnent quand, dans la solitude, Ils ressurgissent fidèles du fond de l’habitude

En concert nostalgique perturbant ma quiétude.

JE NE SENTIRAI PLUS...

Les parfums, les odeurs que cette place immense Diffusait chaque jour en proposant au sens

La palette des senteurs que l’odorat recense.

Montant de la Pêcherie, où sont donc les fritures ? Et des marchés voisins, les corbeilles de fruits mûrs ?

Les arômes, les épices, les huiles âcres, les saumures ?

La loubia, la chorba, allumettes aux anchois ! Les poivrons qui rissolent, un peu brûlés parfois !

Les melons odorants, et la menthe ! ça va d’soi !!!

Les parfums capiteux, huileux et entêtants, Sur une table bancale, le santal trop puissant,

La bergamote, le musc, l’héliotrope envoûtants !

Enfin, non loin de là, les effluves d’anisette, Surtout Phoenix et Gras, des Brasseries et Buvettes,

Et l’odeur des kémias, rougets, sardines, brochettes !

Parfois, parmi la foule, un délicat jasmin Embaumait un instant, se frayant un chemin

Vers sa réminiscence perdue dans le lointain.

Comme le jasmin, j’exhale doucement, Je vois, entends, respire mélancoliquement

Le souvenir de la "Place du Gouvernement" !

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Voir en ligne : http://popodoran.canalblog.com/arch...