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"Les pieds noirs" à la portugaise

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"Les pieds-noirs" à la portugaise

20 février 2014 | Par Arthur Porto

Presque quarante ans après, au moment où on va commémorer la révolution des œillets, apparaît en France Le retour, traduction du livre de Dulce Maria Cardoso, O retorno, publié au Portugal en 2011. En quelque sorte le roman des « pieds-noirs portugais ».

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On connaît l’histoire de l’empire colonial Portugais (le pays des explorations maritimes depuis le XVème siècle), déconstruit à la suite de la Révolution des Œillets du 25 avril 1974, conduite en partie par les jeunes capitaines dont le devenir et le terrain d’action promis était celui de l’Afrique, Angola, Mozambique, Guinée-Bissau... Et quand on dit décolonisation on évoque le retour des colons, souvent des populations en grande précarité, partis en urgence, rentrant au pays sans « rien » ou presque. Ce fut le pont aérien de 1975 ayant culminé avec l’indépendance d’Angola le 11 novembre 1975.

L’auteure, Dulce Maria Cardoso, qui a vécu son enfance en Angola a construit son roman, pas autobiographique, autour de cette problématique et a eu besoin de temps (beaucoup d’années) pour raconter l’histoire de Rui, un adolescent, rentré en métropole avec sa mère et sa sœur, en catastrophe, en attendant son père, arrêté le jour même de leur départ, resté sans qu’on sache précieusement de qui il est prisonnier et pour quel raison.

Le roman commence avec ce dernier repas en famille, avant que l’oncle ne vienne les chercher pour les conduire à l’aéroport. On est pris par la qualité d’écriture qui retrace un des aspects de la chute de l’empire vue par ce jeune qui nous dit tout de l’épreuve qu’il vit, et nous rend témoins de son parcours initiatique. Aussi bien quitter la terre qui l’a vu naître, se rappeler des péripéties de son monde d’enfance, ses amis, ses camarades de classe, ses compagnons de la première cigarette, des premières images à la sauvette d’Emmanuelle, des clichés sur les autres aussi bien les noirs, les militaires ou les filles de la métropole. L’incompréhension sur ce qui arrive à sa famille et le quotidien de toutes les autres familles autour

Et dans la singularité du style de Dulce Maria Cardoso, il y a cette façon dont Rui s’approprie des événements, nous associant à sa pensée, à ses dialogues réels ou imaginaires. Il nous donne finalement le récit des premiers mois vécus à Lisbonne, par des « pieds-noirs » dans un grande hôtel cinq étoiles à Estoril-Lisboa (désaffecté par les clients habituels, les riches touristes apeurés par les risques de la Révolution). Réquisitionné par l’État, c’est là que les « retornados » (les rapatriés) sont parqués à plusieurs par chambre, en attendant de trouver une famille, un lieu où aller, un logement où s’installer.

Dans les salons luxueux aux fauteuils confortables en velours rouge, tout se détériore, le matériel comme le relationnel. Ce sont les déracinés, les mal aimés, sans travail, sans espoir qui déambulent, s’invectivent, se plaignent sans fin de leur destinée. Quelques pages savoureuses nous font vivre de l’intérieur la vie collective de cet hôtel, entre une Directrice faussement attentionnée (déclassée), le comité des travailleurs alors en vogue au Portugal et les familles happées par le sentiment d’injustice et le désespoir d’un horizon sans alternative.

Sans jugement, sans parti pris, mais avec un vrai engagement, Dulce Maria Cardoso donne la parole à un jeune homme en devenir avec ses apprentissages, ses certitudes, ses doutes et un futur qui, même illusoire, il ne cesse de s’inventer.

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Descolonização - Revista ’FLAMA’, n.º 1.420, de 23 de Maio de 1975 (ANGOLA : ÊXODO)

* Le retour, Ed. Stock (collection la cosmopolite), 308 pgs. Saluons l’excellente traduction de Dominique Nédellec. Un glossaire en fin d’ouvrage donne la traduction en français des mots "angolais"...

* * O retorno, Ed. Tinta-da-China, Lisboa, 269 pgs.

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