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L’exception culturelle française, oui mais…

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À quoi sert l’exception culturelle si elle se plaît à noyer la culture française dans l’océan d’un marché mondial du divertissement ?

Moi, l’exception française que je préfère, c’est l’exception culturelle. A-t-on raison de la revendiquer ?

Si on la pose en s’interrogeant sur la finalité de l’exception, la réponse ne peut qu’être positive et enthousiaste. La culture est d’abord l’affirmation d’une identité. Elle définit la « personnalité » d’une nation, à travers sa langue, son histoire, ses traditions, ses arts, grands et petits. Elle participe à cet échange, la clef de l’Humanité, où l’on ne perd rien de ce qu’on donne en gagnant ce qu’on reçoit. L’affirmation de l’identité culturelle, de la différence, n’est pas une provocation belliqueuse, c’est au contraire un geste d’offrande. Le classicisme est français, le romantisme allemand, Molière et Racine n’appartiennent pas à la même culture que Shakespeare, le rationalisme de Descartes s’oppose à l’empirisme anglo-saxon, l’impressionnisme de Debussy est éloigné de la sentimentalité débordante de Tchaïkovski.

Mais si la culture donne, elle permet aussi de recevoir. Les arts africains ou asiatiques ont laissé leur empreinte sur la peinture française au tournant des XIXe et XXe siècle. Malraux avait bien résumé les buts de l’exception culturelle qui justifiait son ministère : « rendre accessibles les œuvres capitales de l’humanité, et d’abord de la France au plus grand nombre possible, assurer la plus vaste audience à notre patrimoine culturel, favoriser la création… » Tout est dit. Il faut faire rayonner la culture française. Il faut susciter la création. Mais surtout, il faut pratiquer ce que Vitez appellera « l’élitaire pour tous », c’est-à-dire distinguer les œuvres qui, françaises ou étrangères, offrent à chacun cette transcendance vers l’Humanité.

En revanche, si on évalue l’exception à travers ses moyens, la réponse est moins évidente. On ne doit pas réduire la notion d’exception à celle de sanctuaire qui garantirait cette dépense, quels que soient les résultats de l’activité. La question des intermittents doit se poser dans ce cadre et non comme un droit divin indiscutable. La France possède un ministère de la Culture. L’État, les collectivités territoriales et des régimes de taxation ou d’indemnisation font converger vers la culture des budgets significatifs. La puissance publique contribue à l’activité privée dans le domaine culturel. Mais cela est-il légitime dès lors que la culture française recule dans le monde et qu’elle accepte d’être de moins en moins française ?

Le message du Premier ministre aux Daft Punk lors de leur triomphe aux Grammy Awards a atteint le sommet du contre-sens grotesque. « La France est fière de vous », a-t-il lancé. Ce duo, dont le nom n’évoque rien de français, qui chante en anglais, vient de signer chez Columbia et refuse d’aller aux Victoires de la Musique, mais se rend aux Brit Awards de Londres, n’est pas perçu comme spécifiquement français. Même les commentaires qui saluent sa réussite sont en franglais chez nous et parlent de « french touch ». On se demande pourquoi. À quoi sert l’exception culturelle si elle se plaît à noyer la culture française dans l’océan d’un marché mondial du divertissement sous domination anglo-saxonne ?

Voir en ligne : http://www.bvoltaire.fr/christianva...