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Bourdin, le procureur qui se prenait pour un journaliste

, par  NEMO , popularité : 6%
NJ-Ile de France

Un type qui, à chacune de ses émissions, se croit obligé de marteler, la main sur le cœur, qu’il ne roule pour personne et qu’il traite tous ses « invités » à égalité, c’est plus que bizarre, c’est louche !

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Je sais, taper sur Jean-Jacques Bourdin, l’interviewer vedette du PAF, cela n’a rien d’original. Si, dans les réseaux sociaux de droite comme de gauche, il reçoit plus de coups que de fleurs, ce serait, d’après lui, la preuve de son impartialité, de sa pugnacité, et de son courage. Chez lui, contrairement à tous les autres, aucune compromission avec le monde politique, pas de déjeuner, pas même un verre avec un élu. Son job, assène-t-il, c’est de poser les questions que le peuple se pose, mais que tous ses collègues, par complaisance, n’osent pas poser - ou alors seulement à Marine le Pen, parce que c’est un passage obligé-, et de harceler son interlocuteur (lorsqu’il ne l’aime pas), jusqu’à le réduire en bouillie. Alors, il se rengorge, content de lui.

Bon, moi, quand un journaliste répète à l’envi, et alors qu’on ne lui a rien demandé, qu’il traite tous ses « invités » de la même manière, que voulez-vous, ça me met la puce à l’oreille. Alors je me suis astreint à écouter son émission « Bourdin direct » sur RMC (et BFM TV) .
Pour votre édification, j’en ai extrait quatre séquences, particulièrement significatives parce que mettant en scène deux personnalités absolument contraires : Marine le Pen, les 23 mars et 19 avril, et Emmanuel Macron les 24 février et 17 mars.
Dans les quatre entretiens, Bourdin a apparemment tenu son engagement : courtois, plus rigide avec la présidente du Front National, qui l’est aussi pas mal, plus chaleureux avec le leader d’En Marche, qui l’est encore plus. Cela, c’était l’écume des choses, l’impression d’honnête homme qu’il voulait donner.

Dans le premier entretien avec Marine le Pen, le jeu de questions-réponses, entre 8h30 et 9 heures, était convenable. On aurait pu ne rien avoir à en dire, si ça ne s’était gâté après les infos : Intervenaient alors, sans doute choisis au hasard (je taquine) une majorité d’auditeurs nettement hostiles, et en prime une invitée présentée comme "experte", qui s’appliqua à démonter méthodiquement, en l’absence de Marine le Pen, et sans que Bourdin ne lui fasse la moindre critique, tout ce que la candidate avait pu proposer. L’art de démolir en catimini, sans se mouiller lui-même, ce que Madame le Pen avait construit pendant son temps de parole.

Rien de tel pour le premier entretien avec Macron, que du bonheur, des auditeurs convaincus, heureux, "en marche". Pas le moindre début de commencement de questionnement critique de quoi que ce soit de la part de l’implacable Bourdin… Tiens tiens…

Et puis, vinrent les « entretiens d’embauche ». Déjà, donner un titre aussi trivial à une émission qui prétend départager les candidats à la présidence de la République Française, comme si c’était lui, Bourdin, le maître de cérémonie d’un "speed dating". Sans compter qu’il s’est même permis d’interroger Macron sur la table de multiplication : "combien font 7x8 ? Hein ?... L’abaissement du niveau de la fonction présidentielle, la faute à qui ?

Sinon, avec Macron, ça ronronnait au coin du feu. On aurait cru une émission enregistrée, comme si chacun récitait des répliques apprises par coeur. Bourdin posait les questions incisives qu’il est le seul à oser formuler : « ça s’est passé comment, lorsque vous avez annoncé à vos parents que vous alliez épouser Brigitte, mère de trois enfants et de 24 ans votre aînée ? » ou encore, « c’est vous qui avez décidé de ne pas avoir d’enfant ? » Macron répondait « amour, toujours, ma femme, ses enfants, les français, les étrangers, le monde entier », et le meilleur interviewer du PAF approuvait, conquis. A aucun moment, Bourdin n’a fait ne serait-ce que semblant de pousser l’interrogatoire. Le financement de sa campagne ? Cela n’intéresse pas les français, voyons ! Les deux compères étaient d’accord sur tout, et parfaitement satisfaits l’un de l’autre. Si j’étais mauvaise langue, je dirais qu’ils semblaient filer le parfait amour.

Avec Marine le Pen, on était sur un autre registre. Bourdin questionnait en rafale sur les affaires, Jean-Marie le Pen, l’immigration, le Vel d’Hiv, d’un ton de procureur de la République. Marine le Pen répondait, il faut le reconnaître, avec une agressivité qui ne la servait pas, mais avec une grande clarté. Et c’est là qu’intervenait la "tacatactactique" du Bourdin : il reprenait la même question, comme si son interlocutrice n’avait pas répondu. Marine s’énervait un peu, il recommençait, encore et encore. Elle finissait par l’envoyer aux pelotes (oh la vilaine !), et là, l’effet négatif obtenu, il concluait la passe d’arme en reprenant, déformés jusqu’à la caricature, les propos de la présidente du Front National.
Un exemple : Marine le Pen explique pourquoi il faut arrêter de laisser entrer, par an, 230.000 étrangers sans aucune qualification ; c’est parce que nous avons déjà près de 7 millions de chômeurs. Bourdin résume : donc, pour vous, « le chômage en France, c’est de la faute des étrangers ».
Un autre : la candidate propose un rétablissement des frontières, l’expulsion des étrangers et des bi-nationaux fichés S, ou condamnés pour un crime ou un délit. Si on avait pris ces mesures, ajoute-t-elle, les tueries du Bataclan et de Nice auraient pu être évitées. Bourdin traduit par « vous voulez expulser des centaines de milliers d’étrangers et de français ! Vous promettez le risque zéro aux français, mais vous savez bien que c’est impossible. D’ailleurs, en Russie, Poutine n’a pas pu empêcher l’attentat de Saint Pétersbourg. »
Et tout à l’avenant. De la mauvaise foi sur de la malhonnêteté. C’est ça, le journalisme exemplaire selon Saint Bourdin !

A ce compte, j’aime mieux les ectoplasmes de l’audio-visuel public. Au moins, eux, ne se prennent pas pour des journalistes.