Une chose digne de remarque, c’est qu’il méditait à cette époque la conquête de l’Algérie ; mais pour n’exciter la jalousie de personne, et n’être pas accusé de pensées ambitieuses, il voulait accomplir ce projet avec le concours des puissances maritimes, qui se seraient liguées pour chasser les Barbaresques de la côte d’Afrique, et naturaliser sous ce ciel méridional le sucre, le café, le coton et toutes les denrées coloniales. C’était Joseph Bonaparte qui avait conçu le projet : le premier consul l’avait fort approuvé, et s’en occupait avec l’ardeur qu’il mettait en toutes choses. Il sentait vivement la honte qu’il y avait pour l’Europe d’avoir à sa porte un repaire de pirates auxquels de puissantes nations ne rougissaient pas de payer tribut. La proposition de coopérer avec lui à la conquête simultanée de l’Afrique du Nord fut faite par le premier consul à plusieurs puissances continentales. L’Espagne seule montra quelque bonne volonté à le seconder. Badia, voyageur instruit et très aventureux, plus connu sous le nom d’Ali-bey, fut envoyé par le cabinet de Madrid pour explorer ces contrées ; Les autres gouvernements accueillirent avec indifférence ou même avec défiance les propositions du premier consul.
Quelques-uns assurent que ce projet d’expédition fut une des causes de la rupture de la paix - Baron de Meneval Souvenirs historiques –.
Quoi qu’il en soit, les grands événements qui survinrent empêchèrent Bonaparte de donner suite à une pensée éminemment civilisatrice.